Après 44 ans d'exil, les poules sont de retour à Montréal.

Pas tout à fait par la grande porte, et pas en très grand nombre: elles seront cinq, en fait, hébergées par un organisme communautaire de l'arrondissement Rosemont-La Petite Patrie dans le cadre d'un projet-pilote.

Ces cinq poules, de la race patrimoniale Chantecler, devraient pondre leurs premiers oeufs urbains vers le 11 juillet, a annoncé ce matin la directrice générale de la Maisonnette des parents, Lison Hovington. Cet organisme, qui dessert les familles défavorisées du secteur en proposant notamment des cuisines communautaires et des dîners chauds aux enfants, a ouvert la voie au retour des poules en ville en déposant ce projet à l'arrondissement.

Le 4 juillet prochain, les élus voteront un règlement autorisant l'élevage de ces volailles dans des conditions très strictes: un maximum de cinq, gardées dans un espace fermé, uniquement dans le cadre d'un projet communautaire à des fins éducatives.

Le règlement a été conçu après des consultations juridiques et constitue une première brèche dans l'interdiction des animaux d'élevage dans le territoire de Montréal, instituée en 1967.

Pas pour les citoyens

Pour la Maisonnette des parents, le projet consistera essentiellement à montrer aux 70 enfants du camp de jour -ouvert en début de semaine- les mystères de l'élevage. Les enfants pourront s'occuper des poules et récolter les oeufs, tout en s'assurant de respecter les normes d'hygiène. «Je suis persuadé que beaucoup d'enfants ignorent d'où viennent les oeufs», dit le maire de l'arrondissement, François Croteau.

Plusieurs métropoles américaines, de Toronto à Vancouver en passant par Seattle, Portland et Denver, permettent déjà l'élevage des poules, rappelle-t-il. Il se dit ouvert à octroyer d'autres permis de ce genre à des organismes qui en feraient la demande, et qui respecteraient évidemment les fins de ce règlement. Mais pas question, pour le moment, de permettre l'élevage des poules pour les simples citoyens. « À Montréal, nous devons mieux nous discipliner dans notre attitude envers les animaux : beaucoup sont encore abandonnés lors des déménagements, c'est inacceptable, explique le maire. Et nous ne voulons pas engager une batterie d'inspecteurs pour assurer la salubrité, nous n'en avons pas les moyens. »

Quant aux poules de la Maisonnette des parents, on devra leur construire un poulailler dans les prochains jours, à l'arrière de l'édifice hébergeant l'organisme, au 6651 boulevard Saint-Laurent. Les enfants seront ensuite appelés à s'occuper des animaux, sous la supervision évidemment des bénévoles adultes, tout en respectant des normes d'hygiène «équivalentes à ce qui se fait dans une cuisine», explique Lison Hovington. Il s'agit essentiellement de se laver les mains avant et après le contact avec les animaux, et nettoyer les oeufs avec un linge humide.

Et, pour les coeurs sensibles, Mme Hovington a précisé que les poules seraient hébergées chez un éleveur cet hiver, puis ramenées boulevard Saint-Laurent le printemps prochain.

L'arrondissement a offert une participation financière de 3000$, via la SODER, une société qui développe et gère des projets environnementaux à forte composante sociale.