Léa Clermont-Dion a été nommée Personnalité par Excellence 2011 par l'organisme Forces Avenir, qui vise à reconnaître et à promouvoir l'engagement étudiant. Cette mention, accompagnée d'une bourse de 15 000$, récompense ses efforts pour améliorer la condition des femmes, d'ici et d'ailleurs, et souligne au passage la réalisation de sa Charte québécoise pour une image corporelle saine et diversifiée. Pour sa détermination et sa contribution au mieux-être collectif, La Presse et Radio-Canada lui décernent le titre de Personnalité de la semaine.

Volubile, énergique et passionnée; Léa Clermont-Dion est une étudiante à part. Touche à tout, elle abordera plusieurs sujets au cours de l'entretien que nous avons eu avec elle: son prix, les médias, l'hypersexualisation, le monde de la mode, l'anorexie, son livre en chantier, son court métrage sur la prostitution, sa génération, le féminisme, la politique et le Burkina Faso. Le tout en 45 minutes chrono. Fougueuse et engagée, la jeune femme partage ses convictions, puis s'arrête net, retournant en arrière pour clarifier (ou tempérer) certains passages; avant de sauter sur un autre sujet qui l'allume tout autant.

L'étudiante en relations internationales et en droit international à l'UQAM a assurément pris de la maturité. L'adolescente, présente dans les médias depuis plusieurs années, s'est transformée en une jeune femme qui désire faire avancer la société. Celle qui a dit à sa mère, à l'âge de 10 ans, que «l'important n'était pas de parler, mais bien d'agir» est connue du grand public depuis sa pétition pour l'adoption d'une Charte sur l'image corporelle, qui fut adoptée par le gouvernement en 2009.

La Charte

«Grâce à la Charte, j'ai pris beaucoup de maturité, j'ai travaillé aussi beaucoup sur moi, j'ai développé mon esprit critique», avoue-t-elle d'entrée de jeu. La Charte québécoise pour une image corporelle saine et diversifiée vise à briser l'image stéréotypée de la femme, véhiculée par les médias et l'industrie de la mode. «Avec le recul, c'est l'expérience personnelle qui m'a donné le goût d'en faire plus», résume-t-elle. Bien que cette Charte ait été saluée par plusieurs figures publiques et politiques, certains lui ont reproché sa timidité. «Oui, la Charte est timide, mais c'est un début. C'est difficile de faire évoluer les mentalités et les gens. L'industrie de la mode ne changera pas du jour au lendemain», ajoute-t-elle. «Mais depuis l'adoption de la Charte, certains magasins ne retouchent plus les photos des mannequins dans leur campagne publicitaire», souligne Léa Clermont-Dion.

Ayant souffert elle-même d'anorexie nerveuse, Léa Clermont-Dion n'hésite pas, quand son horaire chargé le lui permet, à visiter les établissements scolaires afin de partager son expérience avec les jeunes et discuter de l'hypersexualisation. Et qu'en pensent-ils? «L'hypersexualisation? Ils ne savent même pas ce que c'est. Ils ne peuvent même pas mettre de mots sur ce qu'ils ressentent. Et ils ne savent pas en plus à qui ils pourraient en parler. Tout ce qu'ils savent, c'est qu'ils n'aiment pas leur apparence» souligne-t-elle. Elle constate avec tristesse que la plupart des adolescents ont une faible estime d'eux-mêmes. Les garçons comme les filles. «Il ne faut pas les oublier. Eux aussi sont de plus en plus exposés à des stéréotypes difficiles à atteindre», ajoute-t-elle. Léa Clermont-Dion tient aussi à leur dire qu'une souffrance peut se transformer en un formidable moteur pour évoluer et faire changer les choses. «Sans ses années où je n'allais vraiment pas, je ne crois pas que je serais rendue là où je suis maintenant. Cette immense douleur m'a convaincue que je devais faire quelque chose», confie-t-elle.

Des projets

Léa Clermont-Dion ne veut pas qu'être associée à une seule cause. Suivant ses champs d'intérêt variés, elle s'engage aussi avec Oxfam-Québec pour l'organisation de la Marche 2/3, depuis sept ans. Elle a même participé à un stage Québec sans frontières au Burkina Faso, en 2010. Elle en a rapporté une série de photos qui ont été exposées et qui le seront prochainement, à nouveau. Elle a gardé de ce voyage le souvenir d'un groupe de femmes qui a fondé une coalition pour améliorer son sort. Des femmes, comme Léa, qui ont décidé d'agir.

Pendant qu'elle s'affaire à la production de son court métrage et à l'écriture de son premier livre, Léa cherche une université à l'étranger pour poursuivre ses études. On ne peut s'empêcher de lui demander si elle est intéressée par la politique. «Oui, dans 15 ans. Pour l'instant, aucun parti ne m'attire entièrement. On est dans une période d'instabilité et de changement. J'aime mieux, présentement, être du côté des citoyens. Je trouve que les gens se réveillent en ce moment et qu'ils sentent qu'ensemble, ils peuvent changer les choses», avoue-t-elle.