Il faudra dorénavant parler de l'administration Tremblay-Applebaum.

Après avoir dirigé tout seul pendant un an et demi le comité exécutif de la Ville de Montréal, le maire Gérald Tremblay a passé le flambeau de la présidence hier à son fidèle lieutenant, Michael Applebaum. Comme à l'époque de Frank Zampino, le nouveau président a hérité de la responsabilité des finances, en plus de continuer de s'occuper d'urbanisme et des relations avec les arrondissements. «Je suis très fier et très honoré, a-t-il déclaré lors d'une conférence de presse à l'hôtel de ville. Il va y avoir des décisions courageuses et difficiles à prendre, notamment sur les régimes de retraite.»

Dans le cadre du remaniement annoncé à cette occasion, deux nouveaux venus font leur entrée au comité exécutif. Un ancien, Richard Deschamps, est promu vice-président et hérite des services aux citoyens. C'est lui qui deviendra une des figures les plus familières de l'administration, celui qui aura la tâche de convoquer régulièrement des conférences de presse sur le déneigement et la propreté.

Alan DeSousa, lui, perd la responsabilité des finances et conserve le dossier de l'environnement. Sa collègue Manon Barbe a également troqué le dossier du transport contre celui, moins prestigieux, des sports et loisirs. Ces décisions ne sont pas des «rétrogradations», a assuré avec vigueur le maire Tremblay, qui a présenté ces mandats comme «excessivement importants et exigeants». Manifestement serein, M. DeSousa s'est présenté comme un «frappeur désigné», un soldat loyal prêt à aller défendre tous les dossiers chauds que lui confie son patron. «Je vois ça comme une opportunité, je vais avoir du fun», a-t-il assuré.

On a de plus annoncé le départ de Monique Worth, ex-responsable des sports et loisirs et mairesse de Pierrefonds-Roxboro, «pour des raisons personnelles».

Expérience «non concluante»

Le maire Tremblay a présenté son nouveau comité exécutif comme marquant «la fin d'une période de transition» entamée avec sa réélection en novembre 2009. «J'avais pris l'engagement de m'assurer personnellement de la mise en place d'une nouvelle gouvernance; c'est fait, a déclaré le maire. Nous avons tenté sincèrement l'expérience de la cohabitation (avec l'opposition). Elle s'est révélée non concluante.»

Pendant 16 mois, le comité exécutif a en effet incorporé au moins un membre de l'opposition. Tour à tour, le chef de Projet Montréal, Richard Bergeron, puis la représentante de Vision Montréal, Lyn Thériault, en ont été expulsés. Dans le premier cas, on explique la décision par un manque de solidarité, dans l'autre, par une infraction à la loi électorale.

Les deux nouveaux venus au comité exécutif sont Gilles Deguire, maire de l'arrondissement de Montréal-Nord, et Jocelyn Ann Campbell, conseillère d'Ahuntsic-Cartierville. Ils héritent respectivement des dossiers de l'habitation (qui inclut la salubrité et la lutte contre les punaises de lit) et du développement social et communautaire. Le maire conserve quant à lui la responsabilité des affaires internationales et de la démocratie. Le nouveau comité exécutif compte quatre femmes et six hommes, par ailleurs aidés par huit conseillers associés.

Un politicien discret

Celui qui est devenu le numéro 2 de la Ville de Montréal, Michael Applebaum, est entré en politique d'une façon peu classique: il avait mobilisé sa communauté contre le projet du maire Jean Doré de fermer 29 patinoires. Il s'est présenté aux élections municipales en 1994 et a remporté un siège de conseiller. Il a obtenu un second mandat en 1999. Il est maire de l'arrondissement de Côte-des-Neiges-Notre-Dame-de-Grâce depuis 2001. Discret à l'endroit des médias, il s'est décrit en 2009 dans une publication de l'Ouest-de-l'Île comme un maire «homme de terrain» (hands on). Une courte biographie fournie par l'hôtel de ville le présente comme un «gestionnaire aguerri issu du monde des affaires» - il a notamment été courtier immobilier jusqu'en 2009.

Le remaniement du comité exécutif a été accueilli avec dérision par l'opposition officielle, qui l'a qualifié de «timide». «Les changements annoncés ne laissent entrevoir aucun élan ni ouverture vers des changements substantiels dont Montréal a grand besoin», a déclaré la chef de Vision Montréal, Louise Harel. Elle croit que le fait qu'Alan DeSousa, un comptable agréé, ait perdu le dossier des finances est un aveu d'échec «qui laisse penser qu'il s'est avéré incapable de procéder aux économies récurrentes» promises par le maire Tremblay.

Sur Twitter, le chef de Projet Montréal, Richard Bergeron, a résumé le remaniement de façon lapidaire: « (Aux finances), on passe d'un comptable agréé à un ex-agent d'immeubles.»