Le directeur du bureau de projet pour la reconstruction de l'échangeur Turcot, Marc-Alain Dubé, a annoncé hier, en pleine séance publique de consultations, que le Canadien National (CN) construira une nouvelle voie ferrée à travers la cour ferroviaire Turcot, malgré l'imminence des chantiers qui y sont prévus.

Cette voie ferrée, dont la construction commence dès lundi matin, selon M. Dubé, devra pourtant être déplacée au nord de la cour Turcot, d'ici un an, aux frais du ministère des Transports du Québec (MTQ), tel que prévu dans le projet de reconstruction de cet échangeur, situé dans le sud-ouest de Montréal.

M. Dubé a fait cette annonce, hier, au cours de la dernière séance de consultation du Bureau d'audiences publiques sur l'environnement (BAPE), qui a entendu cette semaine les opinions de plus de 90 groupes et organismes ou simples citoyens relativement au projet du MTQ.

Le MTQ projette de reconstruire les quatre échangeurs qui composent le complexe Turcot et qui relient les autoroutes A-15, A-20 et A-720, où transitent environ 290 000 véhicules par jour. Le chantier durerait sept ans.

La construction des remblais sur lesquels seront réaménagées près de la moitié des voies de circulation du nouvel échangeur obligera le MTQ à importer environ un million de mètres cubes de matériaux divers dans l'ancienne cour de triage Turcot. Située sous l'échangeur actuel, loin de toute zone habitée, la cour deviendra le point de convergence des milliers de camions qui feront la navette entre les dépôts de matériaux de remblais et les chantiers du nouvel échangeur.

En raison de l'importance stratégique de ce passage pour ses activités, le CN a toutefois obtenu du MTQ que les voies ferrées perdues dans la cour Turcot soient remplacées par un nouveau corridor ferroviaire de quatre voies ferrées qui sera aménagé au nord de la cour Turcot, près de la falaise Saint-Jacques, qui borde le secteur Notre-Dame-de-Grâce, dans l'ouest de Montréal.

«À notre avis, a ajouté le directeur du Bureau de projet du complexe Turcot, cela n'aura pas d'impact parce que nous avons l'espace pour aménager jusqu'à huit voies au nord, et pour nous cela sera simplement une voie de plus à déplacer lorsque nous ferons nos travaux.»

Coûts additionnels

La réponse de M. Dubé a fait réagir le professeur David Hanna, directeur des études avancées au Département d'études urbaines et touristiques de l'UQA, qui présentait un mémoire au BAPE peu après l'intervention de M. Dubé.

«Je suis ravi d'entendre que le CN se propose maintenant de confirmer sa voie ferrée de droite, à travers la cour Turcot, en y ajoutant une voie, et je suis en même temps estomaqué que M. Dubé nous dise que ce sera seulement une voie de plus à tasser», a déclaré M. Hanna.

«D'abord, a-t-il ajouté, ce manque de concertation entre les acteurs me surprend. Et, deuxièmement, comment peut-on dépenser l'argent de nos taxes pour construire des voies ferrées à un endroit, pour ensuite les tasser quelque temps plus tard?»

En première partie des audiences du BAPE, le 12 mai dernier, M. Dubé a affirmé que le coût du déplacement des voies ferrées «était estimé à 40 millions. Les derniers chiffres sont un peu plus élevés. La différence entre les 40 millions de l'estimation initiale et les coûts actuels, qui seront peut-être plus de l'ordre de 60, 70 millions, sera prise à même la réserve du projet».

Depuis jeudi après-midi, le MTQ sait que ce sera, finalement, cinq voies à déplacer vers le nord.

Cette voie a pour objectif, selon M. Dubé, « d'accommoder un certain nombre de trains additionnels pour la compagnie VIA Rail ». Elle sera construite parallèlement à une «voie d'urgence» du CN localisée juste au nord de l'emprise de l'autoroute 20, jusqu'à Sainte-Anne-de-Bellevue, dans la pointe ouest de l'île de Montréal.

Un porte-parole du MTQ, Réal Grégoire, a précisé hier à La Presse que M. Dubé avait fait cette annonce «pour être sûr qu'il n'y ait pas de malentendu, et que quelqu'un, lundi matin, pense que le MTQ a débuté les travaux de reconstruction de Turcot. Ce sont des travaux réalisés par le CN».

La Presse n'a pu joindre aucun représentant du CN, hier après-midi.

La présidente du Conseil du Trésor, Monique Gagnon-Tremblay, a révélé à La Presse, jeudi, que les coûts de 1,5 milliard prévus à l'origine pour le projet Turcot pourraient s'élever jusqu'à 2,5 milliards, d'ici à 2016.