Le ministre de l’Économie et de l’Innovation du Québec ferme la porte à la demande des organisations patronales de rehausser les seuils d’immigration dans le but de soulager la pénurie de main-d’œuvre.

« Il y a 240 000 emplois non comblés au Québec. On a des sources de talents pour les combler et des mesures pour inciter ces gens à aller sur le marché du travail. Il y a 200 000 jeunes qui ne sont ni aux études ni en emploi ; il y a 180 000 chômeurs et il y a 80 000 travailleurs de 60 ans et plus qui pourraient s’ajouter à la force de travail en ramenant le taux d’emploi des travailleurs âgés au niveau de [celui de] l’Ontario », a dit le ministre dans son allocution vendredi midi devant la Chambre de commerce du Montréal métropolitain.

Il est aussi possible d’augmenter l’immigration temporaire, valide pour deux ans, qui, elle, n’a pas de limite, a fait valoir le ministre. En plus, les dossiers de 50 000 travailleurs qualifiés traînent toujours au fédéral, a-t-il ajouté.

Je rejette l’adéquation qui est faite entre la pénurie de main-d’œuvre et l’immigration non contrôlée de l’immigration permanente. Il y a quelques jours, le Conseil du patronat a demandé que le seuil soit porté à 80 000 personnes. Ce n’est pas souhaitable et ça n’arrivera pas.

Pierre Fitzgibbon, ministre de l’Économie du Québec

« Le bassin est là. Il y a des gens disponibles », a-t-il ajouté dans un point de presse qui a suivi le déjeuner-causerie.

Sur les 240 000 postes vacants, 87 %, soit environ 210 000 postes, ne demandent pas de diplôme universitaire. « On peut donc requalifier nos jeunes qui ont un diplôme secondaire ou une technique relativement rapidement », a indiqué M. Fitzgibbon.

« Notre collègue au Travail, le ministre Jean Boulet, a à sa disposition 2,9 milliards dans la mise à jour économique de novembre dernier pour s’attaquer à la requalification de la main-d’œuvre, a poursuivi le ministre de l’Économie. Il y a 1,4 milliard dans le dernier budget. Les sommes d’argent allouées au ministère du Travail et de l’Emploi sont phénoménales. »

Avant l’arrivée au pouvoir du gouvernement de la Coalition avenir Québec (CAQ), la province recevait 50 000 immigrants permanents par an. La CAQ a abaissé le seuil à 40 000 avant de le remonter à 50 000. La pandémie a frappé. L’immigration est tombée. En 2022, le gouvernement québécois vise l’accueil de 70 000 personnes pour combler le retard, pour ensuite revenir à sa cible de 50 000 admissions annuelles.

Interrogé à la sortie du déjeuner, le président de la Chambre de commerce, Michel Leblanc, ne semblait pas convaincu de la démonstration du ministre.

L’intégration de la force de travail disponible, c’est de la vertu. On est d’accord. La réalité, c’est que les besoins du marché du travail sont variés. Ceux qui sont en marge du marché du travail, de toute évidence, ne comblent pas les besoins actuels.

Michel Leblanc, président de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain

« Du côté des travailleurs temporaires, il y a un enjeu de délai », estime M. Leblanc. « J’ai des gens d’affaires qui me disent qu’après avoir trouvé leur candidat à l’étranger, c’est une affaire de quatre à six mois ou plus pour les faire venir. Il y a un enjeu de processus. Pour ce qui est des immigrants économiques, les seuils sont importants, quoi qu’on en dise. Je suis d’accord avec mes collègues que 50 000 immigrants, c’est trop bas. »

Relance de l’investissement direct étranger

Plus tôt en matinée, M. Fitzgibbon a assisté au dévoilement des résultats annuels de la filiale Investissement Québec International (IQI), chargée de démarcher les investissements directs étrangers (IDE) et d’accompagner les entreprises d’ici dans leurs ventes hors Québec.

Sur ces deux fronts, le président d’IQI, Hubert Bolduc, s’est dit en mesure d’atteindre les objectifs fixés pour 2022-2023. Au chapitre de l’IDE au Québec, l’objectif de hausser de 50 % la somme des investissements est pratiquement atteint. La somme devrait dépasser les 5,6 milliards en 2022-2023 en incluant les résultats des agences partenaires comme Montréal International.

PHOTO CATHERINE LEFEBVRE, COLLABORATION SPÉCIALE

Hubert Bolduc, président d’Investissement Québec International

Au cours de l’exercice financier terminé le 31 mars 2022, les activités de prospection et d’accompagnement d’IQI ont permis de concrétiser 121 projets et de générer un total de 4,6 milliards d’investissements sur le territoire québécois.

Au chapitre des exportations, l’objectif est de doubler les ventes hors Québec des sociétés clientes d’IQI, de 1 à 2 milliards en ventes fermes. L’objectif est déjà atteint.

À terme, le gouvernement Legault veut augmenter les exportations de 15 à 20 milliards, un objectif ambitieux qui deviendra atteignable, souhaite le grand patron d’Investissement Québec, Guy Leblanc, une fois la filière batterie bien en place, ce qui devrait être chose faite d’ici environ cinq ans.

IQI regroupe 140 personnes sur les 1090 travailleurs que compte Investissement Québec, bras investisseur du gouvernement provincial. Une centaine d’embauches additionnelles sont prévues, entre autres, dans le domaine technologique. IQI recherche aussi des expertises pointues dans le placement privé.