Pour éteindre le torchon qui brûle entre ses pompiers et elle, la Ville pige dans ses coffres. Montréal a autorisé des contrats de 2,3 millions de dollars avec des firmes d'avocats dans les trois dernières années afin qu'elles planchent sur des dossiers qui concernent les sapeurs.

Deux firmes se sont partagé la cagnotte. Montréal pourrait verser jusqu'à 1 820 000$ à Fasken Martineau et 475 000$ à Dunton Rainville, a appris La Presse.

Ces contrats ont été accordés alors que Montréal menait d'âpres négociations avec ses pompiers, dont la convention collective était échue depuis 2007. Ils réclamaient des augmentations de 3% en 2007, 3,5% en 2008 et 3,5% en 2009, alors que la Ville affirmait ne pouvoir se permettre de telles hausses. Un arbitre a finalement accordé des augmentations de 4% en trois ans.

Pour l'aider avec la cause en arbitrage, Montréal a eu recours à Fasken Martineau. La Ville a d'abord accordé une somme de 150 000$ à la firme en juillet 2007. Elle a par la suite été augmentée dans une série de décisions du comité exécutif. Le total a finalement atteint 1 820 000$ en août dernier.

L'argent versé à Dunton Rainville concerne plutôt quatre griefs opposant la Ville et ses pompiers. Pour l'aider dans ces dossiers, Montréal a mis 475000$ à la disposition de la firme entre mai 2008 et août 2009. À ce jour, la Ville a payé 440 000$, révèlent des documents obtenus grâce à la Loi d'accès à l'information.

Une convention collective coûteuse

La facture entourant le renouvellement de la convention collective des pompiers pourrait encore grimper. L'arbitre François Hamelin a rendu en mars un jugement sur les trois premières années de la convention de six ans.

Un deuxième arbitrage a lieu en ce moment pour les années 2010, 2011 et 2012.

Montréal dispose d'un service du contentieux. Pourquoi avoir recours à de coûteuses firmes externes? «Nous manquions de ressources. Mais l'été dernier, on a embauché un quatrième procureur au service du contentieux, a expliqué hier le directeur des relations professionnelles à la Ville de Montréal, Jean-Yves Hinse. Quand on regardait les sommes (payées en frais juridiques), ça devenait clair que ce serait plus rentable de le faire à l'interne. Ce sont des sommes considérables.»

Depuis cette embauche, les services de Fasken Martineau ont été réduits de moitié. Deux avocats de la firme ont travaillé lors de l'arbitrage concernant la première portion de la convention collective des pompiers. Pour la deuxième partie, Montréal n'en emploie qu'un seul: l'autre avocat provient du service du contentieux.

M. Hinse explique que des arbitrages de griefs sont fréquents à la Ville de Montréal, mais que des arbitrages concernant des conventions collectives sont beaucoup plus rares. Le dernier remontait à 1994. Pour régler la seule convention collective des pompiers, Montréal doit maintenant passer par deux arbitrages.

Mis au courant des sommes engagées en frais juridiques par la Ville, le président de l'Association des pompiers de Montréal n'a pas paru surpris. «C'est énorme! a dit Perry Bisson. En même temps, c'est une tendance qu'on constate depuis longtemps: la Ville judiciarise les relations de travail. L'équipe du capital humain devrait mettre ses efforts à trouver des solutions plutôt que de monter des dossiers juridiques.»

Le processus de médiation entre la Ville et ses pompiers commencera en janvier.

- Avec la collaboration de William Leclerc