Les nouvelles sont rarement bonnes dans le réseau de la santé du Québec, mais en voilà une: les hôpitaux ont réussi à réduire de façon notable et durable les maladies transmises dans leurs murs, comme les infections au Clostridium difficile ou aux bactéries résistantes aux antibiotiques.

«Nous avions déjà observé une diminution marquée des infections nosocomiales l'année dernière, et cette tendance s'est maintenue», affirme le Dr Rodica Gilca, de la Direction des risques biologiques à l'Institut national de santé publique du Québec.

Selon des données inédites, le nombre de cas des diarrhées associées à Clostridium difficile (DACD) dans les 88 hôpitaux qui participent à la surveillance provinciale depuis août 1984 est tombé à 3222 pendant l'année 2009-2010 (se terminant le 1er avril dernier), alors qu'il avait dépassé les 5000 cas en 2004-2005.

L'incidence a chuté de moitié, passant de 13,7 à 6,5 cas par 10 000 jours-présence. Il s'agit là d'un succès appréciable, lorsqu'on sait que l'épidémie était provoquée par une souche de bactérie hypervirulente. Les maladies associées à cette souche ont d'abord été observées au Centre médical de l'Université de Pittsburgh, à quelque 200 kilomètres de la frontière canadienne. La bactérie a migré et causé des centaines de décès dans les hôpitaux nord-américains.

«Le réseau de la santé québécois s'est rapidement mobilisé pour contenir et contrôler l'épidémie de Clostridium, et cette mobilisation a porté ses fruits», a dit le Dr Gilca, au cours d'un entretien. Des données qui seront publiées par l'Institut national de santé publique cet automne confirmeront que les taux d'incidence se sont stabilisés aux niveaux observés avant l'épidémie de 2004.

Surveillance

Le Québec a mis en place un système provincial de surveillance unique au monde, ce qui a aidé les autorités à mieux combattre la maladie. Tous les hôpitaux québécois rapportent les cas mois par mois, et de façon obligatoire, alors qu'ailleurs, les déclarations sont généralement volontaires. En Grande-Bretagne, la surveillance s'exerce seulement auprès des patients de 65 ans et plus, qui forment la cohorte le plus à risque.

Les normes de prévention des infections ont été rehaussées partout. Le ministère de la Santé a injecté 20 millions de dollars dans la lutte contre le Clostridium. Des équipes professionnelles qui se consacrent au contrôle des infections ont été formées dans tous les établissements. Les mesures d'hygiène, comme le lavage des mains, ont été scrupuleusement suivies. Des investigations ont été menées dans les hôpitaux qui affichaient des taux élevés.

«L'incidence des maladies a beaucoup baissé grâce à ces efforts, a dit le Dr Gilca. Je ne crois pas que la maladie puisse être éradiquée. Elle existera toujours. Peut-on faire baisser encore l'incidence? Des équipes examinent ce qu'on peut faire.»

Le nombre total de bactériémies à Staphylococcus aureus résistant à la méticilline (SARM), une autre maladie nosocomiale, a lui aussi chuté. Il s'est stabilisé autour de 380 cas depuis 2008, alors qu'il était de 625 en 2004. Le SARM, également présent dans le milieu hospitalier, peut causer des cas fatals de septicémie.

La littérature scientifique rapporte régulièrement l'émergence de nouvelles bactéries résistantes aux antibiotiques. Une nouvelle superbactérie, d'origine indienne, a fait les manchettes médicales la semaine dernière. Deux cas sont déjà déclarés au Canada. Mais cela n'inquiète pas le Dr Gilca. «Le réseau québécois de la santé est beaucoup mieux préparé qu'avant pour faire face à ce genre d'infections», dit-elle.

Le médecin et ses collègues viennent de signer un article sur l'infection au Clostridium dans la revue Infection Control and Medical Epidemiology. Ils observent que l'incidence de la maladie a été plus élevée à Montréal et la région qu'ailleurs au Québec, plus élevée dans les gros hôpitaux et, bien entendu, plus élevée dans les établissements de santé comptant une forte proportion de patients âgés.