Il faudra plusieurs « étapes » avant d’atteindre la norme québécoise sur la concentration d’arsenic de 3 nanogrammes par mètre cube d’air à la Fonderie Horne de Rouyn-Noranda, affirme le directeur national de santé publique, le DLuc Boileau. Il espère toutefois trouver un compromis « acceptable » avec l’entreprise rapidement.

« Tendre vers le 3 nanogrammes, c’est l’objectif, mais il peut y avoir des étapes. Et il faut s’y rendre ensemble. […] Penser qu’une entreprise peut changer ses processus en quelques jours, c’est invraisemblable. Il faut se donner un regard réaliste », a dit le DBoileau en conférence de presse, jeudi.

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Le directeur national de santé publique réagissait ainsi pour la deuxième fois en deux jours à la polémique sur les émissions d’arsenic de la Fonderie Horne, à Rouyn-Noranda, qui ont augmenté en 2021 par rapport à 2020 et continuent de dépasser largement la norme légale, suscitant inquiétudes et questions dans la population.

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Le DLuc Boileau, directeur national de santé publique

Le DBoileau a réitéré avoir des « signaux clairs » de la multinationale Glencore, propriétaire de la fonderie, pour « proposer des modifications afin de descendre de beaucoup les contaminants émis dans l’air ». « Avec ça, on va être sans doute capables de profiler quelque chose qui sera beaucoup plus raisonnable et acceptable. On va faire ça le plus hâtivement possible », a-t-il dit.

Mercredi, des dizaines de résidants ont participé à une assemblée publique organisée par l’organisme Mères au front et la députée solidaire Émilise Lessard-Therrien, pour dénoncer l’inaction du gouvernement et des dirigeants de la Fonderie Horne.

« Au Québec, c’est 3 nanogrammes, alors pourquoi en Abitibi-Témiscamingue, à Rouyn-Noranda, ça ne serait pas 3 nanogrammes ? », a notamment lancé Gabrielle Bruneau, du groupe Mères au front, à la foule, qui lui a immédiatement répondu par des applaudissements nourris. Son groupe déplore que la Santé publique ne se prononce pas plus clairement sur une cible de réduction qui serait acceptable.

Mais qui fixera le seuil ?

Questionné à ce sujet, le DLuc Boileau affirme qu’il reviendra au ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques d’établir ce seuil, « lorsqu’il disposera du certificat d’attestation ». « L’entreprise va devoir se conformer à ce certificat. Et la discussion, de ce côté, elle se passe en ce moment », a-t-il résumé.

Au cabinet du ministre de l’Environnement, Benoit Charette, on confirme que ce dernier compte bel et bien « adopter une norme qui sera considérée par la Santé publique comme sans danger pour la santé et la sécurité des citoyens de Rouyn », sans toutefois donner d’échéancier précis.

Le DBoileau est d’ailleurs revenu sur des propos qu’il avait tenus la veille, affirmant qu’il reviendrait aussi à la population de choisir. « Je me suis peut-être mal exprimé. […] C’est aux citoyens de décider comment ils veulent composer avec ça. C’est plus ce que je voulais dire », a-t-il dit.

Chose certaine, « il ne faut pas juste baisser à 80 nanogrammes », a dit le directeur national de santé publique. « Il faut que ce soit diminué de beaucoup. Il faut tendre vers le 0 ou le 3. Mais est-ce que c’est réaliste d’y arriver dans un court délai ? Je ne crois pas, industriellement parlant », a-t-il insisté.

Dans un rapport paru mercredi, l’Institut national de santé publique du Québec a confirmé que les fortes concentrations d’arsenic et de cadmium dans l’air de Rouyn-Noranda causent bel et bien un surplus de cas de cancers du poumon. Mais le mystère plane toujours sur les liens de cette contamination avec d’autres problèmes de santé et sur les conséquences des nombreux autres métaux lourds présents dans l’air.

Avec la collaboration de Jean-Thomas Léveillé, La Presse