(Québec) Le cabinet du maire de Québec a orienté la présentation d’un récent sondage sur le projet de tramway de manière à gonfler l’apparence d’appui au projet, malgré des avertissements des fonctionnaires municipaux, laissent entendre des courriels rendus publics jeudi en vertu d’une demande d’accès à l’information.

Le maire de Québec avait rencontré les médias le 27 octobre dernier pour présenter le dernier coup de sonde commandé par la Ville à la firme Léger. Bruno Marchand avait insisté en conférence de presse sur le chiffre de 40 % d’opinions positives à l’égard du tramway.

C’est ce chiffre que les documents de Léger mettaient de l’avant. Il n’était pas si éloigné de l’appui mesuré en mai et en octobre 2022, qui se situait entre 41 % et 44 %, laissant croire à un appui relativement stable.

Or, c’est en passant au peigne fin les sondages, après la conférence de presse, que les journalistes ont constaté que l’appui était plutôt de 36 %. Le chiffre de 40 % était obtenu en excluant les 10 % des répondants qui n’ont pas d’opinion.

C’étaient donc 40 % des 90 % avec une opinion sur le projet qui en avaient une lecture positive, soit 36 % de l’ensemble des répondants. Cette façon de faire, qui n’avait jamais été appliquée dans les précédents sondages, n’a pas été expliquée aux médias. Elle n’était mentionnée qu’à l’aide d’un astérisque dans le document de Léger.

Dans les jours suivants, le maire Bruno Marchand s’était défendu d’avoir voulu tromper les gens. « Si je le refaisais, est-ce que je le referais différemment ? La réponse est oui. Est-ce qu’il y a eu des cachettes ? Il n’y en a pas », assurait l’élu.

Des échanges de courriels rendus publics jeudi montrent que des fonctionnaires avaient signifié leurs réserves au cabinet du maire, qui a finalement décidé d’y aller avec le chiffre de 40 %.

Des réserves évoquées

« On peut être très vite sur la défensive avec ce jeu d’interprétation et donner l’impression qu’on “joue” avec les données pour ne pas assumer la baisse de 6 %… La notion de transparence sera soulevée », avertissait Nathalie Cloutier, responsable des communications au Bureau de projet du tramway.

« Je suis d’accord avec Nathalie. […] Il y a un risque de confusion », répondait dans un courriel la vice-présidente de Léger pour le Québec, Cyntia Darisse.

Une conseillère en communication s’en remet quant à elle à Nathalie Cloutier « et [à] nos collègues du cabinet pour valider l’orientation pour la présentation des chiffres ».

« Ce qui doit être mis en lumière est le 40 % », tranche Karine Breton, directrice adjointe du cabinet du maire. « Je maintiendrais le 40 % svp », ajoute l’attaché de presse du maire de Québec, Thomas Gaudreault.

L’idée d’inclure une page pour expliquer le changement de méthodologie a été discutée dans les échanges de courriels. Mais elle sera finalement retirée de la présentation. « Quelques commentaires recueillis du cabinet : On enlève finalement la slide 6 », commence ainsi le courriel d’une conseillère en communication.

« Manifestement, le bureau de projet voulait être prudent, Léger également, mais c’est clairement une volonté du cabinet de faire de cette manière, c’est une intention politique », a réagi le chef de l’opposition officielle à l’hôtel de ville de Québec, Claude Villeneuve.

« Ça n’aide pas, de dire que l’appui se maintient puis on se rend compte que l’appui a baissé, dit-il. Ce n’est rien pour aider la crédibilité. »

Le cabinet du maire Bruno Marchand n’a pas souhaité commenter la teneur des courriels jeudi, rappelant que le maire avait déjà fait son mea culpa dans les jours suivant la présentation du sondage.