L'explosion des coûts des régimes de retraite coûtera encore cher aux Montréalais l'an prochain; plus de 609 millions, une facture largement responsable de la hausse de 3,3% du fardeau annoncée mercredi par l'administration Tremblay-Applebaum.

Le propriétaire d'une maison unifamiliale moyenne évaluée à 345 000$ recevra un avis d'imposition de 3246$, en hausse de 95$.

«C'est plus que raisonnable, c'est 26 cents par jour, a illustré le président du comité exécutif de la Ville, Michael Applebaum. Ce budget répond aux besoins des Montréalais. Notre administration relève son défi principal, donner les services aux citoyens tout en respectant leur capacité de payer.»

Son premier budget «reflète [ses] valeurs personnelles», soit d'offrir une administration plus efficace à coût moindre, a-t-il précisé.

Selon le maire Gérald Tremblay, ce budget démontre l'assainissement des finances de la métropole auquel il s'est attelé depuis 2001. «Oui, les finances publiques se sont assainies même si la situation financière demeure fragile.»

Cette fragilité provient en grande partie du poids qu'exercent les régimes de retraite des employés municipaux. En deux ans à peine, la note a pratiquement doublé pour la Ville, passant de 326 millions à 609 millions. Cette explosion s'explique notamment par la déconfiture des marchés en 2008 et l'augmentation de l'espérance de vie des retraités. Ceux-ci touchent leurs prestations beaucoup plus longtemps que prévu lors de la création de ces régimes.

L'administration Tremblay prépare le terrain depuis plusieurs mois pour revoir le partage de ces coûts avec ses employés, afin que ceux-ci paient la facture à parts égales. À l'heure actuelle, Montréal paie entre les deux tiers et les trois quarts de la note. Le maire souhaite également repousser l'âge de la retraite.

Infrastructures

La hausse d'impôt foncier de 3,3% cette année, pour une augmentation totale de 12,9% depuis la réélection du maire Tremblay en 2009, lui apparaît «très raisonnable dans les circonstances». «Si on compare avec les autres villes, on est en bas. Quand on regarde les besoins essentiels des citoyens, le sous-investissement dans les infrastructures depuis des décennies, on investit dans l'avenir de Montréal.»

Le budget 2012 s'établit à 4,7 milliards, en hausse de 5,2% par rapport à l'an dernier, dont 3,1 milliards proviennent des taxes municipales. Plus de la moitié de cette augmentation, 2,9%, est due aux régimes de retraite, qui grugeront 132 millions de plus qu'en 2011. L'autre poste important est la sécurité publique, à laquelle on attribue 0,9% de la hausse du fardeau. Le service de police recevra 662 millions, tandis que les pompiers coûteront 329 millions.

Comme on l'a annoncé il y a plusieurs mois, l'impôt foncier général grimpera en suivant l'inflation, soit 2,5%. La seule surprise provient de la taxe consacrée à l'eau, qui ajoute une hausse de 0,5%. Les taxes locales, qui varient d'un arrondissement à l'autre, représentent une facture supplémentaire moyenne de 0,3%.

Les 15 villes reconstituées devront quant à elles verser 393 millions à l'agglomération de Montréal en 2012, une hausse de 2,9%.

Taxe sur l'immatriculation

Montréal maintient sa taxe de 45$ sur l'immatriculation des véhicules et prévoit aller chercher 7,5 millions de plus en 2012, première année d'application complète de cette tarification.

La Ville compte récolter également pour 192 millions en contraventions et autres amendes, une hausse de 3%. Les infrastructures vétustes de la métropole continueront d'être traitées aux petits oignons l'an prochain, avec des dépenses de 331 millions en fonctionnement pour la gestion de l'eau, en plus des 392 millions déjà annoncés pour le programme triennal d'immobilisations (PTI).

Engagée dans un exercice de dégraissage de l'appareil municipal, qui devait mener à la suppression de 1000 postes d'ici à 2013, le maire Tremblay a dû plutôt reconnaître qu'on ajoutera au net 40 postes en 2012 (voir autre texte en page A6).

Les transports collectifs recevront 445 millions, une baisse de 7 millions par rapport à 2011. La Société de transport de Montréal (STM) aura droit à un chèque amputé de 15 millions, à 373 millions, pour ses activités de fonctionnement. Elle pourra cependant profiter d'une augmentation de 5 millions, à 22 millions, pour ses immobilisations.

Le remboursement de la dette, qui frôle les 5 milliards, coûtera 775 millions, soit 17% du budget.

Appauvrissement et familles

La chef de l'opposition, Louise Harel, a dénoncé la hausse des dépenses de 5,2% en 2012, jugeant qu'«il n'y a pas de volonté de contrôler les dépenses». «C'est un budget d'appauvrissement des Montréalais», a-t-elle tranché. Elle a cependant défendu le recours aux taxes locales dans la moitié des arrondissements, l'expliquant par le sous-financement par la ville centre. «C'est une taxe pour payer l'épicerie, pas pour se payer des projets spéciaux», a indiqué Mme Harel.

Projet Montréal a dénoncé pour sa part la hausse de taxes et la baisse d'investissements en habitation. «C'est encore un incitatif pour les familles à s'exiler dans les banlieues entourant Montréal. C'est un programme quasi anti-familles», a tonné Richard Bergeron.

La deuxième opposition a déploré la baisse de financement de la STM. «Depuis trois ans, la Ville est allée chercher 100 millions dans la poche des automobilistes - la taxe de stationnement au centre-ville, les droits d'immatriculation de 45$ et la taxe sur l'essence - et elle en profite pour diminuer sa contribution aux transports collectifs tout en augmentant le tarif aux usagers», a dénoncé M. Bergeron.