«L'arrondissement a épuisé toutes ses réserves afin de maintenir ses activités opérationnelles et services à la population. Par ailleurs, la situation budgétaire de l'exercice 2009 est très précaire.»

La déclaration est issue d'un document officiel de l'arrondissement du Plateau-Mont-Royal, rendu public hier, et qui contredit les dénégations de la mairesse du Plateau-Mont-Royal, Helen Fotopulos, qui a contesté, toute la journée d'hier, notamment dans les médias, le titre d'un article publié, hier, dans La Presse, «Le Plateau Mont-Royal au bord de la faillite».

 

La mairesse a tout de même admis avoir écrit une lettre au maire de Montréal, Gérald Tremblay, le 17 mars dernier, dans laquelle elle évoque une situation de «faillite imminente» de son arrondissement. La lettre est très dure vis-à-vis de l'administration Tremblay, accusée de ne pas être parvenue ces dernières années à résoudre la question d'un financement juste et équitable des arrondissements montréalais.

Mais la mairesse prétend que la situation a évolué depuis mars. Or, la dette est toujours la même, nous a dit l'administration du Plateau, soit 4,1 millions. De plus, chaque document officiel qui accompagnait, hier soir, la remise d'une subvention, lors du conseil d'arrondissement, contenait un avertissement de l'administration:

«L'arrondissement a accumulé, à la fin de l'exercice financier 2008, un déficit de 4 116 000$ qui est composé temporairement par des prêts de la ville centre à être remboursés, soit par un plan déposé et approuvé par la ville lors de la préparation budgétaire 2010 ou ultimement en se conformant à l'article 144.2 de la charte de la ville de Montréal concernant les dispositions financières et fiscales spéciales.»

L'article 144.2 prévoit la possibilité pour l'arrondissement d'adopter une taxe spéciale.

Plus de réserves

L'administration poursuit dans ce document avec: «L'arrondissement a épuisé toutes ses réserves afin de maintenir ses activités opérationnelles et services à la population. Par ailleurs, la situation budgétaire de l'exercice 2009 est très précaire. L'arrondissement a participé, comme toutes les unités d'affaires de la Ville, au plan de redressement visant à contrer les effets de la crise économique et financière. Une somme de 1,2 million a été retranchée de sa dotation.»

Hier soir, la mairesse a critiqué La Presse en disant qu'il était «faux» de prétendre que l'arrondissement avait adopté «des compressions importantes qui touchent les services donnés aux 100 000 résidants du quartier».

Or, le texte de l'administration contredit la mairesse sur les compressions réalisées sous sa direction. «L'arrondissement a dû réduire son personnel et imposer des contraintes dans les autres familles de dépenses, dont la presque totalité des budgets requis pour l'expertise externe. Considérant ces éléments, on ne peut assurer que l'équilibre budgétaire sera maintenu d'ici la fin de l'exercice financier 2009.»

Helen Fotopulos a tout de même reconnu, hier, du bout des lèvres la gravité de la situation financière en disant à un citoyen que «c'est le devoir de nos services de nous rappeler que la situation n'est pas réglée».

D'ailleurs, les coupes aux patinoires, aux bibliothèques et aux éco-quartiers, que l'administration Fotopulos avait envisagées en mars, ne sont gelées que parce que la ville centre a permis de reporter le remboursement de la dette.

«C'est inacceptable d'y avoir quand même pensé», a lancé à la mairesse Josée Duplessis, conseillère du Plateau qui a quitté le parti du maire Tremblay pour se joindre à Projet Montréal.

L'administration Tremblay a refusé la demande de Mme Fotopulos de «dispenser l'arrondissement du remboursement de sa dette».

Mme Fotopulos a dit, hier, que l'arrondissement «écarte l'imposition d'une taxe spéciale en 2010» et ne prévoit pas de déficit supplémentaire en 2009.

Critiques de Labonté

Hier, le chef de l'opposition officielle, Benoit Labonté, a critiqué la façon dont Mme Fotopulos a réagi à la nouvelle de La Presse en ironisant: «Elle a tellement bien géré son arrondissement qu'on l'a envoyée ailleurs faire la même chose.»

M. Labonté ajoute qu'il ne comprend pas comment le conseiller Michel Labrecque peut estimer que le déficit 2008 de 4,1 millions n'est pas inquiétant. «Moi, ça m'inquièterait, dit-il. C'est près de 10% de son budget. Il ne faut pas avoir de lunettes roses.»

Quant à la suggestion de M. Labrecque de résoudre la crise financière du Plateau par des accords de services avec d'autres arrondissements, Benoit Labonté n'y croit pas. «Les ententes inter-arrondissements, ça ne tient pas debout. C'est l'équivalent d'ententes intermunicipales. Donc, on ajoute un autre niveau d'administration. Ça n'a aucun sens. C'est là qu'on voit que ça ne marche pas avec cette administration.»

Selon Anie Samson, mairesse de Villeray-Saint-Michel-Parc Extension, le défaut de Mme Fotopulos est d'avoir mal utilisé les fonds dont elle disposait dans l'arrondissement du Plateau. «Regardez son budget participatif, combien ça coûte de l'organiser? Moi, je voudrais bien implanter ça dans mon arrondissement, mais ça coûte trop cher.»

Un citoyen du Mile End, Alain Tremblay, a dit à La Presse, hier, que les travaux que l'arrondissement est en train de réaliser rue Saint-Viateur à l'est de Saint-Laurent sont inutiles. «Ce bout de rue est en train de subir un facelift dispendieux qui n'était pas vraiment nécessaire, dit-il. Les trottoirs et la rue étaient en bon état. Il n'y a pas de commerces ici. Bref, c'était tranquille. Tous les résidents sont d'accord pour dire que c'est un vrai gaspillage! Il n'y avait aucun besoin de faire ça.»

En même temps, les résidants habitant près du parc Laurier attendent toujours que l'on répare... les lampadaires du parc. Depuis des mois, les cyclistes traversent le parc et les enfants y jouent dans la pénombre. Peu agréable et peu sécuritaire. «On nous dit que ça coûterait 400 000$ pour remettre la lumière et qu'on n'a pas l'argent», dit Josée Duplessis.

Mme Fotopulos est même contestée au sein de son parti, a constaté La Presse, hier.

«Madame Fotopulos a été critiquée autant que la mairesse d'Ahuntsic-Cartierville, Marie-Andrée Beaudoin, dit un élu d'Union Montréal, sous le couvert de l'anonymat. Mais pour être honnête, il faut dire qu'à Montréal, on n'est même pas capable d'avoir les mêmes leviers fiscaux que Toronto. Le gouvernement Charest se traîne les bottines...»