Une polémique linguistique secoue Westmount depuis une semaine. Un journal de quartier a révélé qu'une succursale locale de la Société des alcools du Québec (SAQ) refuse de distribuer des journaux anglophones dans ses présentoirs.

L'affaire a commencé au début du mois de mars, lorsque le distributeur de l'hebdo Westmount Independent a constaté que les exemplaires qu'il déposait dans l'entrée de la succursale SAQ allaient directement à la poubelle.

 

Intrigué, un journaliste du Westmount Independent a questionné la directrice de la succursale, Maryse Lavallée, qui est en poste depuis un mois seulement. Elle lui a répondu que, à sa connaissance, la SAQ n'acceptait pas de distribuer les journaux anglophones dans ses succursales (la SAQ a par la suite nié cette information).

Le journaliste a alors demandé à Mme Lavallée pourquoi l'hebdomadaire concurrent, The Westmount Examiner, se trouvait dans un présentoir. «Il ne devrait pas y être», lui a-t-elle répondu.

Maryse Lavallée, qui travaille à la SAQ depuis 10 ans, a été candidate du Bloc québécois dans Mont-Royal aux élections fédérales de 2008, a appris La Presse. Elle est également la petite-fille de Carole Lavallée, députée bloquiste dans Saint-Bruno-Saint-Hubert.

Nouvelle politique

Interviewée hier, Maryse Lavallée a plutôt expliqué que, à son arrivée en poste, elle avait décidé de «faire le ménage» dans le vestibule de la succursale, qui était encombré par toutes sortes de journaux.

Depuis le mois de décembre, a-t-elle dit, la SAQ a une nouvelle politique qui vise à limiter le nombre de publications externes distribuées dans ses magasins. Le directeur de chaque succursale doit sélectionner un seul journal «représentatif de la population» - francophone ou anglophone.

«En attendant d'arrêter mon choix, j'ai pris la décision de jeter tous les journaux externes, anglophones et francophones, a expliqué Maryse Lavallée. Ça n'a rien à voir avec la langue ou avec mes convictions politiques.»

La responsable des relations de presse de la SAQ, Linda Bouchard, corrobore les propos de Mme Lavallée. «Il n'y a pas de discrimination, a-t-elle dit. D'ailleurs, les publications internes, comme la circulaire et le Tchin Tchin, sont offertes dans les deux langues à la succursale de Westmount.»

Cette explication ne semble pas convaincre Michael Doucet, distributeur du Westmount Independent. Il y a environ trois semaines, il a tenté de déposer une liasse de journaux à l'entrée de la SAQ de Westmount, située à l'angle de la rue Sherbrooke Ouest et de l'avenue Victoria.

«Une employée m'a demandé si les journaux étaient en anglais, a-t-il relaté. Quand je lui ai dit que c'était le cas, elle m'a dit qu'elle n'en voulait pas.» Selon M. Doucet, il y avait des exemplaires du journal francophone 24h dans le présentoir ce jour-là.

Cette affaire a provoqué de vives réactions à Westmount, où les trois quarts des résidants sont anglophones.

«C'est un affront aux anglophones et à la liberté de presse», a déclaré Marc Felgar, homme d'affaires de Westmount, qui a porté plainte à la SAQ et envoyé une lettre à plusieurs médias.

M. Felgar n'était «pas surpris» d'apprendre que Maryse Lavallée avait défendu les couleurs du Bloc par le passé. «Tout s'explique, maintenant...» a-t-il dit.