Les provinces ont décidé d’accepter l’offre du gouvernement Trudeau d’augmenter les transferts en santé de 46,2 milliards de dollars au cours des 10 prochaines années. Mais le front commun qu’elles ont affiché dans ce dossier au cours des deux dernières années continue à battre de l’aile, l’Ontario faisant de plus en plus bande à part.

Au terme d’une réunion du Conseil de la fédération, la première ministre du Manitoba, Heather Stefanson, a annoncé, lundi, que les provinces et territoires acceptaient l’offre d’Ottawa, bien qu’elle demeure « insuffisante ».

« Nous avons eu une très bonne réunion aujourd’hui. Nous avons un front très uni et nous accepterons l’argent du gouvernement fédéral », a affirmé Mme Stefanson, qui préside le Conseil de la fédération cette année. « Mais il faut reconnaître aussi que cette offre ne couvre pas les besoins en financement à long terme pour les systèmes de santé à travers le pays », a-t-elle indiqué dans une entrevue accordée au réseau CBC.

Elle a précisé qu’elle compte envoyer une lettre au premier ministre Justin Trudeau au nom de ses homologues provinciaux pour confirmer la position des provinces.

Le premier ministre du Québec, François Legault, va donc accepter l’offre fédérale en vertu de laquelle le Québec obtiendra quelque 9 milliards de dollars de plus au cours de la prochaine décennie.

Une offre acceptée, bien qu’insuffisante

Mais du même coup, il continue de presser le gouvernement Trudeau de revoir à la hausse sa proposition en matière de financement des soins de santé.

Cette offre, qui a été soumise la semaine dernière par Justin Trudeau, équivaut à une majoration annuelle des transferts de l’ordre de 4,6 milliards de dollars. C’est donc bien en deçà des 28 milliards de dollars que réclamaient les provinces depuis plus de deux ans.

Durant la réunion du Conseil de la fédération, M. Legault a réitéré à ses homologues provinciaux que l’offre du gouvernement fédéral est « décevante, nettement insuffisante », a indiqué son entourage dans une déclaration envoyée à La Presse.

« Elle ne règle en aucun cas l’enjeu du financement des soins de santé à long terme. Malgré le 5 % sur 5 ans pour les transferts canadiens en santé, le fédéral ne contribuera qu’à hauteur de 24 % aux dépenses des provinces. Ça veut dire que plus de 75 % des dépenses seront à la charge des provinces. Le déséquilibre persistera donc », a indiqué son bureau.

« Le gouvernement du Québec souhaite que le financement fédéral soit revu à la hausse. La demande a toujours été et demeure d’atteindre 35 % des coûts de la santé au Canada », a ajouté le bureau de M. Legault.

Des 46,2 milliards de dollars qu’Ottawa a mis sur la table, une somme de 25 milliards sera utilisée pour conclure des ententes bilatérales avec les provinces.

Pour obtenir leur part du gâteau, les provinces devront s’engager à améliorer la façon dont les renseignements sur la santé sont recueillis, partagés, utilisés et communiqués à la population canadienne. Elles devront aussi investir l’argent dans les priorités dites communes en élargissant l’accès à des services de santé familiale, en augmentant l’accès à des services en santé mentale et en réduisant les retards dans les interventions chirurgicales.

Même si les premiers ministres des provinces avaient fixé la barre très haut avant la rencontre d’environ deux heures avec Justin Trudeau, certains premiers ministres ont rapidement signifié leur intention d’accepter la somme supplémentaire que propose d’investir Ottawa.

C’est notamment le cas du premier ministre de l’Ontario, Doug Ford, et de certains premiers ministres des provinces atlantiques, selon des informations obtenues par La Presse.

L’Ontario veut être servi en premier

« Doug Ford nous a clairement fait savoir qu’il veut que l’Ontario soit la première province à conclure une entente bilatérale. Il ne veut pas que l’Ontario soit la dernière, comme ce fut le cas dans le dossier des ententes sur le financement des services de garde », a indiqué une source fédérale digne de foi, qui a requis l’anonymat parce qu’elle n’était pas autorisée à parler publiquement de ce dossier.

Moins de 48 heures après la rencontre des premiers ministres avec Justin Trudeau, M. Ford et la ministre de la Santé de l’Ontario, Sylvia Jones, ont rencontré à Toronto le ministre fédéral de la Santé, Jean-Yves Duclos, et le ministre des Affaires intergouvernementales, Dominic LeBlanc. La rencontre visait à jeter les bases d’une entente bilatérale avec la province.

Lundi, MM. Duclos et LeBlanc, qui sont les ministres responsables de négocier avec les provinces, se trouvaient à Halifax pour rencontrer le premier ministre de la Nouvelle-Écosse, Tim Houston.

Le seul véritable gain qu’ont fait les provinces la semaine dernière touche la hausse annuelle des transferts en santé. Elle sera fixée à 5 % pour une période de cinq ans, comme les provinces le souhaitaient, à compter de 2024-2025. Mais par la suite, la formule actuelle – soit un minimum de 3 % ou un taux équivalent à la croissance du PIB si cette croissansace dépasse le seuil de 3 % – sera de nouveau en vigueur.

Dans la version précédente de ce texte, il a été écrit que la formule de croissance des transferts en santé était un minimum de 3 % ou un taux équivalent à la croissance de l’inflation si celle-ci dépasse le seuile de 3 % Or, il s’agit plutôt de la croissance du PIB. Toutes nos excuses.