Luc Ferrandez voulait apaiser la circulation sur le Plateau. Mais les récentes mesures de son administration ont surtout échauffé les esprits.

Quelque 300 personnes ont participé mardi soir à une réunion publique aux allures de séance de défoulement. Le maire de l'arrondissement avait invité les citoyens dans une église du boulevard Saint-Joseph dans l'espoir de les rassurer. Mais ceux-ci ne semblaient pas vouloir l'écouter: M. Ferrandez a été hué et s'est fait couper la parole à répétition par une foule hostile.

À tour de rôle, des habitants du Plateau ont pris la parole pour réclamer que l'arrondissement revienne sur sa décision d'implanter de nouveaux sens uniques sur l'avenue Laurier et l'avenue Christophe-Colomb. Selon eux, ces mesures destinées à réduire le trafic sur le Plateau créent surtout des embouteillages, en plus d'augmenter les cas de rage au volant.

«Les résidants de la rue Chambord ne veulent pas porter le chapeau des chialeux de Chambord. Mais c'est rendu l'enfer sur notre rue, a lancé Jean Harvey au micro. Tant mieux pour les résidants de la rue Christophe-Colomb. Ça doit être mieux aujourd'hui. C'est mieux dans la rue A, mais c'est pire dans les rues B, C et D.»

Un autre a accusé le maire de vouloir construire «un mur de Berlin dans le Plateau», puis une citoyenne a suggéré «à ceux qui veulent vivre dans un village d'aller vivre dans un village».

Dans la foule, on reconnaissait le comédien James Hyndman. «Le but de ces mesures, c'est de décourager les automobilistes d'emprunter leur voiture, mais on est plusieurs dans le secteur à avoir une voiture, a déploré celui qui habite la rue Chambord. C'est pas vrai que dans 10 ans on va tous se promener à vélo.»

«Je voterai jamais pour Projet Montréal, a-t-il dit à La Presse. Tout le monde est pour une ville verte, mais ils ne peuvent pas gouverner contre les automobilistes.»

«Retourne en Espagne!»

En entrant dans l'église, le maire Ferrandez a eu un avant-goût de ce qui l'attendait: «Retourne en Espagne!», a envoyé un citoyen à celui qui est né au Québec.

Devant la fronde, il n'a pas reculé, ni annoncé qu'il faisait marche arrière. Selon lui, les mesures adoptées il y a deux semaines sont nécessaires pour désengorger les rues du Plateau.

«Chaque année il y a 43 000 voitures de plus qui passent dans le quartier. Déjà, nos rues ne sont plus sécuritaires pour les enfants, a expliqué le maire, sous les applaudissements moins nourris des citoyens en faveur des nouvelles mesures. Les choses vont juste empirer si on ne fait rien. Aujourd'hui, il faut poser des gestes radicaux. Les dos d'âne ne suffisent plus.»

Rappelons que, depuis le 14 mai, l'avenue Christophe-Colomb est un sens unique vers le nord entre le boulevard Saint-Joseph et l'avenue Laurier. La mesure vise à redessiner le secteur, tout comme la décision de changer Laurier en sens unique vers l'est à partir du boulevard Saint-Laurent.

Désormais, l'automobiliste qui entre dans le Plateau par Christophe-Colomb ne peut plus continuer vers le sud en contournant le parc. Il ne peut que tourner vers l'est, où la prochaine rue à descendre est Chambord. L'arrondissement souhaite que les automobilistes en transit empruntent plutôt la rue Saint-Denis ou l'avenue Papineau pour traverser le quartier.

«Mon voeu, c'est qu'il se produise ce qui est arrivé dans bien des cas: que les automobilistes changent leur trajet et leur horaire», avait dit M. Ferrandez avant l'entrée en vigueur des changements.