Une nouvelle mission privée américaine a réussi son lancement tôt jeudi matin et est en bonne voie d’atteindre la Lune. Ce succès suit l’échec de la mission privée Peregrine en janvier.

Dans le cadre de cette mission, IM-1, la société aérospatiale Intuitive Machines, de Houston, a lancé l’atterrisseur Odysseus, qui transporte avec lui sept caméras de la société ontarienne Canadensys. « Nous avons hâte de voir les images des trois systèmes de vision que nous avons sur cette mission », a déclaré à La Presse Christian Sallaberger, PDG et fondateur de Canadensys.

Odysseus doit se poser sur la Lune le 22 février. La mission Peregrine a connu une fuite de carburant peu après son lancement et n’a jamais atteint l’orbite lunaire. Deux atterrisseurs lunaires privés, l’israélien Beresheet en 2019 et le japonais Hakuto-R en 2022, se sont rendus jusqu’à la Lune, mais ont raté leur alunissage.

Deux caméras de Canadensys étaient à bord de Hakuto-R. « Nous avons des images des orbites lunaires », dit M. Sallaberger. L’objectif des caméras sur la sonde japonaise était de tester la technologie de compression de Canadensys.

« Nos caméras lunaires se distinguent non seulement par leur haute résolution et leur robustesse, qui leur permet de survivre aux radiations et aux variations de température de 300 °C, mais aussi par leur ordinateur puissant, dit M. Sallaberger. Nous pouvons compresser les images pour les envoyer avec peu de bande passante, puis sélectionner des versions plus grandes des images les plus intéressantes. »

PHOTO FOURNIE PAR CANADENSYS

La Terre croquée par les caméras de Canadensys sur Hakuto-R, avec à droite la fusée de SpaceX

Une image de la Terre envoyée par M. Sallaberger permet ainsi de voir la fusée SpaceX qui avait envoyé Hakuto-R dans l’espace.

Observatoire lunaire

Deux des sept caméras de Canadensys serviront à tester le prototype de l’Observatoire lunaire international (ILO-X), un projet d’une ONG regroupant des astronomes de plusieurs pays. L’une des caméras a un champ étroit pour observer la Voie lactée à l’abri de la lumière du Soleil, tandis que l’autre a un champ large pour bien observer les alentours sur la Lune. « L’observatoire comme tel doit être lancé dans deux ans, dit M. Sallaberger. Le plan est d’en avoir deux pour qu’il y en ait toujours un d’opérationnel. »

PHOTO FOURNIE PAR CANADENSYS

L’alunisseur Odysseus avant son décollage avec les deux caméras du prototype de l’Observatoire lunaire international

Les deux caméras du prototype ILO-X sont installées sur Odysseus.

Trois autres caméras sont installées sur une mini-sonde EagleCam, qui seront larguées par Odysseus peu avant l’alunissage, à 30 mètres d’altitude, et filmeront l’arrivée de l’atterrisseur sur le sol lunaire. « L’EagleCam est un cube avec des caméras 180 degrés de chaque côté, dit M. Sallaberger. L’objectif est qu’elles survivent au choc de leur alunissage sans propulsion. L’une d’entre elles sera forcément tournée vers le haut. » L’EagleCam est un projet de l’Université aéronautique Embry-Riddle en Floride. Deux autres constructeurs de caméras participent à l’EagleCam.

PHOTO FOURNIE PAR CANADENSYS

Une caméra comme celles qui seront installées sur la sonde EagleCam

Les deux dernières caméras ont un champ à 360 degrés.

Canadensys fournira aussi une caméra multispectre pour une autre mission d’Intuitive Machine, qui inspectera en 2025 une région de la Lune présentant des anomalies magnétiques, appelée Reiner Gamma. Et un véhicule astromobile (rover) financé par l’Agence spatiale canadienne (ASC), qui doit partir pour la Lune en 2026 ou plus tard, sera équipé de caméras de Canadensys.

Intuitive Machines recevra plus de 700 millions de dollars de la NASA pour trois missions lunaires avec son modèle d’atterrisseur Nova-C, y compris celle-ci. Odysseus doit tester plusieurs systèmes essentiels à une base lunaire, dont un système de navigation et une jauge de carburant en apesanteur.

Nova-C utilise un système de propulsion inédit au méthane, qui nécessite des températures particulièrement basses. Il s’agit d’une technologie développée par la NASA en 2010 dans le cadre d’un projet appelé Morpheus. L’avantage du méthane est qu’il pourrait être fabriqué sur la Lune à partir de glace.

Regardez le déploiement d’Odysseus en orbite (en anglais)

Les missions lunaires depuis un an

La mission indienne Chandrayaan-3, qui a décollé en juillet 2023, réussit en août le premier alunissage près du pôle Sud.

La mission russe Luna 25 rate son alunissage et s’écrase sur la Lune en août 2023.

La mission privée américaine Peregrine, lancée en janvier 2024, connaît une fuite de carburant dès son arrivée en orbite terrestre et échoue à atteindre à la Lune.

La mission japonaise SLIM, lancée en septembre 2023, réussit partiellement son alunissage en janvier 2024 et déploie le premier véhicule astromobile « rebondisseur »

En savoir plus
  • 300 millions CAN
    Somme accordée à des firmes privées par l’Agence spatiale canadienne en vertu du Programme d’accélération de l’exploration lunaire
    Source : Agence spatiale canadienne
    1,2 milliard CAN
    Budget du rover lunaire canadien
    Source : Agence spatiale canadienne