Impossible d'être plus... explosif que ce professeur de sciences, qui donne tout ce qu'il a de connaissances, d'imagination, de trouvailles ingénieuses pour ouvrir le cerveau et le coeur de ses élèves. Il y a un peu du Dr Jekyll en lui; avec son sarrau peinturluré, il fait penser à Einstein; bref, tous les moyens sont bons pour capter l'attention de son auditoire et faire aimer les sciences.

Yannick Bergeron enseigne les sciences en cinquième secondaire au collège Saint-Jean-Vianney. Récemment, le Conseil de recherches en science naturelle et en génie du Canada lui a décerné le prix Michael Smith pour sa contribution exceptionnelle à la promotion des sciences au Canada.

 

La Presse et Radio-Canada nomment Yannick Bergeron Personnalité de la semaine pour souligner son apport remarquable à l'enseignement.

Plus qu'un 100 watts

Sa jeune carrière est pleine de réalisations surprenantes. Yannick Bergeron n'a que 31 ans. En 14 ans seulement, il a acquis une expérience de «vieux fou» des sciences.

Animateur des Débrouillards de 1994 à 2008, il donne de la formation, anime des soirées etc. Toujours pour les Débrouillards, il forme des animateurs scientifiques, écrit des livres, s'occupe de jeunes d'écoles primaires défavorisées. Pour les expo-sciences, il agit bénévolement à titre d'organisateur, de juge, etc. Il a conçu des trousses d'animation scientifique. Recherchiste pour la télévision, il s'est occupé notamment de conceptualiser les différentes expériences que Gregory Charles présentait devant la caméra.

Depuis 2000, il crée et recrée le spectacle La magie de la chimie, vu jusqu'ici par près de 15 000 personnes. Responsable à son école du club Les Atomistes, une fois l'an, il organise une nuit blanche de science!

Tout cela n'est qu'une partie de ses initiatives et de ses projets.

Et s'il a du temps, il réfléchit, se fixe d'autres défis, ne compte pas les heures.

Pourtant, il confesse: «Je m'en allais en arts!» C'était son premier choix de carrière à l'adolescence: le théâtre. «Peut-être aussi ingénieur en électricité...» Et une tentative mémorable en dentisterie. «L'univers de la bouche me semblait trop étroit, j'aurais voulu faire éclater les mâchoires», raconte-t-il en riant, et en ajoutant que cela a failli arriver!

À 15 ans, il a participé à sa première expo-sciences québécoise, puis à la pancanadienne. Ce fut la piqûre. La passion totale.

Yannick Bergeron a eu la chance de croiser de vrais pédagogues, des mentors qui, à diverses étapes de son cheminement, ont su lui indiquer la voie et croire en lui. «Jeune, j'aimais les sciences, mais ma mère ne me donnait pas droit d'accès aux colorants alimentaires!» raconte-t-il avec humour.

Il ajoute qu'il trouvait les cours ennuyeux, froids, sans vie. «Alors maintenant, j'opte pour les ballons sur la tête et les lampes clignotantes! dit-il, pince-sans-rire. Le message passe mieux. Il faut reconnaître que pas un enfant ne reste indifférent.» Mais qu'on se rassure, le contenu est d'une rigueur absolue.

Il semble que la vie lui ait fait cadeau d'une énergie à toute épreuve. De multiples talents également. Il est allé chercher à l'Université de Montréal toutes les compétences pédagogiques requises.

Créativité

Les sciences lui ont donné l'occasion - et ce n'est pas fini - de faire éclater ce qu'il porte en lui de créatif en exploitant ses dons de jeu, d'écriture, de mise en scène, voire de poésie. Ce n'est pas sans danger. Un fois, il a fait éclater une citrouille qui l'a blessé! Et il raconte: «Un jour, avec Gregory, on a fabriqué un bateau en ciment afin de prouver que ce n'est pas le matériau mais plutôt la forme du bateau qui importe. Mais on l'a mis à l'eau trop vite, il n'était pas sec. Il s'est désagrégé...»

Ses nombreuses activités, le travail, les conférences, les animations, ne semblent pas lui peser, au contraire. «Avec mes élèves, je me reconstruis chaque jour. Les jeunes m'apprennent des choses autant que je peux le faire et j'ai la passion d'apprendre. Alors on s'entend comme de véritables partenaires de connaissances, une équipe qui rame dans la même direction.» Et puis il les aime. Totalement.

On le considère parfois comme un chef de meute.

À la maison, il est le papa d'Adrien, deux ans et demi. Arnaud, le petit frère, va naître bientôt. Yannick Bergeron se dit comblé par la vie. Si par malheur il a un moment libre, il peut toujours étancher sa soif intellectuelle au coeur de l'une ou l'autre de ses cinq bibliothèques d'ouvrages scientifiques. Ou recevoir ses amis, issus du monde des sciences et de celui des arts. Ces deux univers complémentaires font partie de lui.

«Mon rôle comme enseignant, reprend-il, est de rendre mon cours joyeux, magique, d'intéresser les jeunes de façon plus ludique».

Sait-il combien de petites graines de passion il a semées au cours de ces dernières années? Non il ne le sait pas - comme la grande majorité des professeurs, d'ailleurs. Il y a parfois ici et là une reconnaissance, une gratification ou un témoignage qui lui ressemble, par l'affection et l'humour. Bruno, un animateur de 18 ans, lui a déclaré récemment: «Si tu es dans ma vie, c'est qu'il y a de la chimie entre nous.»