Le maire Gérald Tremblay a dit hier que c'est seulement mardi qu'il a pris connaissance de l'existence d'un deuxième rapport du vérificateur général, qui donne des détails inédits sur les débats au sein de son administration portant sur la vente des terrains du Faubourg Contrecoeur à Construction Frank Catania et Associés, par le biais de la Société d'habitation et de développement de Montréal (SHDM).

Pourtant, le directeur général de la Ville, Claude Léger, le directeur des affaires corporatives, Robert Cassius de Linval, et d'autres hauts fonctionnaires ont ce rapport entre les mains depuis le 27 mars. Le rapport de 41 pages n'a pas été déposé au conseil municipal lundi soir. Il a été rendu public mercredi, à la demande pressante de La Presse.

Le rapport, intitulé «Ville de Montréal, Rapport de vérification, Projet Faubourg Contrecoeur», révèle entre autres choses que M. Léger s'est impliqué de façon très importante dans les transactions. La semaine dernière, questionné par La Presse, M. Léger avait admis qu'il en avait pris connaissance et qu'il avait même fait des commentaires à ce sujet au vérificateur général de la Ville de Montréal, Michel Doyon.

Mardi, lors de la conférence de presse de M. Doyon, La Presse a demandé à ce dernier pourquoi ce rapport n'avait pas été déposé au conseil municipal la veille. M. Doyon a répondu qu'il n'en avait pas vu la nécessité. Pressé de questions, il a accepté de le rendre public. Plus tard dans la journée, le greffier de la Ville lui a envoyé un courriel - obtenu par La Presse - où il se disait disposé à le distribuer parmi les conseillers municipaux.

Questionné à ce sujet hier, le maire a répondu : «J'ai appris comme vous qu'il y avait un autre rapport, quand une question a été posée au vérificateur général (mardi). Et le vérificateur général, tout à coup, en conférence de presse, il a dit : bien, dans le fond, il y a un autre rapport.» Il a aussi dit qu'il trouvait «totalement inacceptable» que le vérificateur général n'ait pas remis ce rapport au conseil municipal.

Le maire a ajouté qu'il avait toute confiance en Claude Léger et en Robert Cassius de Linval. Il a également soutenu que la Ville de Montréal avait réalisé une bonne transaction en vendant son terrain du Faubourg Contrecoeur, situé rue Sherbrooke à l'est de l'autoroute 25, à Construction Frank Catania et Associés par le biais de la SHDM.

La firme d'audit Deloitte, qui s'est elle aussi penchée sur cette vente, estime de son côté que la Ville a perdu environ 5 millions de dollars dans cette transaction. Mais le maire croit que la Ville et sa société, la SHDM, pourront récupérer les sommes qui leur sont dues, s'il appert que Catania leur doit ces sommes.

Le rapport «secret» du vérificateur général, finalement rendu public mercredi, rappelle que le responsable des transactions immobilières de la Ville, Joseph Farinacci, et d'autres fonctionnaires émettaient des doutes sur la «justesse» de la transaction. Mais ces contestations ont été mises de côté et le directeur général Claude Léger a pris les choses en main pour traiter directement avec la SHDM, ajoute M. Doyon.

En prenant connaissance du rapport, le chef de l'opposition à l'hôtel de ville, Benoit Labonté, a demandé la démission de M. Léger. Réagissant à cette demande, hier, le maire a déclaré : «Claude Léger a 30 ans d'expérience dans le monde municipal. Il n'a jamais été interpellé, alors quand on me pose la question si j'ai confiance en lui, oui, j'ai confiance en lui.»

Hier après-midi, M. Léger a envoyé une lettre aux médias, expliquant qu'il avait toujours agi avec des mandats du comité exécutif et du conseil municipal. Il affirme qu'il avait régulièrement suivi les recommandations de M. Farinacci. Questionné à ce sujet, hier, M. Farinacci a répété qu'il n'avait jamais recommandé que 14,7 millions de dollars soient déduits du prix de vente de 19,1 millions pour divers travaux, surtout la décontamination. Son désaccord avec M. Léger était tel qu'il a décidé de quitter son emploi.

Le dernier rapport du vérificateur général contient une autre révélation. Selon lui, la SHDM n'avait pas l'autorisation nécessaire pour conclure la vente du terrain. «Il aurait fallu que la SHDM demande et obtienne une autorisation spécifique de vendre (le terrain) qui aurait inclus tous les termes et conditions de la transaction, et (qui) aurait identifié l'acquéreur éventuel. Par la suite, il aurait été possible au comité exécutif d'autoriser formellement l'aliénation de cet actif.»