Devant les inquiétudes exprimées par les commerçants, le maire Gérald Tremblay fait marche arrière et annule le transfert de la responsabilité des parcomètres aux arrondissements.

Cette volte-face a été qualifiée d'«odieuse» quelques minutes plus tard par le maire de l'arrondissement du Plateau-Mont-Royal, Luc Ferrandez, et le chef de Projet Montréal, Richard Bergeron. Pris dans un tourbillon de déclarations contradictoires, les principaux intéressés, les commerçants du centre-ville, se sont déclarés tour à tour soulagés... puis inquiets.

La décision de transférer la gestion des parcomètres sur les voies artérielles aux arrondissements avait été annoncée fin septembre par une lettre administrative envoyée à tous les directeurs. Elle avait été applaudie par l'administration du Plateau-Mont-Royal, qui y avait vu l'occasion d'augmenter ses revenus de plus de cinq millions. Les diverses mesures annoncées - ajout de 600 parcomètres et hausse de la tarification à 3$ l'heure - ont cependant suscité la grogne des commerçants.

Cet après-midi, le maire Gérald Tremblay a assuré avoir pris bonne note de ces inquiétudes. «Notre administration n'avait jamais pris de décision formelle à cet égard, l'annonce était prématurée, a-t-il précisé. L'idée reposait sur un consensus qui ne semble plus exister. Le dossier de la gestion des parcomètres mérite une réflexion plus en profondeur.»

Même s'il maintient qu'un tel transfert est souhaitable, le maire estime qu'un «encadrement» est nécessaire. «L'orientation est là. Ma responsabilité, c'est qu'on ait une cohérence. Je ne veux pas d'anarchie.» Il assure que sa sortie n'a «rien à voir avec la partisannerie politique». Il s'est montré ouvert à discuter avec les arrondissements, et particulièrement celui du Plateau Mont-Royal, pour hausser jusqu'à 3$ l'heure les tarifs des parcomètres sur les artères principales. Quant aux parcomètres sur les rues locales, elles sont déjà sous la responsabilité des arrondissements, qui doivent cependant reverser une partie variable de leurs revenus aux autres arrondissements de l'ex-Ville de Montréal.

Un «junior» qui apprend

Pour le Plateau-Mont-Royal, il s'agirait d'une perte de quelque 2,5 millions, a affirmé le maire d'arrondissement Luc Ferrandez. «C'est une grosse déception. Nous avions inclus cette somme dans notre budget, nous allons devoir le refaire. Nous avons un gros problème de stationnement, il devrait le comprendre.»

M. Ferrandez et son chef, Richard Bergeron, estiment avoir été victimes de leur franchise. «On a joué franc-jeu, explique M. Bergeron. Il y a eu une campagne de désinformation, qui a embrouillé l'esprit de tout le monde.» Quels sont les nouveaux projets de l'arrondissement pour trouver les revenus qu'il estime nécessaires? Le maire Ferrandez s'est montré évasif. «Je suis un junior en politique, là j'ai appris. Je vais attendre, je vais me taire, et quand plus personne ne pourra reculer, je vais agir.»

Commerçants perplexes

La sortie du maire Tremblay a toutefois laissé les commerçants sur leur faim. En point de presse, les porte-parole des Sociétés de développement commercial de l'avenue du Mont-Royal, de la rue Saint-Denis et du boulevard Saint-Laurent se sont d'abord dits «assez heureux» d'apprendre l'annulation du transfert des parcomètres. C'est le maire Tremblay lui-même qui leur a appris la nouvelle au téléphone vers midi. Ils ont rapidement déchanté quand ils ont écouté la conférence de presse deux heures plus tard.

«On est très inquiets parce qu'il a continué de parler des parcomètres à 3$, de décentralisation et de nouveaux parcomètres sur les rues résidentielles, a expliqué Michel Depatie, porte-parole du l'association qui regroupe quelque 1400 commerçants. On s'est aperçu que M. Tremblay souhaitait toujours le transfert.»

Preuve de leur perplexité, la manifestation des commerçants prévue en début de soirée devant l'hôtel de ville a été maintenue.

Les commerçants du centre-ville «saignent, leur clients s'en vont déjà ailleurs», dénonce Gordon Bernstein, président de SDC du boulevard Saint-Laurent.

Le fait que le maire de l'arrondissement annonce qu'il maintiendra intégralement son fameux plan de stationnement n'a guère rassuré les porte-parole. «Il n'y a eu aucune consultation, on pense que c'est anti-démocratique, a déclaré M. Depatie. On ne veut pas de hausse, par de parcojour, pas de parcomètres jusqu'à 1h du matin sur la rue Saint-Laurent.»