Avec une hausse d'au moins 5% du fardeau des contribuables, le budget que Montréal présentera demain ne répondra clairement pas à «l'attente des contribuables», a reconnu hier le maire Gérald Tremblay.

Lors d'une conférence dans le Quartier international, où il annonçait la création d'une grappe financière montréalaise, il a désigné le principal coupable de cette hausse: le déficit actuariel de la caisse de retraite des employés.

«N'eût été le déficit de 150 millions dans notre caisse de retraite, on aurait un budget à (la mesure de) l'attente des contribuables», a lancé le maire. En privé quelques minutes plus tard, il a quelque peu atténué ses propos. «C'est évident que le contribuable aimerait avoir le plus de services possible et payer le moins possible. Chaque fois qu'on parle d'une augmentation du fardeau fiscal, il aimerait mieux ne pas l'avoir. C'est dans ce sens-là que je faisais cette allusion.»

Montréal présentera demain matin un «bon budget dans un contexte économique qui n'est pas facile», a soutenu le maire. La Ville affirme être aux prises avec un trou budgétaire de 400 millions pour 2011, qu'elle a comblé essentiellement par des mesures d'austérité. On sait depuis le printemps dernier que la hausse globale de l'impôt foncier sera calquée sur l'inflation, que l'administration Tremblay a généreusement établie à 2,5% en 2011. Selon les dernières projections de la Banque du Canada, datées du mois d'octobre dernier, l'indice global des prix à la consommation devrait plutôt s'établir entre 1,8 et 2,2% l'an prochain.

La limitation à 2,5% de la hausse de l'impôt foncier est cependant bien hypothétique: des dizaines de milliers de propriétaires montréalais devront en fait absorber une hausse supérieure. Il s'agit essentiellement de ceux qui ont vu la valeur foncière de leur maison augmenter de plus de 23,5%, la hausse moyenne du rôle entre 2007 et 2010. Des arrondissements comme le Plateau-Mont-Royal (+34,7%), le Sud-Ouest (+30,6%) et Rosemont-La Petite-Patrie (+28,4%) seront particulièrement touchés.

Huit années d'«incurie»

«C'est terrible, a tranché Peter McQueen, conseiller municipal de Projet Montréal. Je pense que ça peut amener une révolte des contribuables, comme à Toronto.»

Le prochain budget est le résultat de huit années d'incurie de l'administration Tremblay, estime le conseiller de Notre-Dame-de-Grâce. «Ils n'ont rien fait pour faire attention aux dépenses, ils n'ont pas trouvé de nouvelles sources de revenus.»

Depuis sa création, Projet Montréal milite en faveur de l'instauration de péages à l'entrée de Montréal qui permettraient de récolter près de 300 millions par année. «Les Montréalais s'en aperçoivent, ils paient le prix des hésitations de l'administration Tremblay en subissant des hausses d'impôts fonciers. Il faut foncer, au contraire: il faut que les banlieusards paient quand ils viennent à Montréal.»

À ces impôts fonciers généraux, il faudra également ajouter les taxes spéciales que les arrondissements ont le droit de lever. Plateau-Mont-Royal pourrait devenir en 2011 le premier arrondissement de l'ex-Montréal à profiter de cette possibilité, comme huit ex-villes de banlieue l'ont fait l'an dernier.

CAM à la hausse

Outre l'impôt foncier, le budget 2011 réservera quelques mauvaises surprises aux Montréalais. Comme l'a révélé Radio-Canada la semaine dernière, citant des chiffres qui n'ont pas été contestés hier à l'hôtel de ville, les usagers de la Société de transport de Montréal subiront une hausse de tarifs de 4%.

«Si ce chiffre se confirme, c'est déplorable et inacceptable», dit Louise Harel, chef de Vision Montréal. Elle rappelle que, en huit ans, l'abonnement mensuel à la STM (la CAM) a augmenté de 40% tandis que l'inflation a crû de 13,4%.

Estimant que la facture sera «salée»pour les contribuables en 2011, elle déplore qu'on n'ait pas réellement éliminé les dédoublements. «On dirait une confédération d'arrondissements, pas une grande ville où les ressources centrales sont utilisées au mieux.»

La taxe du fonds de l'eau et d'infrastructures sera par ailleurs haussée de 1,5% pour l'ensemble des contribuables. Si Québec donne son aval, une nouvelle taxe sur l'immatriculation d'un maximum de 45$ sera imposée aux automobilistes de l'île de Montréal. Ces revenus, évalués à 30 millions, iront directement dans les coffres de la STM. Cette nouvelle possibilité de financement a été accordée à Montréal en juin 2008, par l'adoption de la loi 22.

Celle-ci permettrait également de percevoir des taxes sur les terrains de stationnement et d'augmenter les droits de mutation immobilière. En fait, Montréal peut imposer à sa guise toute forme de taxe directe, sauf dans 13 domaines déjà imposés par Québec, comme les revenus, la fortune, les ressources naturelles ou les boissons alcooliques.

Rien n'indique cependant que l'administration Tremblay compte exploiter de nouveaux champs de taxation pour 2011.