La réfection de l'échangeur Turcot débutera plus tard et coûtera plus cher, mais le dernier projet du ministère des Transports réduira de beaucoup le nombre des expropriations prévues initialement.

Forcé il y a un an de retourner à sa table à dessin par le Bureau d'audiences publiques sur l'environnement, Québec va rendre public, mardi prochain, un nouveau projet qui tiendra compte des recommandations du BAPE. Sans surprise, les coûts augmentent encore: au printemps dernier, on les évaluait à 2,5 milliards; ils atteignent désormais 3 milliards. Les chiffres ont carrément doublé depuis un an.

Les travaux, qui ne pourront débuter avant l'an prochain, devraient être terminés en 2017-2018, explique-t-on à Québec. Le processus d'appel d'offres sera confié à Infrastructure Québec (l'ancienne Agence des partenariats public-privé), et la firme retenue devra faire les travaux clés en main, sans possibilité de modifications ni de hausse de prix.

Sans surprise non plus, Québec enterre officiellement le projet soumis par l'administration de Gérald Tremblay, qui proposait de remplacer les «spaghettis» de béton désuets par un «tire-bouchon» hors de prix - proche des 6 milliards, selon les prévisions du MTQ. Déjà, au printemps dernier, la ministre Julie Boulet n'avait pas caché que le projet de Montréal était irrecevable.

Les travaux prévus par Québec pourront se faire sans que l'échangeur soit fermé à la circulation grâce à des voies de contournement. Le «tire-bouchon» que proposait Montréal supposait la fermeture de l'échangeur pendant toute la durée des travaux, soit six ou sept ans.

La structure en hauteur proposée par la Ville était moins étendue et, par conséquent, limitait les expropriations. Le projet de Québec, à l'origine, se faisait presque totalement avec des bretelles construites sur remblai. Sa nouvelle mouture prévoit 40% de structures en hauteur afin de réduire l'impact sur la population du secteur.

Conséquence directe, les expropriations - 160 logements étaient visés à l'origine - seront réduites. On ne touchera pas aux maisons de la rue Cazelais. L'une d'elles est inoccupée; le gouvernement en fera l'acquisition.

En revanche, l'ancienne usine du 780, rue Saint-Rémi, devenue le symbole de la résistance des Montréalais du secteur, devra être expropriée, mais en partie seulement, a-t-on appris. Plusieurs artistes vivent dans cet immeuble, qui compte une centaine d'appartements.

Selon nos sources, le ministre des Transports, Sam Hamad, a récemment eu une rencontre avec le maire de Montréal, Gérald Tremblay, dont il est ressorti que la Ville ne s'acharnera pas pour livrer bataille dans le dossier de l'échangeur.

Surtout, à Québec comme à Montréal, tout le monde s'entend sur une chose: l'échangeur Turcot est au bout de sa vie utile, et il faut procéder à sa réfection «le plus vite possible». Déjà, rien que pour la surveillance permanente de la structure, où passent 280 000 véhicules par jour, le gouvernement paie 10 millions par année à trois firmes de génie.

Montréal préférera mettre l'accent sur d'autres enjeux comme la rue Notre-Dame, le train de l'Est et la réfection du boulevard Pie-IX, qui ne saurait souffrir de retard.

Autre changement pour satisfaire le BAPE et la Ville de Montréal, le MTQ prévoit une voie réservée aux autobus dans tout le circuit est-ouest, ce qui n'existait pas à l'origine. Québec promet aussi de s'occuper de l'aménagement autour de son projet - bien des terrains, la gare Turcot par exemple, doivent être décontaminés avant d'être utilisés. Aussi on promettra mardi de tenir compte de l'esthétique urbaine dans cette construction.