Réagissant aux reportages sur les animaux domestiques maltraités, Montréal a annoncé la mise sur pied de son propre centre de services animaliers.

L'annonce, faite ce matin par Richard Deschamps, vice-président du comité exécutif à la Ville et responsable des services aux citoyens, vise à «offrir un environnement sécuritaire de soins animaliers, accessible à des coûts raisonnables pour l'ensemble des citoyens.»

On prévoit dans un premier temps lancer une vaste campagne de sensibilisation visant notamment à convaincre les propriétaires d'animaux domestiques de stériliser et de ne pas abandonner leurs protégés.

On veut éventuellement forcer l'enregistrement des animaux, à un tarif et des conditions qui sont encore à déterminer.

Ce modèle est inspiré de ce qui se fait déjà dans d'autres métropoles, dont Toronto et Calgary, a précisé M. Deschamps.

15 000 euthanasies par année

Le refuge offrira des soins vétérinaires, un service d'adoption et aura la tâche d'éduquer la population. Depuis juin dernier, un comité d'experts notamment formé de vétérinaires se penche sur cet épineux dossier. Chaque année, les divers refuges avec lesquels les 19 arrondissements font affaire -gérés par la SPCA et le Berger Blanc- recueillent quelque 22 000 animaux abandonnés. Plus de 15 000 sont euthanasiés, faute d'avoir trouvé un nouveau maître.

C'est beaucoup trop, a convenu M. Deschamps. «Le premier responsable du bien-être demeure le citoyen propriétaire de l'animal. Les Montréalais font partie de la solution et ils doivent agir de façon responsable. Mais l'offre de service n'est pas optimale et diversifiée.»

Son premier conseil, à l'approche du temps des Fêtes, est de favoriser l'adoption plutôt que l'achat d'un animal qu'on veut offrir en cadeau.

«Le plus rapidement possible»

Peu de détails sur ce nouveau centre municipal ont été divulgués, le projet devant être précisé d'ici l'été 2012. «L'annonce n'est pas complète, il reste du travail à faire, mais nous avions promis une annonce avant la fin de l'année et l'administration Tremblay respecte ses promesses», a déclaré M. Deschamps.

On ignore par exemple s'il s'agira d'un site unique ou plusieurs centres disséminés dans la ville. «Nous avons plusieurs hypothèses», dit le conseiller municipal. Le coût d'opération, le nombre d'employés, la réglementation et le mécanisme exact de ce «centre intégré» feront l'objet d'analyses plus poussées.

On ignore de même quand ce centre pourrait ouvrir ses portes. «Ce sera le plus rapidement possible», a annoncé M. Deschamps.

En mai dernier, le maire Gérald Tremblay, interpellé à ce sujet au conseil municipal, avait évoqué un montant de cinq millions pour opérer un tel centre, ce qui correspond grosso modo aux sommes déjà dépensées par les arrondissements pour les contrats de service de gestion animalière.

L'identification obligatoire des chiens et des chats, «c'est ce nous pensons faire, a précisé M, Deschamps. Il va falloir qu'il y a ait des pénalités cohérentes.» La Ville va proposer un modèle de réglementation uniforme qui sera proposé aux arrondissements, qui sont les responsables de leur application.

Vente d'animaux encadrée

Il n'est pas question, pour le moment, d'effacer du portrait les organismes et entreprises qui offrent déjà des services de ce type. Les contrats déjà signés seront honorés, a assuré M. Deschamps. «Il pourrait rester du marché pour la SPCA et le Berger blanc, et j'invite même de nouveaux entrepreneurs à offrir leurs services. Les citoyens vont avoir le choix entre les commerces privés ou le centre de services. Nous allons donner un choix qui n'existe pas actuellement.»

M. Deschamps désapprouve également l'interdiction pure et simple de vente d'animaux par des commerces. L'arrondissement Rosemont-La Petite-Patrie a décrété le mois dernier l'interdiction d'ouvrir de nouvelles animaleries. «Les gens ont le droit de vendre des animaux, mais ça doit se faire de façon professionnelle.»

La chef de l'opposition à l'hôtel de ville, Louise Harel, a accueilli la nouvelle avec joie. «C'est ce qu'on avait réclamé depuis mai dernier. C'est la bonne voie, c'est ce qu'il fallait faire à Montréal.»

Elle approuve également l'idée d'une réglementation harmonisée, soulignant que «les animaux domestiques ne respectent pas les frontières des arrondissements.» La chef de Vision Montréal ne croit pas qu'il faille interdire les animaleries, «mais la stérilisation doit faire partie intégrante de la vente».

«Un pas dans la bonne direction»

Du côté de Projet Montréal, la conseillère d'arrondissement Piper Huggins a déploré le peu d'implication des arrondissements dans le projet. «Nous n'avons même pas été consultés.»

Elle estime l'annonce de ce matin plutôt incomplète, soulignant que «les détails sont très importants. Mais là, on n'a pas grand-chose de concret. Mais c'est un pas dans la bonne direction.»

Le 11 avril dernier, l'émission Enquête de Radio-Canada avait diffusé un reportage troublant sur le sort des animaux dans un des plus importants refuges au Canada, celui du Berger Blanc, à Montréal. L'organisme, qui faisait alors affaire avec une dizaine d'arrondissements, avait vu ses méthodes exposées et dénoncées, notamment au chapitre de l'euthanasie.

Richard Deschamps a assuré ce matin que «la situation est aujourd'hui sous contrôle» et que de nombreuses inspections inopinées avaient permis de s'assurer que les animaux y étaient traités sans cruauté. «Mais comme tout Montréalais, ce sont des images que je ne veux plus revoir.»