Il n'y aura pas de construction domiciliaire en face de la tristement célèbre pinède d'Oka. «Pour préserver la paix», le conseil municipal a décidé de protéger les terrains de 1,2 hectare qui faisaient l'objet d'un litige entre un promoteur et les Mohawks de Kanesatake.

La municipalité s'est servie d'une disposition de la Loi sur l'expropriation pour imposer une réserve sur le terrain disputé. En conséquence, aucun permis ne sera accordé au promoteur Norfolk. L'idée est de lui racheter sa terre ou, faute d'entente, d'exproprier Norfolk avec dédommagement.

«Je veux une fois de plus rassurer tout le monde: personne ici n'est intéressé à revivre les événements de 1990, a fait savoir Richard Lalonde. La paix règne à Oka, tous les ordres décisionnels travaillent ensemble dans le même sens et la population n'a pas à s'inquiéter.»

Ce geste survient alors que Norfolk disait se préparer, demain, à aller sur son terrain avec un ingénieur forestier pour déterminer quels arbres sont malades et devraient être abattus. Le promoteur voulait aller de l'avant dans le lotissement de son terrain, situé le long de la route 344.

Le problème, c'est que ce terrain fait l'objet de négociations entre le gouvernement canadien et Kanesatake, qui le revendique. Les Mohawks estiment qu'il fait partie de la seigneurie du Lac-des-Deux-Montagnes, qu'on leur a progressivement usurpée au cours des siècles.

Normand Ducharme, copropriétaire de Norfolk, évalue son terrain à 400 000$. Il l'a acheté d'un couple de Blancs qui avait fait faillite. L'acquisition s'est faite en 2009, soit après qu'Ottawa eut consenti à négocier avec les Mohawks sur la question de la seigneurie.

M. Ducharme se dit maintenant prêt à discuter avec la municipalité d'Oka mais se désole de ce qu'elle lui mène «une guerre judiciaire» et qu'elle ait pris les grands moyens - des terres mises en réserve lors d'une séance extraordinaire du conseil municipal, un samedi - pour s'assurer qu'il ne puisse faire aucune construction.

«Moi non plus, je ne veux pas d'une autre crise d'Oka, mais je veux qu'on respecte mes droits en tant que citoyen. Qu'on me permette d'exploiter mon terrain ou qu'on me le rachète.»

Le maire d'Oka, Richard Lalonde, dit pour sa part qu'il s'agissait de s'assurer que cesse la provocation du promoteur à l'égard de Kanesatake. Il ajoute: «On dit que (ces terres) sont à Oka, mais c'est dans la zone de Kanesatake.»

Au ministère des Affaires municipales, Sylvain Bourassa, attaché de presse du ministre Laurent Lessard, dit que Québec accompagne Oka dans sa démarche.

Mais si le maire lui-même dit que ces terres appartiennent à Kanesatake, la Ville d'Oka fait-elle bon usage des deniers publics en achetant des terres qu'elle ne pourra utiliser? À cela, M. Bourassa répond qu'il ne lui appartient pas de se prononcer sur la question.

Le maire Richard Lalonde n'a pas non plus voulu s'étendre sur le sujet.

La population d'Oka comptait 3300 habitants au dernier recensement, en 2006.