(Québec) Le député libéral André Fortin s’inquiète que la réforme Dubé en santé « complique » l’accès aux médicaments non approuvés en imposant « un fardeau incroyable » aux médecins traitants. Des inquiétudes que partage le Regroupement québécois des maladies orphelines (RQMO).

Le député de Pontiac a demandé au ministre Christian Dubé d’abandonner certains changements législatifs de sa réforme touchant la prescription de traitements pour des maladies rares. Selon M. Fortin « le ministre est en train […] de rendre plus complexe l’accès » à des médicaments qui ne sont pas encore approuvés. « On prend le régime actuel et on vient rajouter une couche [pour les médecins] », a déploré le libéral, jeudi.

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Le libéral André Fortin, député de Pontiac, au Salon bleu

M. Fortin était accompagné de Julie Carignan, qui souffre d’une forme rare de cancer des voies biliaires. Celle-ci a pu bénéficier d’une chirurgie et n’a pas eu recours jusqu’à présent à une médication non approuvée, mais elle s’inquiète pour d’autres patients qui en auraient éventuellement besoin. Elle dit aussi craindre que des médecins soient découragés par les démarches à accomplir pour justifier l’utilisation d’un médicament dont l’Institut national d’excellence en santé et en services sociaux (INESSS) aurait refusé de reconnaître la valeur thérapeutique.

L’article 336 du projet de loi 15 prévoit que le comité de pharmacologie d’un hôpital « ne peut accorder son autorisation » pour l’utilisation d’un médicament si l’INESSS a déjà fourni un avis défavorable au ministre. Le cas échéant, le médecin doit alors établir, par écrit, « le potentiel d’efficacité favorable du médicament et d’autre part, les autres motifs justifiant sa demande ».

Au surplus, le médecin « doit soumettre les données scientifiques à l’appui de sa demande démontrant que le médicament qu’il souhaite utiliser pourra combler de façon notable le besoin particulier de l’usager ».

« On vient rajouter un fardeau incroyable au médecin, qui lui est prêt, sur des bases factuelles, avec des études peut-être internationales […], à dire : “Eh bien, moi, je vais l’essayer sur mon patient” », déplore M. Fortin. Le RQMO s’inquiète aussi parce que « la grande majorité des médicaments en maladie rare reçoivent un avis négatif par rapport à la valeur thérapeutique », selon son directeur général, Jonathan Pratt.

Dubé se veut rassurant

Devant les inquiétudes, M. Dubé a déposé un amendement prévoyant une exception « si la prise de médicament ne peut être retardée » sans risque de conduire à « une détérioration irréversible » de l’état du patient. Ces articles sont actuellement examinés dans le cadre de l’étude détaillée du projet de réforme. Ces aménagements sont insuffisants aux yeux de M. Fortin et de M. Pratt.

Selon le RQMO, le critère de « détérioration irréversible » ajoute une « notion d’urgence » et cela pourrait limiter l’accès aux médicaments pour des patients dont la maladie progresse lentement.

Or, Christian Dubé se veut rassurant : « Il faut arrêter de faire peur aux Québécois. Aucun patient ne va perdre l’accès à des médicaments. Notre priorité est de nous assurer de l’accès aux soins, jamais on ne fera de compromis là-dessus », a soutenu le ministre dans une déclaration transmise à La Presse.

« Nous disons maintenant que si un médecin souhaite prescrire un médicament qui a reçu un avis défavorable de l’INESSS, il devra faire un avis écrit […] et il pourra continuer de le prescrire. Ça ne touche pas les médicaments qui n’ont reçu aucun avis. Nous avons aussi déposé un autre amendement cet après-midi qui propose des allègements pour les médecins », a-t-il plaidé.

L’étude détaillée du projet de loi 15, qui vise à rendre le réseau de la santé et des services sociaux plus efficace, reprendra le mardi 3 octobre.