Jusqu'à la mi-août, Montréal verra défiler festivaliers, danseurs insatiables et chars allégoriques pour le festival de culture gaie Divers/Cité (du 26 juillet au 1er août) et les festivités entourant le défilé des Célébrations de la fierté (du 11 au 15 août). Fini le temps des disputes: l'entente cordiale règne désormais entre ces deux manifestations, vitrines du tourisme gai à Montréal.

«C'est du passé!» Bernard Plante, directeur général de la Société de développement commercial du village (SDC), balaie ainsi les questions sur les tensions entre Divers/Cité et les Célébrations de la fierté qui, il y a trois ans, avaient accompagné la décision de Divers/Cité de ne plus organiser le défilé de la fierté gaie. «Certains ont trouvé cette séparation très dure. C'est un peu comme s'il y avait eu un accouchement dans la douleur mais maintenant, le bébé est joufflu et se porte très bien», assure M. Plante.

Du côté des organisateurs des deux manifestations, on se dit complémentaires plutôt que rivaux et on estime même attirer plus de touristes pendant l'été. La piétonnisation de la rue Sainte-Catherine Est (on est passé de quelques jours en 2006 à quatre mois en 2010) suscite elle aussi l'adhésion des festivaliers. «Pour l'offre touristique, c'est très intéressant», se félicite M. Plante.

Tourisme Montréal prête en effet une attention toute particulière au tourisme gai. Bon an, mal an, 6% des visiteurs de Montréal sont gais. Cette clientèle dépense plus que les touristes hétérosexuels: l'argent rose représente 10% des revenus que génère le tourisme à Montréal, soit 200 millions par année.

«Ce n'est pas négligeable comme impact, croit Pierre Bellerose, vice-président des relations publiques de Tourisme Montréal. Les gais en voyage sont plus résistants à la récession. Montréal a subi une importante chute du tourisme en 2009, mais le nombre de touristes gais diminue moins.»

Au début des années 90, Montréal a été l'une des premières villes de l'Amérique du Nord à viser la clientèle gaie. L'exemple montréalais a depuis fait des petits, notamment au Canada, puisque Toronto, mais aussi Winnipeg, Halifax et Calgary ont adopté des stratégies similaires.

«Beaucoup de villes veulent recevoir ces gens-là. Cela fait en sorte que la compétition est plus forte, parce que les touristes gais et lesbiens voyagent plus, dans des destinations plus branchées», explique Tanya Churchmuch, gestionnaire spécialiste du marché gai et lesbien pour Tourisme Montréal.

La Ville reine joue maintenant le grand jeu pour plaire à la clientèle gaie, canadienne comme américaine. Environ 1,2 million de personnes ont assisté à la dernière Toronto Pride, qui a coïncidé cette année avec la fête de l'indépendance des États-Unis. Les retombées économiques sont évaluées à 136 millions: une mise en bouche pour Toronto qui sera l'hôte, en 2014, de la World Pride.

Pour autant, les organisateurs des Célébrations de la fierté de Montréal et de la Pride Week de Toronto ne se considèrent pas en compétition, et se font mutuellement de la publicité. La directrice de Divers/Cité, Suzanne Girard, affirme qu'il n'y a pas de rivalité. «Au contraire, l'union fait la force», croit-elle.