Le programme provincial de dépistage de la trisomie 21, lancé par Québec il y a un an, n'est pas assez efficace selon l'Association des obstétriciens et gynécologues du Québec. L'accès à une échographie, un élément pourtant essentiel à la fiabilité du test, est limité. Si bien que plusieurs femmes n'obtiennent pas de résultats fiables, dénonce le regroupement, qui presse Québec d'adopter un nouveau processus de détection.

«Le test qu'on utilise n'est pas optimal. On a cinq à dix ans de retard. C'est mieux que rien. Mais ça ne permet pas le meilleur taux de détection», affirme la vice-présidente de l'Association des obstétriciens et gynécologues du Québec, la Dre Isabelle Girard.

Jusqu'à tout récemment, les femmes enceintes âgées de plus de 35 ans, dont les risques d'accoucher d'un enfant atteint de trisomie 21 sont plus élevés, devaient procéder à une amniocentèse pour diagnostiquer la trisomie 21 chez leur foetus.

Aujourd'hui, des techniques moins invasives remplacent cette intervention. En passant des tests de dépistage, toutes les femmes enceintes peuvent connaître leurs risques d'avoir un enfant atteint de trisomie 21. Elles peuvent ensuite décider de subir ou non une amniocentèse. «Il y a des risques de fausse couche avec l'amniocentèse. Le programme de dépistage permet d'en limiter le nombre», explique la Dre Lucie Morin, qui pratique à l'hôpital Sainte-Justine.

Attente monstre

Le test de dépistage de la trisomie 21 est offert depuis juin 2010 au Québec. Il est disponible dans sept régions et le sera sous peu à la grandeur de la province.

Le test consiste en une première prise de sang et une échographie entre la 11e et la 15e semaine de grossesse. Conséquence: depuis l'adoption du programme de dépistage, les demandes d'échographie ont bondi.

En un an, 8000 femmes ont participé au programme. À terme, le ministère de la Santé du Québec estime que la moitié des 88 000 femmes qui accouchent chaque année y participeront. C'est autant d'échographies qui devront être réalisées dans un réseau déjà surchargé.

«Mais on manque de disponibilité pour les échographies. On ne répond déjà pas à la demande», note la Dre Morin. Plusieurs femmes doivent attendre leur échographie de la 20e semaine avant de connaître leur probabilité d'avoir un enfant ayant la trisomie 21, ajoute la Dre Girard. À ce moment, il est possible de subir une amniocentèse et même de se faire avorter. «Mais plus tu attends, plus c'est difficile émotionnellement», note-t-elle.

Le coordonnateur du programme de dépistage de la trisomie 21 au ministère de la Santé, le Dr Jean-Claude Forest, reconnaît que l'accès aux échographies de datation varie d'une région à l'autre. «On a des échographies pour environ la moitié des cas», dit-il. Mais il explique que plusieurs femmes sont certaines de la date de leurs dernières menstruations et que l'échographie n'est donc pas essentielle.

Meilleurs tests

Actuellement, les femmes qui souhaitent obtenir une échographie à leur premier trimestre de grossesse, mais qui n'y ont pas accès dans le système public, peuvent aller au privé, où des frais avoisinant les 200$ sont exigés. Le test ne leur est pas remboursé par Québec. Une situation que la Dre Girard aimerait voir corriger.

Celle-ci aimerait également que le plus récent test de détection de la trisomie 21 soit implanté: le test de clarté nucale. Ce test a un taux de détection de 90%, contre 75% à 85% pour le test actuellement remboursé par Québec.

«Il faudrait offrir la clarté nucale au public, et qu'un jour, les centres privés et certifiés qui font ces analyses puissent le faire et que le programme de Québec rembourse le tout», estime la Dre Girard.

La Dre Morin croit pour sa part qu'il est vrai que «dans un monde idéal», les tests de clarté nucale seraient offerts et disponibles pour toutes les femmes qui le désirent». «Mais ça, c'est dans un monde idéal. La santé de la femme n'est pas une priorité au Québec. En attendant, le test de dépistage n'est pas parfait, mais il est bien mieux que ce qu'on avait avant», note la Dre Morin.

Le Dr Forest souligne pour sa part que le programme de dépistage de la trisomie 21 est en développement et qu'il pourra s'améliorer avec le temps. «Mais ç'aurait été irréaliste de penser offrir la clarté nucale à toutes. Il manque de centres certifiés pour répondre à la demande», dit-il.