Le ministère des Transports du Québec (MTQ) devra éponger près de 90% des coûts additionnels pour des travaux qui n'avaient pas été prévus dans le contrat de la Mohawk Bridge Consortium (MBC), lors de la première phase du projet de réfection du pont Mercier.

Les sommes additionnelles versées par Québec (12 millions) ont été huit fois plus élevées que le total des avenants (1,5 million) consentis à MBC par la société fédérale Ponts Jacques-Cartier et Champlain Inc. (PJCCI), dans le cadre de ce même contrat. Et ce, même si la valeur des travaux financés par le fédéral était six fois plus élevée que sur la partie provinciale du pont Mercier.

Le coût total des travaux prévus au contrat A, signé en avril 2008, était estimé à 66 millions, selon la société PJCCI, qui est maître d'oeuvre de ce projet. Quand le chantier sera achevé, à la fin de juin, Ottawa et Québec auront versé environ 13,5 millions de plus que prévu, il y a trois ans, selon le porte-parole de PJCCI, Jean-Vincent Lacroix.

M. Lacroix a précisé que les avenants au contrat A se sont élevés à un total de 1,5 million, pour la portion fédérale du projet, sur des travaux estimés à «environ 57 millions» lors de la signature du contrat. Une hausse de seulement 2,6%.

La semaine dernière, le Parti québécois a déposé à l'Assemblée nationale du Québec un document révélant que le coût des travaux sur la partie provinciale du pont est passé de 9,1 millions à 20,8 millions. Une augmentation de 130%.

La Presse a demandé lundi au MTQ comment on expliquait un écart aussi important dans les prévisions de coûts de ces deux chantiers, dans le cadre d'un même contrat commun conclu en 2008 avec Mohawk Bridge Consortium.

Les réponses étaient toujours attendues hier, en fin de journée.

Un pont, deux gouvernements

Le pont Mercier relève de deux gouvernements. Le gouvernement fédéral, par la société PJCCI, est responsable de la partie du pont située sur la Rive-Sud de Montréal, incluant ses voies d'accès, jusqu'à la limite nord de la Voie maritime du Saint-Laurent. La partie qui domine le fleuve, de la Voie maritime jusque dans l'arrondissement de LaSalle, à Montréal, relève du gouvernement du Québec. Le ministère des Transports du Québec en assure la gestion et l'entretien.

Il y a trois ans, Ottawa et Québec ont annoncé conjointement un projet de remplacement complet du tablier du pont Mercier. Afin de limiter les impacts sur la circulation automobile, qui dépasse 80 000 véhicules par jour en moyenne, le projet a été scindé en deux phases distinctes pouvant s'étaler sur une durée de quatre à cinq ans.

Le contrat A consistait dans le remplacement, dalle par dalle, du tablier de béton de trois rampes d'accès qui relient le pont Mercier aux municipalités de Châteauguay et de La Prairie, sur la Rive-Sud. Ces travaux se déroulaient sur la partie fédérale du pont, et ont été planifiés et commandés par PJCCI.

En parallèle à ces travaux, qui représentaient le volet le plus important de la première phase, le consortium MBC devait réaliser des réparations majeures dans des structures d'acier sur la partie provinciale du pont, en préparation pour le remplacement du tablier, prévu dans la seconde phase du projet. La liste des travaux à réaliser a été établie par le MTQ.

Sans appel d'offres

Le contrat a été accordé sans appel d'offres en avril 2008 à un consortium formé de cinq entreprises établies sur la réserve mohawk de Kahnawake, qui ont retenu les services d'un important fabricant de béton, la firme Shockbéton, et des sociétés d'ingénierie SNC-Lavalin et Genivar.

Les coûts de réalisation du contrat, explique Jean-Vincent Lacroix, porte-parole de PJCCI, ont alors été estimés par Mohawk Bridge Consortium, à partir de devis préparés pour chacune des parties du pont par PJCCI et le MTQ.

Selon M. Lacroix, le coût total du Contrat A a été estimé à 66 millions, soit «environ 57 millions» pour la réfection des rampes d'accès de la Rive-Sud, qui relèvent du fédéral, et à environ 9 millions pour la réparation des structures d'acier, sur le chantier provincial.

«Il n'y a pas de dépassements de coûts, comme tels, sur la portion fédérale du contrat A, a indiqué le porte-parole de PJCCI. Les coûts additionnels sont des avenants qui ont été ajoutés en cours de route et qui n'avaient pas été prévus au départ.»

Un seul chemin de déviation avait été prévu pour rediriger le trafic durant les travaux sur les rampes d'accès de la Rive-Sud. La société fédérale en a fait construire un second. Des travaux de correction ont aussi dû être réalisés sur le premier chemin de détour. Des travaux de renforcement de l'acier sous une des rampes d'accès de Châteauguay ont aussi été ajoutés aux travaux prévus pour un total de 1,5 million.

La nature exacte des travaux additionnels réalisés sur la partie provinciale du pont n'est pas connue. Toutefois, la semaine dernière, La Presse a révélé que dans une note transmise au sous-ministre des Transports, des fonctionnaires du MTQ estimaient qu'il «était critique d'intervenir sur certaines membrures (d'acier) qui n'apparaissaient pas en mauvaise condition lors de l'attribution du contrat de base».

«La quantité des pièces détériorées de la structure en acier a doublé par rapport au nombre d'interventions requises lors de l'attribution du contrat», disait aussi cette note de service.