Après trois ans d'études avec l'Agence métropolitaine de transport, Aéroports de Montréal (ADM) s'est publiquement distancié de son partenaire provincial, mardi, en présentant son propre projet d'aérotrain de 600 millions, entre le centre-ville de Montréal et l'aéroport Trudeau, à Dorval.

À l'occasion d'un forum public organisé par la chambre de commerce du Montréal Métropolitain, le président d'ADM, James Cherry, a rendu publiques les grandes lignes de ce projet de navette aéroportuaire qui s'arrêterait à la Gare centrale de Montréal, en suivant un couloir ferroviaire séparé des trains de banlieue de l'AMT.

 

En soulignant les nombreuses différences de service entre des trains de banlieue, qui font de multiples arrêts, et une navette aéroportuaire express vers le centre-ville, qui doit en faire le moins possible, M.Cherry a estimé qu'«il n'y a aucun avantage» pour ADM d'emprunter les mêmes voies ferrées que les trains de banlieue de Dorion-Rigaud, sur une partie du trajet de Dorval au centre-ville.

Le président d'ADM a toutefois insisté sur le fait que le désaccord le plus profond entre l'AMT et ADM «n'est pas entre les couloirs du CN et du CP, mais bien entre la Gare centrale et la gare Lucien-L'Allier».

«Le choix est facile»

«Pour nous, le choix est facile, a déclaré M.Cherry. La Gare centrale est la seule véritable gare ferroviaire dans le centre-ville. Comme son nom l'indique, la Gare centrale est «centrale». Le centre des affaires s'est formé autour de la Gare centrale. Et contrairement à de plus grandes villes, Montréal a l'avantage de comporter un seul centre des affaires et de congrès.»

En présentant le projet d'aérotrain devant un parterre de gens d'affaires, le président d'ADM a ainsi devancé les conclusions des dernières études réalisées en collaboration avec l'AMT, qui portaient notamment sur le tracé de cette future navette ferroviaire entre Dorval et le centre-ville.

Un tracé, que privilégie l'AMT, prévoit que la navette aéroportuaire suive le même couloir que les trains de banlieue de la ligne Dorion-Rigaud, entre Dorval et le centre-ville, pour s'arrêter à la gare Lucien-L'Allier, voisine du Centre Bell et située dans la partie sud du centre-ville.

Le président de l'AMT, Joël Gauthier, qui a assisté à la présentation de ce projet de 600 millions, s'est dit «surpris» de la sortie publique de son partenaire, à ce stade d'avancement du projet.

«Si nous avions su dès 2006-2007 que pour ADM, c'était la Gare centrale ou rien d'autre, nous n'aurions pas engagé six organismes à travailler pendant trois ans dans un comité directeur, et nous n'aurions pas dépensé près de 2 millions en études pour étudier d'autres tracés», a déclaré M.Gauthier, hier, en réaction à la sortie de M.Cherry.

Étude comparative

Hier, le journal The Gazette a publié les résultats d'une étude comparative des deux tracés, qu'a réalisée PricewaterhouseCoopers à la demande de l'AMT et d'ADM, dont les conclusions seraient plutôt favorables au tracé que privilégie l'AMT vers la gare Lucien-L'Allier. Le rapport final des consultants a été présenté vendredi dernier à ADM et à l'AMT, ainsi qu'aux ministères des Transports du Québec et du Canada, à la Ville de Montréal et à VIA Rail, qui utilise les mêmes couloirs ferroviaires.

Selon cette étude, le scénario que privilégie ADM, qui emprunterait la voie ferrée actuelle du CP de Dorval jusqu'à la hauteur de l'autoroute 13, pour suivre ensuite le couloir ferroviaire du CN jusqu'à la Gare centrale, coûtera environ 1,1 milliard à réaliser. L'autre tracé, qui prévoit l'utilisation exclusive du couloir CP par les trains de banlieue et la navette jusqu'à la gare Lucien-L'Allier, est estimé à 786 millions. C'est 314 millions de moins que le projet que préfère ADM.

«Ces chiffres sont trompeurs, a toutefois souligné hier la vice-présidente des affaires publiques d'ADM, Christiane Beaulieu, en entrevue avec La Presse. Ils ne tiennent pas compte du projet de gare intermodale de plus de 300 millions que l'AMT va devoir réaliser, avec des fonds publics, pour que la navette puisse se rendre jusqu'à Lucien-L'Allier. La capacité de cette gare est insuffisante pour les besoins de la navette aéroportuaire actuellement.»

Le président de l'AMT, Joël Gauthier, a reconnu que la gare actuelle serait complètement transformée pour faire place à la navette de Dorval. Mais les coûts additionnels s'élèveraient à 260 millions, a-t-il indiqué.

Au total, le scénario que privilégie l'AMT coûterait donc environ 54 millions de moins que le tracé favorise Aéroports de Montréal.