Le centre de tri de Montréal n'a jamais été aussi proche de la fermeture: ni la Ville ni le gouvernement ne se dit prêt à lui venir en aide financièrement.

Le groupe Tiru, propriétaire du centre de tri Saint-Michel où sont acheminées toutes les matières recyclables des îles de Montréal et de Laval, évalue à quelque 150 000$ ses pertes hebdomadaires en ces temps difficiles. Des pertes, précise-t-il, qui le rapprochent chaque jour un peu plus d'une fermeture définitive.

«Ça ne fonctionne tout simplement plus, laisse tomber Laurent Pepin, porte-parole. Connaissez-vous beaucoup d'entreprises qui peuvent avoir de telles pertes et continuer à fonctionner? À sa face même, l'équation ne tient plus.»

«Si la situation persiste, il faudra remettre en question le maintien de l'installation de tri», a-t-il ajouté, sans préciser de date.

Le problème, c'est que l'entreprise n'a plus de sources de revenus, ou si peu. Il faut savoir que les centres de tri se financent de deux manières: par le tarif exigé des villes lorsqu'elles déposent leurs matières recyclables, et par la revente des matières.

Or l'an dernier, Tiru a accepté de prendre les matières (125 000 tonnes annuellement) tout à fait gratuitement, estimant pouvoir faire des profits uniquement en les revendant sur le marché. Mais ce marché, on le sait maintenant, s'est effondré en raison de la baisse considérable des prix des matières. Résultat: quelque 20 000 tonnes de papier sont actuellement entreposées et la faillite du service de tri point à l'horizon.

L'entreprise a donc lancé un véritable appel à l'aide aux villes de Montréal et de Laval, vendredi dernier par communiqué, afin qu'elles acceptent de rouvrir les contrats signés, comme le leur permet le plan de redressement du gouvernement Charest récemment dévoilé.

La réponse de Montréal n'a pas tardé: c'est à Québec de faire sa part, pas à l'administration municipale. Dans un communiqué au français plutôt alambiqué, la Ville «invite le gouvernement à envisager l'intégration de la situation prédominante au centre de tri de Montréal dans son plan de redressement (des industries)».

Traduction: la Ville demande à Québec d'aider financièrement Tiru, dans le cadre du plan de soutien à l'économie dévoilé à la mi-janvier par la ministre des Finances, Monique Jérôme-Forget.

Mis au parfum de cette demande hier, le gouvernement Charest a lui aussi répondu par la négative. Il estime avoir déjà fait sa part avec son plan d'aide à l'industrie du recyclage, qui contient des garanties de prêts et une enveloppe à la modernisation de quelque 4 millions de dollars.

Vous refusez donc d'aider directement le centre de tri de Montréal? «Oui, comme pour les autres centres de tri, pour des raisons de justice et d'équité», a indiqué Dave Leclerc, porte-parole de la ministre de l'Environnement, Line Beauchamp.

Quant à la Ville de Laval, elle ne ferme pas complètement la porte à une réouverture du contrat, mais ne se montre pas, non plus, encline à poser un tel geste. «C'est la toute dernière des options envisagées, a indiqué Amélie Cliche, porte-parole du cabinet du maire Gilles Vaillancourt. Mais avant toute chose, une rencontre serait peut-être appropriée.»

Visiblement, la façon de procéder de Tiru passe mal à l'hôtel de ville, où on précisait hier n'avoir reçu aucun appel ni communication officielle de l'entreprise. Celle-ci, qui a embauché la firme de relations publiques National pour la représenter, s'est en effet contentée de diffuser un communiqué pour faire valoir sa position.

Interrogée à ce propos, Tiru a d'abord indiqué être «au début des pourparlers». Puis l'entreprise s'est dite «dans l'attente de discussions plus approfondies». Pour enfin répondre qu'«une demande officielle sera faite».

Pour joindre notre journaliste: francois.cardinal@lapresse.ca