Une véritable tornade médiatique s'est abattue sur l'hôtel de ville de Montréal, hier, faisant une victime: le contrôleur général Pierre Reid, qui a été «relevé de ses fonctions».

La prochaine cible, le président du conseil municipal, Claude Dauphin, sera vraisemblablement suspendu temporairement aujourd'hui, au cours d'une assemblée extraordinaire convoquée pour l'occasion. Majoritaire au conseil, le parti de Gérald Tremblay, Union Montréal, devrait obtenir sa tête sans difficulté.

Le maire a fait ces annonces après avoir reconnu que M. Dauphin avait bel et bien fait l'objet d'une enquête administrative et vu ses courriels interceptés par le Service du contrôleur général, Pierre Reid, comme le révélait La Presse hier matin. Il a assuré n'avoir lui-même appris ces faits qu'hier matin. «Quand on brasse les choses, ça dérange, a déclaré le maire. L'enquête administrative a révélé des faits troublants. Ceux-ci ont été transmis à la police. Des courriels ont été ouverts.» Le maire n'a pas voulu détailler ce que l'enquête avait révélé, expliquant qu'il s'agissait d'un dossier «complexe» qui avait été confié à la Sûreté du Québec, il y a un peu plus d'un an, en mars 2010. La SQ a refusé d'infirmer ni de confirmer l'information.

Même s'il continue de défendre son haut fonctionnaire, au coeur de la tempête depuis deux mois, le maire Tremblay a annoncé sa mutation vers d'autres fonctions administratives - qui n'ont pas été indiquées. Il estime que M. Reid a agi «de bonne foi et au meilleur de ses connaissances» en enquêtant sur Claude Dauphin, qui est maire de l'arrondissement de Lachine. Par la suite, le contrôleur a eu des «discussions» avec les policiers et aurait décidé d'ouvrir les courriels de M. Dauphin. «Est-ce qu'il a eu à ce moment-là un mandat très clair du service de police? J'ai posé la question, a dit le maire. C'est flou, ce n'est pas clair.»

Pour «éviter les malentendus»

M. Tremblay, qui assure depuis deux mois que les élus ne sont pas la cible d'espionnage par des fonctionnaires, estime que ce nouvel aveu n'est pas contradictoire. Il répète que les élus ne peuvent être l'objet de surveillance par des fonctionnaires de la Ville. À une exception près. «Ce qu'on m'a dit, c'est que les courriels peuvent être ouverts dans le cadre d'une enquête policière ou à la demande d'autorités compétentes (le ministère des Affaires municipales).»

Le directeur général, Louis Roquet, a été mandaté pour «mettre en place un meilleur encadrement pour mieux définir comment faire les vérifications administratives qui impliquent des élus». En clair, on réclamera dorénavant une confirmation écrite des policiers ou du Ministère autorisant l'espionnage des courriels ou des conversations. «Pour éviter tout malentendu, dorénavant, je vais m'assurer que ça soit demandé par écrit, que ce soit un mandat très clair», a annoncé le maire.

Pour la cible de cette enquête, Claude Dauphin, les «faits troublants» dont on l'accuse ne sont qu'une diversion par rapport aux méthodes «inacceptables et illégales» dont il a été victime. Il a rencontré le maire hier matin, qui l'a informé des résultats de l'enquête et lui a demandé de démissionner de son poste de président du conseil. Il sera également expulsé du caucus d'Union Montréal, dont il est l'un des membres de la première heure. On l'accuse d'avoir utilisé un programme de subventions sur mesure pour une entreprise de son arrondissement, Mindev, dirigée par Frank Minicucci. «Sur la base d'un document que je n'ai pas vu, le maire me demande de démissionner, ce que je refuse de faire, a déclaré M. Dauphin en point de presse. Je n'ai rien à me reprocher. J'ai l'intime conviction que nous avons agi selon les règles. Je refuse de démissionner, ma réputation est en jeu.»

Union Montréal a déposé, hier après-midi, une motion- surprise réclamant le «retrait temporaire» du président du conseil, «jusqu'à ce que la lumière soit faite sur ces allégations», a expliqué le maire. Faute d'unanimité, les élus au pouvoir ont obtenu l'ajournement des travaux du conseil, une procédure rarissime, jusqu'à 15h aujourd'hui.

»Le Vaudeville», l'éditorial de François Cardinal, à lire en page A22

1981

Après des études en droit, Claude Dauphin est élu député de la circonscription de Marquette pour le Parti libéral du Québec, siège qu'il occupe jusqu'en 1993.

1993

Dauphin est nommé délégué du Québec en Nouvelle-Angleterre.

1995

Nommé président d'Option Canada. L'organisme, chargé de faire la promotion du fédéralisme à l'époque de la campagne référendaire, a englouti 4,8 millions.

1997 à 2001

Conseiller politique de Paul Martin, alors ministre des Finances à Ottawa.

2001

Élu conseiller municipal à la Ville de Montréal. Il est par la suite nommé membre du comité exécutif, responsable des Transports, président du conseil d'administration de la Société de transport de Montréal (STM) et devient membre du CA de l'Agence métropolitaine de transport.

2005

Élu maire de l'arrondissement de Lachine.

2008

Nommé président du comité exécutif de la Ville de Montréal et responsable des services administratifs, des affaires corporatives, du capital humain et des sociétés paramunicipales. Il conserve également la responsabilité de la sécurité publique et des relations intergouvernementales.

2009

Réélu maire de l'arrondissement de Lachine. Nommé président du conseil municipal.

Sources: Site web de la Ville de Montréal et archives de La Presse