Après 10 ans à se plaindre de leurs budgets trop maigres, les arrondissements de Montréal ont droit à une lueur d'espoir. Leur financement sera «revu en profondeur» d'ici au mois de juin, après une vaste consultation générale qualifiée de «chantier le plus important de la nouvelle Ville».

«Nous devons crever l'abcès du financement des arrondissements, a déclaré le maire Gérald Tremblay. La perception est toujours la même: ils sont sous-financés. On ne peut plus continuer avec le statu quo, avec cette perception d'injustice.»

Le président du comité exécutif, Michael Applebaum, entamera la semaine prochaine une tournée des 19 arrondissements. Il rencontrera les maires, les conseillers ainsi que les fonctionnaires clés et proposera une démarche au comité exécutif dès la deuxième semaine de février.

La commission des finances sera ensuite mandatée pour étudier les résultats des travaux et pourra, si elle le souhaite, tenir des audiences publiques. M. Applebaum a toutefois exclu le recours à une consultation formelle par l'Office de consultation publique de Montréal.

«Il faut mettre de côté toute partisanerie politique, a-t-il dit. Le seul parti pris doit être celui du bien-être des Montréalais.»

Tout l'exercice devra être bouclé d'ici à la fin juin, afin d'intégrer cette nouvelle donne au budget 2013. L'administration Tremblay sera épaulée par les experts universitaires du Centre interuniversitaire de recherche en analyse des organisations (CIRANO).

«On repart avec une feuille blanche, on est ouverts à tout, a dit M. Applebaum. Il peut y avoir centralisation, décentralisation, regroupements de services.»

«Ça va être fait en juin, on ne peut plus continuer à tergiverser», a renchéri le maire.

Pas un débat de structures

Concrètement, les deux politiciens refusent de s'engager à hausser les budgets des 19 arrondissements. Le maire Tremblay a cependant assuré que le gel des transferts imposé depuis 2009 était chose du passé. «Je ne crois plus que ce soit faisable de geler les budgets à l'avenir. Nous ne pouvons plus faire ça.»

Le maire estime que le règlement de ce dossier permettra enfin à Montréal de «parler d'une seule voix», comme la Communauté métropolitaine de Montréal et l'agglomération ont réussi à le faire cette année pour la première fois en 10 ans.

Il n'est cependant pas question de toucher aux structures, de transformer ou d'éliminer des arrondissements, a-t-il

prévenu. «Montréal n'a pas besoin d'un débat de structures qui va encore nous diviser.»

Le mode de financement actuel est une conséquence de la naissance précipitée de la nouvelle ville, en 2001, estime le maire. «Le comité de transition, il faut le reconnaître, a manqué de temps, à cause d'échéances fixes. En 2001, nous avons hérité d'une ville en déficit démocratique, où il y avait un sous-investissement dans les infrastructures et les équipements. Ça a pris 10 ans pour rénover Montréal - et il y a encore du travail à faire.»

La demande de nouvelles sources de financement à Québec n'a rien à voir avec cet exercice, précise-t-il. «Il y a assez de ressources financières [pour régler le dossier des arrondissements], c'est une question d'allocation.»

«Une bonne nouvelle»

L'opposition a accueilli de façon plutôt favorable l'annonce de cet exercice. Le maire de l'arrondissement du Sud-Ouest et élu de Vision Montréal, Benoit Dorais, s'est dit satisfait «dans la mesure où le maire reconnaît enfin qu'il y a une iniquité».

«On le dit depuis 10 ans. Il faudra maintenant voir comment tout ça va se faire.»

Le chef de Projet Montréal, Richard Bergeron, s'est pour sa part dit «heureux» de l'annonce. «C'est une bonne nouvelle, nous allons collaborer honnêtement à ce processus. Mais nous avons eu beaucoup de déceptions avec Gérald Tremblay depuis 10 ans.»

Il a rappelé que Michael Applebaum avait nié l'automne dernier le sous-financement des arrondissements. Le budget de Montréal, a-t-il signalé, a augmenté de 700 millions depuis les élections en 2009, passant de 4 à 4,7 milliards, «et les arrondissements n'ont pas reçu un sou de plus».

Le maire de Lachine, Claude Dauphin, qui avait menacé le mois dernier de quitter le parti du maire, s'est lui aussi dit satisfait. «Six mois, quand la volonté politique est là, c'est amplement suffisant. J'espère que cette fois-ci sera la bonne.»

Comme quelques-uns de ses collègues d'Union Montréal, il avait brandi le spectre de la défusion des ex-villes de banlieue lors de l'étude du budget 2012. «Si on trouve une nouvelle formule intéressante et motivante qui nous permet de bien évoluer au sein de Montréal, je serai le premier à voter pour.»