Le gel budgétaire imposé aux arrondissements de Montréal depuis six ans «n'a aucun bon sens» et a des répercussions directes sur les services aux citoyens, ont plaidé les cinq maires élus sous la bannière de Vision Montréal.

Réunis en caucus pendant deux jours au Château Dufresne, les élus du parti de Louise Harel ont présenté aux médias jeudi leur bilan de mi-mandat du maire Gérald Tremblay. La conclusion générale «Les Montréalais méritent mieux que ce qu'ils ont actuellement comme administration municipale, a déclaré Mme Harel. Le maire Tremblay est paralysé par le statu quo des élus de son propre parti. Il est incapable de prendre courageusement les décisions qui s'imposent en matière de dédoublement et de gaspillage.» Montréal, résume la chef de parti, «a trop de bureaucratie, trop d'élus et trop de taxes».

La réplique de l'hôtel de ville est tombée  lapidaire  quelques heures plus tard. «C'est complètement faux, Mme Harel ne sait pas compter, elle dit n'importe quoi, a déclaré Darren Becker, porte-parole du comité exécutif. Elle veut encore gaspiller notre temps en débats de structures, au lieu de mettre la priorité sur des projets concrets.»

Une «saignée» des services

Cette année, le gel des budgets alloués aux arrondissements équivaudra à des compressions budgétaires de l'ordre de 10 millions dans les cinq arrondissements dirigés par un maire de Vision Montréal. «Ce sont des services de proximité très concrets qui sont touchés, s'indigne Mme Harel. Les piscines, le déneigement, la propreté, l'animation et la sécurité des parcs, la collecte des déchets, les hausses salariales accordées par l'administration centrale tout ça augmente chaque année alors que nos dotations sont gelées.»

Les cinq maires sont unanimes, pas question d'imposer de nouvelles taxes d'arrondissement pour trouver les millions manquants. «On n'impose pas de taxes pour payer l'épicerie, explique Anie Samson, mairesse de VilleraySaint-MichelParc-Extension. Mais c'est intolérable de vivre avec cette commande-là.»

Le sort des arrondissements est d'autant plus inexplicable que les impôts fonciers, à l'exception d'un gel en 2006, ont grimpé au cours des six dernières années. «Pas évident d'expliquer au citoyen qui vient au bureau d'Accès Montréal que les impôts augmentent, mais que les services diminuent», dit François Croteau, de l'arrondissement de RosemontLa Petite-Patrie.

Les 19 arrondissements de Montréal ont cependant réussi à boucler leur budget 2010 avec des surplus de 82 millions, et disposent d'un surplus accumulé total de 155 millions.

Chiffres contestés

Mais ces sommes, ont tenu à préciser les maires présents à la conférence de presse, sont «aléatoires» et dépendent de circonstances exceptionnelles, comme de faibles précipitations de neige ou une hausse des demandes de permis. «On ne gère pas la vie quotidienne en fonction des bonis qui vont venir à la fin de l'année», dit Anie Samson.

Vision Montréal a par ailleurs annoncé qu'il relancerait l'administration Tremblay sur la nécessité de créer un Bureau de coordination des travaux routiers et d'infrastructures. Le parti a par ailleurs présenté une série de motions qui seront déposées lundi prochain, à la réunion du conseil municipal, demandant notamment l'implantation d'une navette fluviale, l'obtention des études sur l'état des infrastructures et l'implantation d'un péage régional.

Du côté de l'administration Tremblay, on a contesté les chiffres avancés par Vision Montréal. Selon elle, depuis 2006, les budgets des arrondissements ont augmenté de 78,9 millions, soit une moyenne de 1,8% chaque année, a précisé Darren Becker. La hausse du fardeau fiscal résidentiel a aussi été moindre que l'inflation. «De plus, les cinq arrondissements de Vision Montréal ont eu à eux seuls 20% des surplus accumulés. Ils ont donc la possibilité de les utiliser.»

Quant au nombre trop élevé d'élus, M. Becker estime qu'il s'agit d'un débat creux, qui ne concerne que 2% du budget de plus de 4 milliards de la Ville. «Si on a moins d'élus, on a plus de personnel. C'est important pour les citoyens d'avoir accès à ceux qu'ils élisent.»