Après le Centre universitaire de santé McGill (CUSM) et l'Hôpital Juif, c'est au tour du CHUM et de l'hôpital Maisonneuve-Rosemont d'ouvrir leurs livres et de dévoiler les décès entraînés par des accidents dans leurs établissements. Trois patients sont morts dans ces circonstances à l'un ou l'autre des trois hôpitaux du CHUM (Hôtel-Dieu, Saint-Luc et Notre-Dame), l'an dernier, alors qu'on déclare jusqu'à maintenant deux décès à l'hôpital Maisonneuve-Rosemont.

Avec ces cinq décès et les 10 autres dévoilés plus tôt cette semaine par le CUSM et l'Hôpital juif au quotidien The Gazette, la région montréalaise compte au moins 15 des 75 morts dénombrés dans le premier registre des incidents et accidents survenus dans les établissements de santé du ministère de la Santé, a constaté La Presse.

Dans ce premier registre couvrant la période du 1er avril au 30 septembre 2011, le gouvernement n'avait pas manqué de préciser que les données recueillies auprès de 80 établissements étaient «incomplètes» et reflétaient probablement une «sous déclaration».

Lors d'un entretien accordé à La Presse, Francine David, directrice de la gestion de l'information, de la qualité et de la performance du CHUM, a expliqué que deux des décès ont été entraînés par une chute, l'autre étant relié à un problème d'équipement. L'établissement universitaire de santé n'a pas été en mesure de dévoiler les circonstances exactes entourant ces décès afin de protéger l'identité des patients, mais on explique que les chutes surviennent généralement chez les personnes âgées.

2716 incidents ou accidents

Au total, le CHUM a compilé 2716 incidents ou accidents dans ses hôpitaux durant la période couverte par le premier registre du gouvernement. Les 888 incidents ou accidents reliés à la médication n'ont pas entraîné de décès, mais ils composent la plus grande proportion des déclarations. Les chutes arrivent au deuxième rang, avec 721 déclarations, dont deux décès, et les incidents ou accidents reliés à du matériel ou équipement sont en troisième place avec 467 déclarations, pour un décès.

«Dans le cas des chutes, on a mis en place un comité conjoint avec le département de gériatrie pour élaborer des mesures correctives, explique Mme David. On restreint au maximum la contention pour les personnes âgées, mais on a prévu des détecteurs de mouvements. Le personnel prévoit aussi des levées du lit plus fréquentes, par exemple pour aller à la toilette, et on veille plus attentivement à l'hydratation des patients qui, si elle est mauvaise, peut engendrer des étourdissements. En ce qui concerne le matériel, on a mis en place des mesures pour acheter du matériel supplémentaire et assurer une stérilisation plus rapide des instruments.»

À l'hôpital Maisonneuve-Rosemont, on n'a pas dévoilé des données complètes sur les incidents et accidents, mais l'établissement explique qu'un suicide est à l'origine du premier décès déclaré. Dans l'autre cas, le patient était aux soins intensifs et il serait mort après avoir retiré son respirateur, a indiqué André Bouthillier, porte-parole de l'hôpital.

Sept morts au CUSM

Dans un article paru la semaine dernière dans The Gazette, l'Hôpital juif a expliqué qu'un problème diagnostic, un autre avec de l'équipement, et un incident relié à la diète d'un patient sont à l'origine de trois décès. De son côté, le CUSM a fait état de circonstances plus variées pour ses sept décès déclarés, citant des chutes ou des surdoses de narcotiques.

Les déclarations d'incidents et d'accidents sont obligatoires en vertu de la Loi dans les établissements de santé, et touchent tout le personnel, allant du concierge au médecin, en passant par les infirmières et les préposés aux bénéficiaires. À cet effet, il y a un formulaire type à remplir dans tous les départements.

Un réflexe

«Il faut cependant que la déclaration des incidents et accidents devienne un réflexe, concède Mme Francine David, responsable du dossier au CHUM. Comme gestionnaires, on doit prendre nos bâtons de pèlerin et inculquer l'habitude auprès du personnel. Pour les infirmières, c'est presque une deuxième nature de déclarer les accidents, mais ce n'est pas le cas pour tous les médecins.»

Afin de ne pas froisser les médecins qui craignent que les erreurs médicales n'engendrent des poursuites et même une radiation au tableau du Collège des médecins du Québec, le gouvernement s'est longuement penché sur le vocabulaire à choisir, et il utilise les mots incidents et accidents plutôt qu'erreurs. Il y a les incidents sans conséquence pour le patient, ceux avec des conséquences mineures et temporaires, les accidents majeurs avec des conséquences permanentes, comme une fracture de la hanche qui cloue un patient à un fauteuil roulant. Et il y a des accidents qui nécessitent une intervention nécessaire à la vie du patient.

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La situation au CHUM (accidents et incidents)

Chute: 721 (deux décès), 465 incidents sans conséquence, 13 majeurs

Diète: 27, tous sans conséquence

Médication: 888, dont 702 incidents sans conséquence, 141 accidents mineurs et temporaires, 2 majeurs

Test diagnostique: 105, tous des incidents sans conséquence ou des accidents mineurs et temporaires

Traitement: 291, dont 193 sans conséquence, 70 accidents mineurs, et quatre majeurs

Bâtiment: 11, dont un seul majeur avec des conséquences

Effet personnel: 19, dont 13 accidents mineurs et temporaires

Matériel: 467, dont un décès. 353 sont des accidents sans conséquence, et deux majeurs avec des conséquences

Agression-abus-harcèlement: 18, mais aucun considéré comme un accident majeur avec conséquences

Transfusion: 3, tous des incidents ou accidents mineurs

Autre: 138, dont la nature n'est pas précisée.

Total: 2716 accidents et incidents dont trois décès

51%: des accidents et incidents déclarés par les 80 établissements de santé du Québec ont touché des patients âgés de 75 ans et plus, selon le premier registre sur les accident et incidents du gouvernement du Québec, dévoilé en décembre 2011, et couvrant une période de six mois, entre avril et septembre.