Les résidences privées pour personnes âgées offrent des soins de moindre qualité que leurs pendants du réseau public et il est donc incompréhensible que les provinces canadiennes continuent de favoriser le secteur privé dans la gestion des soins aux aînés, révèle une nouvelle étude qui sera publiée aujourd'hui par l'Institut de recherche en politiques publiques du Canada.

Professeure au département de pratique familiale de l'Université de Colombie-Britannique, Margaret J. McGregor a fait une revue scientifique de centaines d'études concernant l'hébergement pour personnes âgées au Canada et aux États-Unis. Selon elle, une vaste majorité d'analyses prouve que les établissements à but lucratif sont plus susceptibles de fournir des soins de moindre qualité aux aînés.

«Si on construit un système dans lequel le but principal est de faire de l'argent, la gestion ira à l'encontre du principe d'offrir de bons services. Les établissements privés ont plus tendance à vouloir économiser, par exemple en réduisant le personnel», note-t-elle.

La qualité des soins offerts par les résidences privées et publiques a été évaluée de différentes façons. On a notamment comptabilisé le personnel, le taux de roulement des employés, le temps passé avec les résidants durant les repas, l'usage de mesures de contention ou non... Et les résidences privées présentent généralement de moins bons résultats que leurs vis-à-vis du secteur public.

La professeure note que, malgré cela, «les orientations de nombreuses provinces canadiennes vont à l'encontre de ces résultats». Par exemple, le Québec a fermé 7600 lits dans les centres d'hébergement publics au cours des 10 dernières années. Juste à Montréal, plus de 1700 lits ont été fermés depuis 2006.

Les coûts

Mme McGregor souligne par ailleurs dans cette étude que seulement 10% des dépenses publiques et privées faites en santé chaque année au Canada vont à l'hébergement des aînés.

«C'est peu, dit-elle. Malgré ça, les gouvernements disent toujours que les aînés coûtent cher. Mais ce n'est pas l'hébergement de longue durée qui coûte cher. C'est quand les personnes âgées tombent malades et qu'elles doivent aller à l'hôpital. Ça, c'est dispendieux. Mais pas l'hébergement.»

Mme McGregor note ironiquement que les résidences privées pour aînés ont moins de ressources médicales et tendent à envoyer plus facilement leurs résidants à l'hôpital, où les soins coûtent cher.

Au Québec, un programme de certification des résidences privées pour aînés a été mis sur pied en 2009. Ce processus oblige les résidences privées à respecter une série de critères. Deux enquêtes récentes de La Presse ont démontré que le processus de certification n'est pas très sévère. Le gouvernement présentera ses nouveaux critères de certification au cours des prochains mois. Un rapport minimal d'employés par résidant pourrait être ajouté.

Pour Mme McGregor, ces processus de contrôle sur le secteur privé ne sont pas une panacée. «Parce que si on veut un vrai système de contrôle strict et rigoureux, ça coûte très cher à appliquer. Cet argent serait plus intelligemment utilisé dans l'ouverture de lits au public», dit-elle.

Au cours des prochaines années, la création de lits d'hébergement se poursuivra à la vitesse grand V au pays puisque 120 000 lits supplémentaires devront s'ajouter aux 200 000 lits existants, selon Statistique Canada.

Pour Mme McGregor, les gouvernements ne devraient pas hésiter à investir dans l'hébergement public des aînés puisque la recherche scientifique prouve que c'est le meilleur moyen d'offrir des soins de qualité à une population des plus vulnérables.