La certification des centres d'hébergement pour toxicomanes ou joueurs pathologiques sera terminée en juillet 2011, disait le gouvernement Charest il y a un an. Or, seulement la moitié d'entre eux ont été certifiés à ce jour. Il faudra encore plusieurs mois, voire un an, pour terminer le processus.

Selon un règlement en vigueur depuis juillet 2010, les organismes privés ou communautaires qui accueillent des toxicomanes ou des joueurs pathologiques ont l'obligation d'obtenir une certification de Québec. Ils doivent déposer une demande et se conformer à une série d'exigences sur la formation des intervenants, la santé et la sécurité des résidants, par exemple. Cette certification existait avant juillet 2010, mais elle était volontaire.

Or, 66 des 122 centres d'hébergement du Québec ont été certifiés jusqu'à maintenant. Une cinquantaine d'entre eux avaient obtenu la certification à l'époque où le programme était volontaire. Les autres avaient fait une demande avant juillet 2010, donc avant l'entrée en vigueur de la certification obligatoire.

«Le processus va bon train»

Selon un communiqué de presse daté du 7 juillet, «un total de 66 ressources avaient obtenu la certification au 30 juin 2010». C'est donc dire qu'aucun nouveau centre d'hébergement n'a été certifié au cours des 10 derniers mois.

En avril 2010, la ministre déléguée aux Services sociaux à l'époque, Lise Thériault, disait pourtant à La Presse que le processus de certification serait achevé en juillet 2011. Elle faisait valoir que le processus était avancé.

Lors de l'étude de ses crédits budgétaires en commission parlementaire, le 14 avril dernier, la ministre qui a succédé à Mme Thériault, Dominique Vien, a assuré que «le processus [allait] bon train». Elle a confirmé la certification de 66 centres, sans indiquer que c'était le même nombre qu'en juin 2010.

Le Conseil québécois d'agrément (CQA) analyse les demandes de certification. La directrice du programme, Sylvie Lambert, souligne que 21 centres ont présenté une demande au cours des derniers mois. Donc 35 n'en ont pas encore déposé une. Ils devront le faire avant le 30 juin, à défaut de quoi ils devront cesser l'hébergement sous peine d'amendes de 750$ à 2250$ par jour - ils pourraient toujours donner des services de jour. Soulignons que Narconon Trois-Rivières, centre lié à la scientologie qui a fait jaser, n'a pas encore fait de demande.

Selon Mme Lambert, il faut de six à neuf mois pour analyser une demande. Le CQA doit entre autres visiter l'établissement et produire un rapport à l'agence de la santé et des services sociaux concernée. C'est elle qui, au bout du compte, certifie l'organisme.

Échéancier irréaliste

Comme les visites des établissements ont commencé en février, le CQA ne pourra remettre avant septembre les premiers rapports aux agences. Mme Lambert n'a pas voulu commenter les propos passés du gouvernement selon lesquels le processus serait terminé en juillet. L'échéancier donné à La Presse en avril 2010 était de toute évidence irréaliste.

L'attachée de presse de la ministre Vien, Louise Quintin, a plaidé que le gouvernement «a voulu bien faire les choses». Il a décidé en cours de route de rencontrer les exploitants de plus de 90 centres, craignant que plusieurs ne soient pas conscients de leurs nouvelles obligations légales. La tournée a pris fin en février. Mme Quintin a rappelé que les demandes de certification doivent être déposées avant juillet. «On a tout fait ça legit. On a laissé un délai» pour se conformer aux nouvelles règles, a-t-elle dit.

Le gouvernement Charest a décidé de rendre la certification obligatoire à la suite des recommandations répétées du Protecteur du citoyen. Au cours des dernières années, ce chien de garde a relevé de «sérieuses lacunes sur le plan de la sécurité, de la salubrité et de l'encadrement général des personnes prises en charge» dans certains centres d'hébergement. «Dans d'autres cas, on ne parlait plus de lacunes, mais bien d'un total laisser-aller en ce qui concernait l'environnement clinique et humain, quand il ne s'agissait pas carrément de négligence et d'abus», indiquait le Protecteur du citoyen à l'automne 2009.

L'Association des centres de réadaptation en dépendance du Québec réclamait elle aussi une certification obligatoire. Elle regroupe 4 organismes certifiés et 16 centres publics qui ne sont pas visés par la certification. Selon sa directrice générale, Lisa Massicotte, le processus «va amener un ménage» dans l'hébergement en toxicomanie et jeu pathologique. Il est trop tôt selon elle pour dire si plusieurs centres devront cesser l'hébergement et si les autres parviendront à répondre à la demande.

L'histoire rappelle - sans être de la même ampleur - les retards dans la certification des résidences privées pour personnes âgées. Elles devaient toutes être certifiées en juin 2009, mais à Montréal, 30% ne le sont toujours pas.