Le recours à l'aide sociale est en recul à Montréal. Mais moins qu'ailleurs au Québec et, surtout, moins que dans la capitale. Une autre comparaison entre les deux villes susceptible de faire rougir les Montréalais.

Selon les plus récentes statistiques du ministère de l'Emploi, que La Presse a obtenues en vertu de la Loi sur l'accès à l'information, le nombre des prestataires de l'aide sociale a diminué de 19% en 10 ans dans l'île de Montréal. De 212 000 prestataires au printemps 2000, on en comptait 177 500 au printemps 2010, un recul net des bénéficiaires de l'aide de dernier recours.

Durant la même période, toutefois, dans l'ensemble du Québec, le nombre des prestataires de l'aide sociale a diminué plus rapidement; ils étaient 618 000 il y a 10 ans comparativement à 498 000 le printemps dernier, une chute de 24%.

Le résultat à Montréal est encore plus faible quand on observe les données sur la ville de Québec. La capitale a affiché, il y a quelques jours, un taux de chômage record de 4,4% de sans-emploi, le plus faible du Canada. En 10 ans, le nombre d'assistés sociaux à Québec a plongé de 63%, un bond spectaculaire de 49 000 à 30 000.

Pour les fonctionnaires du ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale, la réduction moins rapide du nombre de prestataires dans l'île de Montréal s'explique en partie par le tissu social. On trouve plus d'itinérance dans la métropole qu'ailleurs, une situation propre aux grandes villes. Il y a un problème chronique de concentration de cas plus lourds à Montréal. D'autres facteurs jouent également un rôle. Par exemple, Montréal a un important bassin d'autochtones qui sont aux prises avec des problèmes particuliers de violence conjugale et de toxicomanie, expliquent les fonctionnaires.

Le problème de Montréal se manifeste aussi quand on examine le niveau des prestations aux bénéficiaires de l'aide sociale. On versait 909 millions d'aide sociale dans l'île il y a 10 ans, on en distribue aujourd'hui 966 millions, en dépit d'une baisse du nombre de prestataires. On pourrait croire que l'indexation des prestations a joué pour beaucoup, mais c'est une erreur bien évidente quand on scrute plus attentivement les chiffres. En 2006-2007, les prestations atteignaient 922 millions, 3 millions de plus l'année suivante et encore 10 millions de plus en 2008-2009. Pour la dernière année, les versements sont passés subitement de 935 à 966 millions.

Cette hausse subite est liée au profil des bénéficiaires de l'aide de dernier recours, explique-t-on au Ministère. L'augmentation est générée par le passage de bénéficiaires aptes au statut de prestataires inaptes. Concrètement, beaucoup d'assistés sociaux ont passé le cap des 55 ans, ce qui leur procure une majoration de 120$ par mois. Les gens passent de l'aide sociale à la solidarité sociale, on leur reconnaît des contraintes sévères à l'emploi, liées à l'âge.

Le nombre de fausses déclarations ne change guère. Année après année, on compte 6300 cas, pour un total de 25 millions. Ici, les données pour Montréal remontent à 2006, année où la Ville a cessé d'administrer le programme pour le gouvernement du Québec.

Pour la ville de Québec, on ne dénote pas cette augmentation rapide des prestations dans la dernière année. On est passé de 234 millions il y a 10 ans à 199 millions pour 2009-2010. Au cours des quatre dernières années, on constate une diminution rapide et constante des prestations, ce qui porte à croire que l'effet de vieillissement des prestataires, similaire à celui constaté à Montréal, est largement compensé par la baisse importante du nombre de bénéficiaires.

- Avec la collaboration de William Leclerc