Après avoir envisagé de retirer ses vélos des rues et de mettre un terme à ses activités, la firme qui gère BIXI a été sauvée in extremis par Montréal. Dans un vote majoritaire, le conseil municipal a entériné mardi un plan de sauvetage de 108 millions de dollars qui permettra aux vélos en libre-service de continuer de rouler.

L'opposition a dénoncé «ce chèque en blanc» de la Ville à la Société de vélo en libre-

service (SVLS). Le maire Gérald Tremblay, lui, s'est réjoui de la mesure, qui va permettre de sauver «ce projet exceptionnel pour le Québec et qui fait la fierté de Montréal».

Selon le maire, les Montréalais n'ont rien à craindre puisque, si la situation financière de l'entreprise se détériorait, ses actifs seraient toujours là. «On a des brevets, on a des actifs, on a des vélos, on a des bornes», a-t-il énuméré pour rassurer ceux qui s'inquiètent de la rentabilité à long terme de BIXI.

Le maire estime aussi que l'entente va permettre d'améliorer la transparence de l'administration de BIXI. En vertu de son statut d'organisme à but non lucratif, la SVLS n'avait jamais été sous la loupe des élus, ce que déplorait l'opposition. «On va maintenant nommer les membres du conseil d'administration, on va nommer le directeur général, on va avoir des mécanismes de contrôle», a dit le maire.

La Ville va prêter 37 millions à la SVLS en plus de garantir les emprunts de l'entreprise jusqu'à hauteur de 71 millions. La firme aura 12 ans pour rembourser la Ville, à raison de 3 millions par année, à un taux d'intérêt de 2%.

«Ce n'est pas un don, ce n'est pas un cadeau, c'est un prêt qu'on doit rembourser avec intérêts, a insisté le président de la SVLS, Roger Plamondon, qui s'est adressé mardi au conseil municipal. On demande simplement un outil financier pour poursuivre notre mission pour les Montréalais!»

BIXI avait besoin d'un coup de main de la Ville à cause d'une refonte de son modèle d'affaires. Autrefois division de Stationnement de Montréal, la SVLS devient désormais une entité indépendante. Selon son président, elle n'avait tout simplement pas les moyens d'assurer seule le service de vélos en libre-service à Montréal en plus de financer les projets à l'étranger.

BIXI toujours déficitaire à Montréal

Obtenir un prêt d'une banque s'est avéré impossible, a expliqué M. Plamondon. Après une première année déficitaire, BIXI a dégagé 1,5 million de profit l'an dernier. Ce chiffre grimpera à 2 millions cette année, selon le président.

Les profits de BIXI proviennent entièrement de la vente du service dans des villes étrangères. Ces activités internationales ont dégagé des surplus de 8,5 millions l'an passé. Le service BIXI à Montréal, depuis ses débuts en 2009, n'a quant à lui jamais été rentable et ne le sera que lorsque l'entreprise aura 50 000 membres. Elle en compte actuellement quelque 40 000.

«Il est faux de dire que les Montréalais paient pour l'exportation des vélos à l'étranger, a dit Roger Plamondon. Les profits nous permettent en fait d'absorber les pertes d'exploitation de BIXI à Montréal, parce que le marché ici n'a pas atteint sa maturité.»

La SVLS mise gros sur un contrat avec la Ville de New York, qui prévoit la livraison de 10 000 vélos. Elle est en concurrence avec une autre entreprise pour le décrocher. Si elle obtient le contrat, Gérald Tremblay affirme qu'elle remboursera sa dette à Montréal plus rapidement. Il a même laissé entendre qu'elle pourrait le faire en cinq ans.

L'opposition dénonce l'entente

Les partis de l'opposition à l'hôtel de ville ont tous deux dénoncé l'entente et ont d'ailleurs voté contre son adoption par le conseil.

«La réalité, c'est que la Ville n'a pas à se transformer en banque, a expliqué la chef de Vision Montréal, Louise Harel. La plus grosse menterie que j'aie entendue depuis que suis à l'hôtel de ville, c'est lorsque le maire dit qu'il va puiser les 37 millions dans les surplus de la Ville. On se dirige vers un trou de 80 millions. Les Montréalais sont étranglés par les hausses de taxes.»

Le chef de Projet Montréal, Richard Bergeron, propose quant à lui que la SVLS soit municipalisée. «On veut un véritable service public transparent», a dit M. Bergeron.

Selon lui, les Montréalais vont maintenant se retrouver à payer pour un service offert par une entreprise qui rend très peu de comptes. «Ce ne sera jamais rentable. Ça, on va le découvrir en 2012 ou en 2013, quand Gérald Tremblay aura pris sa retraite.»