Les automobilistes ne sont pas les seuls à faire les frais de la congestion à Montréal. De plus en plus, les cyclistes aussi sont pris dans des bouchons de circulation. Chaque jour à l'heure de pointe, des files interminables se créent désormais sur certaines pistes cyclables. À tel point que Vélo Québec avertit que l'axe nord-sud est «saturé» et demande l'ajout d'une piste.

À 8h30, hier matin, la piste de la rue Brébeuf ne dérougissait pas. Patientant à un feu rouge, Frédéric Pinard se rappelle des jours pas si lointains où sa balade matinale était plus tranquille. «Ça fait 12 ans que je me rends au travail en vélo, et je n'ai jamais vu ça, raconte l'homme de 37 ans. Depuis les dernières années, il y a énormément de cyclistes.»

Autour, les vélos filent à vive allure. Une file d'une vingtaine de bicyclettes vient s'agglutiner chaque fois que la lumière tourne au rouge. Il y a du monde, et la piste n'est pas large. «Des fois, je passe par des petites rues plus tranquilles pour avoir de la place pour moi, raconte-t-il. C'est difficile des fois, c'est trop congestionné.»

Saturation

La piste qui traverse le Plateau et se rend au centre-ville est la plus fréquentée de Montréal à l'heure de pointe. En moyenne, 3500 cyclistes y circulent chaque jour de semaine - un chiffre qui peut grimper à 7000 au coeur de l'été. La sortie des bureaux est le moment le plus occupé de la journée; alors, quelque 490 cyclistes passent à l'heure sur la piste Brébeuf.

«C'est un constat qu'on fait: il y a saturation à l'heure de pointe sur la piste de la rue De Brébeuf, et c'est maintenant moins agréable de l'emprunter, explique la directrice de Vélo Québec, Suzanne Lareau. Il y a des cyclistes qui l'évitent à l'heure de pointe parce qu'ils se disent qu'il y a trop de monde, qu'il y a trop d'attente: on arrive à un feu rouge et il y a 20 cyclistes devant nous. C'est moins drôle. Alors ils prennent une petite rue à côté.»

Davantage de cyclistes

Selon des chiffres de Vélo Québec dévoilés la semaine dernière, la pratique du vélo a connu une hausse de 10% à Montréal en cinq ans. Dans le Plateau, 9,6% de la population se rend désormais au travail en vélo.

En parallèle, le réseau cyclable montréalais ne cesse de croître. Il est passé de 400 km en 2007 à 530 km aujourd'hui. Mais malgré tout, il ne permet plus de répondre à la demande dans l'axe nord-sud, estime Mme Lareau. «Il va falloir qu'on ait une autre piste dans cet axe parce qu'il y a trop de monde à l'heure de pointe», explique-t-elle.

La piste de la rue De Brébeuf n'est pas la seule à être prise d'assaut. La Ville de Montréal a installé des capteurs sous l'asphalte de plusieurs d'entre elles afin de compter le nombre de bicyclettes qui y passent. Si 900 000 vélos passent chaque année sur la piste de la rue De Brébeuf, ils sont 1 million à emprunter celle du boulevard De Maisonneuve. La sommaire bande cyclable installée sur Saint-Urbain est aussi un succès, avec un demi-million de déplacements par année.

Un moindre mal

Mais même si la congestion est désormais le lot des cyclistes, plusieurs rencontrés hier préfèrent encore rouler sur les pistes bondées. Johanne Phaneuf, 51 ans, attendait le feu vert au coin des rues Rachel et De Brébeuf. Cette résidante de Montréal-Nord fait chaque jour le trajet entre sa demeure et son travail au centre-ville. Elle roule pendant une heure et quart, beau temps, mauvais temps, matin et soir.

«C'est sûr que c'est de plus en plus congestionné sur les pistes cyclables. Par moments, ça devient vraiment désagréable. Mais je les prends quand même, dit-elle. À Montréal-Nord, il n'y a pas de pistes cyclables, et ça, c'est affreux!»

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DEUX PISTES À L'HEURE DE POINTE

Affluence moyenne en semaine:

Piste Brébeuf:

De 8h à 9h: 387 cyclistes

De 17h à 18h: 486 cyclistes

Piste De Maisonneuve:

De 8h à 9h: 325 cyclistes

De 17h à 18h: 425 cyclistes