La famille d'une personne âgée de 94 ans, morte après avoir été ébouillanté dans une baignoire, veut traîner devant les tribunaux l'agence de santé et des services sociaux de Montréal et le CHSLD Manoir de l'Ouest-de-l'Île, de Pierrefonds.



Le fils de Willard Wilson a raconté lors d'un point de presse, mardi, comment son père a péri tragiquement, en 2009, après s'être agrippé au robinet d'eau chaude en tentant de se relever d'une chute dans la baignoire.

En deux ans, deux personnes âgées sont mortes ébouillantées au Manoir de l'Ouest-de-l'Île, un établissement privé dont 83% des lits sont subventionnés par l'Agence de la santé et des services sociaux.

«Mon père avait toute sa tête, il avait une santé relative, a expliqué Éric Wilson. Sa mort a été inattendue, brutale, un tel choc qu'il nous a fallu un certain temps avant de réaliser et de commencer à nous poser des questions sur sa mort.»

En appui à la famille, Louis Plamondon, président de l'Association québécoise de défense des droits des retraités et préretraités (AQDRP), a mis en lumière un rapport du Protecteur du citoyen, daté de juillet dernier, dans lequel on déplore le fait que la résidence a attendu plus de neuf mois après le deuxième accident pour faire installer un mitigeur thermostatique. Selon les données disponibles, l'eau du bain de M. Wilson atteignait 60°C, alors que la norme canadienne prévoit une température maximale de 49°C.

M. Plamondon a vertement critiqué le CHSLD, l'Agence de la santé et des services sociaux et le centre des grands brûlés du CHUM pour leur «laxisme».

«Le CHUM n'a pas signalé le décès au coroner, a affirmé M. Plamondon. La mort de M. Wilson aurait été méconnue sans le signalement de la famille. Nous sommes outragés, choqués, c'est inacceptable. Sans compter que l'Agence fait montre d'un manque flagrant de contrôle de ses établissements.»

Joint par La Presse, le directeur du Manoir de l'Ouest-de-l'Île, Steve Karakas, s'est dit surpris par la façon de procéder de la famille Wilson. Il affirme qu'il a reçu mardi une lettre d'avocat qui réclame 300 000$.

«Le Protecteur du citoyen a dit qu'il s'agissait d'un accident, a dit M. Karakas. M. Wilson avait des problèmes de peau chroniques, de l'eczéma. La façon de procéder de la famille est regrettable, d'autant plus qu'un seul des fils de M. Wilson est venu le visiter durant les huit ans qu'il a passés à notre résidence.»

Norme pour l'eau chaude

À l'Agence de la santé et des services sociaux, on a expliqué qu'on ne pouvait pas commenter l'affaire puisqu'il est question de recours judiciaires, mais on a précisé qu'on avait suivi les recommandations du Protecteur du citoyen. Au cabinet de la ministre Dominique Vien, déléguée aux services sociaux, l'attachée de presse Louise Quintin a expliqué que la Régie du bâtiment étudie actuellement un projet de règlement qui fixerait à 43°C la température maximale de l'eau dans les centres de soins et les résidences pour personnes âgées. Le projet de loi doit être déposé au printemps.

«Le contrôle serait exercé lors des demandes de certification des résidences de même que lors des visites d'appréciation, a précisé Mme Quintin. Ce que je peux vous dire, c'est que la ministre trouve effrayant que des choses comme ça se produisent encore en 2010. On ne veut plus que ça se reproduise.»

Depuis 10 ans, le Bureau du coroner du Québec a été saisi de 17 cas de personnes, en majorité de 65 ans et plus, qui ont perdu la vie à la suite de brûlures. Et on ne compte plus les cas d'hospitalisation tellement ils sont nombreux.