(Québec) Christian Dubé fera des vérifications pour « comprendre exactement » ce qui a mené deux infirmières à claquer la porte de la nouvelle clinique d’IPS dans l’est de Montréal. L’opposition l’accuse de n’avoir fait « aucun suivi » pour prévenir cette situation « honteuse ».

« Je vais être prudent, c’est un peu ce que j’ai dit au premier ministre ce matin. Quand j’ai vu l’article, qui m’inquiétait un peu au début, j’ai parlé au PDG du CIUSSS de l’est de Montréal », a relaté vendredi le ministre de la Santé. « J’ai demandé au PDG : pouvez-vous m’en dire plus sur la situation et pourquoi c’est arrivé ? […] Laissez-moi vérifier ce qui se passe là, parce que notre objectif, c’est de donner du service. »

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Vendredi, Christian Dubé a voulu relativiser les choses.

La Presse a révélé vendredi que les deux seules infirmières praticiennes spécialisées (IPS) à temps complet de la clinique d’infirmières, créée il y a un an, ont claqué la porte en raison d’enjeux touchant « la qualité et la sécurité des soins ». Dans une lettre, les deux démissionnaires font état des « obstacles » rencontrés au cours de la dernière année et du « manque de stabilité » des ressources.

La création de cliniques d’IPS est l’une des mesures phares de la cellule de crise lancée par le ministre de la Santé l’an dernier pour arriver à désengorger les urgences. Déployée dans un temps record, la clinique de l’Est a été la première inaugurée.

Vendredi, M. Dubé a voulu relativiser les choses : « C’est pas beaucoup, c’est deux infirmières sur trois qui sont parties. […] Il y a peut-être un cas à fouiller au niveau de ce qui est arrivé avec ces deux infirmières-là en particulier, et dans les cas personnels, j’ai appris avec l’expérience qu’il faut être prudent », a-t-il dit.

Questionné en Chambre par le chef du Parti québécois, François Legault a tenu des propos similaires : « On a un problème avec deux infirmières, deux infirmières. Puis honnêtement, là, je pense que le chef du PQ devrait faire attention avant d’aller trop loin sur la situation de ces deux infirmières », a mentionné le premier ministre lors de la période des questions, vendredi.

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Paul St-Pierre Plamondon

Paul St-Pierre Plamondon, qui est aussi député de Camille-Laurin dans l’est de Montréal, accuse en revanche le gouvernement d’avoir « fait une annonce en ne faisant aucun suivi et en ne donnant pas les moyens nécessaires pour que cette clinique fonctionne ».

Les IPS ont été laissés à elles-mêmes. Le premier ministre nous a souvent dit de le juger aux résultats. La question au premier ministre : quel devrait être le jugement de la population devant des échecs comme ceux-ci ?

Paul St-Pierre Plamondon, chef du Parti québécois

M. St-Pierre Plamondon a signalé que le taux d’occupation dans les urgences des hôpitaux Maisonneuve-Rosemont et Santa Cabrini était de 135 % mercredi. « Donc, ce n’est pas un problème théorique, là. La clinique d’IPS ne fonctionne plus, ces infirmières-là ont levé la main à plusieurs reprises et je demande qui prend la responsabilité de cette situation-là », a-t-il pesté.

Réactiver la cellule de crise

Le député libéral André Fortin demande pour sa part que le ministre de la Santé réactive la cellule de crise créée en novembre dernier pour identifier des solutions rapides et désengorger les urgences. « On se demande ce qui reste de la cellule de crise », a lancé le député de Pontiac.

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André Fortin

« J’espère que l’idée des cliniques d’IPS, ce n’était pas qu’une saveur du jour. Quand elles ont été annoncées, le ministre Dubé en a fait tout un plat, une solution importante et pérenne pour désengorger les urgences et donner un accès différent à plusieurs patients. […] C’est une chose de faire une annonce et c’en est une autre de s’assurer que ça fonctionne par la suite », a-t-il pesté.

M. Fortin a d’ailleurs talonné un peu plus tôt cette semaine le ministre de la Santé sur la question de la cellule de crise alors que la pression s’accentue sur les urgences avec le retour des virus respiratoires.

Pour le cas de la clinique de l’est de Montréal, M. Fortin demande au ministre d’intervenir. « Ça prend un revirement rapide », a-t-il dit en entrevue.

Pour le solidaire Vincent Marissal, la situation est « honteuse ».

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Vincent Marissal

« C’est honteux qu’on n’ait pas vu ça venir et qu’on ne soit pas capable de maintenir ça parce que c’était une bonne idée, facile à adopter. On n’est pas dans les mégas réformes de structure et en plus, c’est une belle avancée pour les IPS », a déploré M. Marissal. Le député de Rosemont, dans l’est de Montréal, estime que ce « fiasco » est néanmoins « récupérable » si le ministre met du sien.

« Je demande au ministre qu’il délègue un sous-ministre rapidement sur le terrain et qu’on fasse un post-mortem rapide. Pas besoin de prendre six mois. […] Qu’on aille aux sources, qu’on regarde ce qui ne marche pas et qu’on corrige », a-t-il ajouté. M. Marissal affirme par ailleurs qu’il connaît bien le PDG de l’établissement, Jean-François Fortin-Verreault, et ne doute pas qu’il est « de bonne foi ».

Il y a clairement quelque chose qui s’est passé et qui n’a pas marché. OK. Très bien. On appuie sur reset et on relance l’affaire.

Vincent Marissal, député de Québec solidaire

Selon le dernier budget présenté par le ministre Eric Girard, Québec prévoit créer 23 nouvelles cliniques d’IPS d’ici cinq ans, dont 6 en 2023, pour accroître l’accès à la première ligne. La création de ces cliniques nécessitera des investissements totaux de 395 millions d’ici 2027-2028.

Avec Hugo Pilon-Larose