Le 29 novembre dernier, Germaine Dubé, 75 ans, est morte après avoir ingurgité un produit de nettoyage toxique et corrosif au CHSLD Marie-Rollet. Selon Jean-Pierre Ménard, avocat spécialisé en causes médicales, il est inacceptable que le réseau de la santé québécois ne prenne pas plus de mesures pour éviter des morts comme celle de Mme Dubé.

«Au cours des dernières années, au moins deux autres personnes sont mortes de la même façon. Le Ministère a déjà reconnu que les produits toxiques ne sont pas assez protégés dans les CHSLD. Qu'est-ce qu'on attend pour agir?» demande-t-il.

Le rapport du coroner Jean Brochu sur la mort de Mme Dubé a été rendu public hier. On apprend que, vers midi le 28 novembre, la dame, qui souffrait de démence, a été trouvée dans une salle de toilettes avec un verre et un contenant de nettoyant. On l'a emmenée à la salle à manger pour le dîner, et c'est à ce moment qu'elle se serait mise à vomir «une matière dont l'odeur était celle du nettoyant pour baignoires», peut-on lire dans le rapport.

La dame a été transportée à l'hôpital Santa Cabrini, où elle est morte 20 heures plus tard d'une pneumonie d'aspiration.

Le fils de Mme Dubé, Joël Marier, déplore que le produit qu'a ingéré sa mère ait été «laissé sans protection». «Le bidon de 4 L était sur le meuble-lavabo d'une salle de bains commune, et non dans une armoire verrouillée, explique-t-il. On a placé notre mère en CHSLD par nécessité. On pensait que ce serait un lieu sécuritaire. Laisser des produits dangereux à la vue, c'est inacceptable.» M. Marier et sa soeur, Caroline, espèrent que la mort de leur mère lancera «un signal d'alarme» dans le réseau pour que d'autres drames soient évités.

Deux autres morts

Selon Me Ménard, deux autres personnes sont mortes dans des circonstances analogues au cours des dernières années, mais il semble que rien n'ait été fait pour prévenir ce type de tragédie. En 2002, Roger Théberge est mort après avoir avalé un verre de produit nettoyant au CHSLD Heather Lodge, dans Lanaudière. En 2007, Richard Larrivée est mort après avoir ingéré un produit antiseptique toxique dans la résidence où il habitait, dans Charlevoix.

Me Ménard précise que, en 2009, le ministère de la Santé avait noté que les résidants avaient «accès à des produits dangereux» dans plusieurs des 184 établissements visités à des fins d'inspection. «Qu'attend-on pour agir? Le ministère de la Santé doit résoudre le problème, dit Me Ménard. Il y a un manque de leadership assumé du gouvernement dans la sécurité des soins aux aînés.»

Le président de l'Association québécoise de défense des droits des personnes retraitées (AQDR), Louis Plamondon, croit que les administrateurs de CHSLD et de résidences pour aînés devraient avoir plus de comptes à rendre. «Les preuves s'accumulent et montrent qu'il y a une négligence structurelle envers les aînés. Les administrateurs doivent répondre de leurs erreurs. Sinon, ça va continuer», plaide M. Plamondon.

Au ministère de la Santé et des Services sociaux, on mentionne que «l'entreposage et la gestion des produits dangereux fait l'objet d'une norme pour l'agrément» dans les CHSLD et que les établissements qui ne se conforment pas font l'objet d'un suivi étroit.

La porte-parole du Ministère, Nathalie Lévesque, ajoute que les recommandations des coroners sont toujours prises en considération par Québec.