Un an et demi après l'affaire BCIA, Montréal tourne le dos aux agences de sécurité privées: la surveillance des immeubles de son service de police sera confiée à ses propres cols bleus.

«C'est une bonne nouvelle, une solution extrêmement intéressante», a convenu mercredi en point de presse Claude Trudel, responsable de la sécurité publique au comité exécutif.

Il s'agit d'une première pour la Ville et le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM), souligne M. Trudel. Au Syndicat des cols bleus regroupés, le président Michel Parent s'est félicité que la Ville reconnaisse l'expertise de ses propres employés. «On était en pourparlers depuis un an et demi. Nous croyons avoir fait la démonstration que les cols bleus peuvent faire le travail à moindre coût pour les contribuables.»

Il reconnaît qu'il a été plutôt rare, au cours des dernières années, de voir des fonctionnaires municipaux remplacer des sous-traitants privés. «La tendance est plutôt à l'inverse. Mais il semble que certaines villes en Europe reviennent elles aussi vers leurs propres employés après avoir confié la gestion à l'entreprise privée.»

L'entente de principe conclue avec le syndicat permettra à la Ville d'embaucher 14 employés déjà affectés à la surveillance des trois immeubles du SPVM. «Il s'agit d'employés qui faisaient cette tâche parfois depuis des années, explique M. Trudel. Ils ne faisaient en fait que passer d'un employeur à l'autre.»

Ces 14 employés obtiendront le statut d'auxiliaire, après une enquête de sécurité menée par le SPVM. On embauchera en outre 11 autres employés - qui pourraient être des cols bleus travaillant déjà à la Ville. Le coût total de la surveillance sera de 900 000$, ce qui correspond grosso modo à ce qu'on versait auparavant à des agences privées, indique M. Trudel.

Comme 70 autres cols bleus

Fait à noter, ces 25 employés n'auront pas le droit de grève, leurs services étant considérés comme essentiels. «Nous avons accepté cette clause, comme nous avions accepté de continuer à nous occuper du Biodôme en cas de conflit», explique Michel Parent.

La nuance est importante dans la mesure où ces employés auraient pu être concernés par des moyens de pression de leurs autres collègues cols bleus. M. Parent rappelle cependant que plus de 70 cols bleus - palefreniers, armuriers, responsables de l'entretien des automobiles - travaillent déjà pour le SPVM.

Cette première survient après la publication dans La Presse, le 22 septembre 2010, d'un article révélant les liens troubles entre la firme BCIA, qui avait hérité du contrat de surveillance des immeubles du SPVM, et plusieurs hauts responsables, dont le directeur de la police, Yvan Delorme, et le président du comité exécutif, Frank Zampino.

BCIA faisait la surveillance sans contrat, était impliquée dans du financement politique litigieux et montrait des états financiers comprenant des irrégularités. La firme de Luigi Coretti, ami de l'ex-ministre Tony Tomassi, a déclaré faillite, faisant perdre des millions au gouvernement et à Desjardins.

Le 29 septembre 2010, La Presse a révélé en outre que deux dirigeants de la firme qui avait hérité de la surveillance du quartier général du SPVM, Sécur-Action, s'étaient déclarés coupables d'infractions criminelles.