Vin embouteillé au Québec, vin origine Québec et vin préparé au Québec. Lequel de ces trois produits est 100 % local ? Ces différents identifiants utilisés par la SAQ pour classer les bouteilles entretiennent la confusion auprès des consommateurs, dénonce le Conseil des vins du Québec (CVQ).

Il accuse dans la foulée certaines entreprises dont les produits viticoles ne sont pas entièrement élaborés ici de jouer, à tort, la carte de l’achat local. Son président, Louis Denault, va jusqu’à parler de « fraude ».

« Ceux qui utilisent par la bande l’étiquette “Vin du Québec”, c’est un peu de la fraude », a-t-il lancé sans détour, lors de l’assemblée générale de l’association, jeudi à Drummondville.

Retour en arrière. Il y a quelques mois, des vins de la gamme Pas Sages, élaborés avec des vignes canadiennes, mais embouteillés à Rougemont et dont les étiquettes ont été créées par des artistes d’ici, se sont retrouvés à la SAQ sur les tablettes de la section réservée aux vins québécois, celle identifiée avec le pictogramme Origine Québec.

« On est encore montés au créneau. On a pété un plomb », a raconté en entrevue M. Denault, ajoutant dans la foulée avoir fait part à plusieurs reprises à la société d’État de son mécontentement par rapport à la présence de ces différents identifiants, tous affublés d’une fleur de lys.

Le consommateur voit Québec partout. À un moment donné, c’est comme si tout était local. [Même chose à l’épicerie] où les gens pensent que les vins Bù – de la sommelière Jessica Harnois – sont des vins québécois. C’est tentant d’aller jouer là. C’est vendeur, le local.

Matthieu Beauchemin, propriétaire du Domaine du Nival, à Saint-Louis

Les vins commercialisés par Stefano Faita, connu pour ses émissions de télévision, ses sauces et ses restaurants, peuvent susciter le même questionnement concernant leur origine. Ceux-ci sont produits en Italie.

Entre 2017 et 2022, le nombre de bouteilles de vins québécois vendues (SAQ, épiceries, vignoble, restaurants) a augmenté de 65 %.

« Plus on va être populaires, plus certaines entreprises vont vouloir se coller à la marque », souligne pour sa part M. Denault. Mais celui-ci est catégorique : « Un vin du Québec, c’est un vin dont le raisin a été cultivé au Québec. Il n’y a pas d’autre chose que ça. »

Éventuellement, le président du CVQ souhaite que seuls les vins authentifiés Vin du Québec avec une indication géographique protégée (IGP) aient droit à un identifiant. « Débarquez-moi tout le restant. »

Réaction rapide

À la SAQ, Josée Dumas, directrice de la gestion de l’offre et de la mise en marché, assure avoir réagi rapidement lorsqu’elle s’est aperçue que les vins Pas Sages s’étaient retrouvés dans la mauvaise section. « On a agi rapidement. On a avisé les succursales », a-t-elle indiqué. Mme Dumas était également présente à l’assemblée générale des vignerons.

« On a de l’éducation à faire aussi avec nos employés en succursale, a-t-elle reconnu. C’est facile de se tromper, de se mélanger. Il faut les éduquer sur le vin québécois et sur la façon de [placer] les produits pour éviter des frustrations pour des gens qui élaborent un produit du raisin à la bouteille. »

L’évènement a donné un argument supplémentaire à M. Denault. « On leur a dit : voyez-vous, même vos employés trouvent que c’est embêtant. Imaginez le consommateur dans tout ça. »

Du côté de Vins Arterra Canada, l’entreprise – dont le siège social est à Mississauga, en Ontario – qui commercialise notamment les vins Pas Sages ainsi que les vins Bù de Jessica Harnois, on admet que les différents « identifiants se ressemblent ».

La SAQ doit poursuivre ce travail d’éducation pour éviter cette confusion.

Isabelle Meplon, chef principale des relations publiques pour Vins Arterra Canada

En ce qui concerne les vins Bù de la populaire sommelière, Mme Meplon estime que l’origine de ceux-ci – France, Italie, Canada et Espagne – est inscrite bien en évidence sur la bouteille. Il n’y a donc aucune confusion.

Par contre, en mettant l’accent sur son embouteillage fait au Québec, la gamme de vins Pas Sages, avec ses étiquettes conçues par des artistes d’ici, joue-t-elle sur la fibre locale ? Chose certaine, sur le site de l’entreprise, on les décrit ainsi : « Issue de cépages qui s’épanouissent sur les sols canadiens et embouteillés à Rougemont, au Québec, la gamme de vins Pas Sages exprime son caractère québécois dans et sur chaque bouteille. »

À cela, Mme Meplon répond que l’idée est plutôt de mettre l’accent sur le fait qu’Arterra « soutient l’économie locale » en employant notamment 72 personnes à son usine de la Montérégie.

Les vins Pas Sages ne sont toutefois pas des vins québécois, selon elle. Sa définition : « C’est un vin d’ici. C’est du vin canadien embouteillé au Québec. »

Identifiants Québec à la SAQ

Comment s’y retrouver ?

  1. Origine Québec : produit élaboré avec des ingrédients cultivés ici
  2. Préparé au Québec : conçu avec des produits d’ici et d’ailleurs
  3. Embouteillé au Québec : assemblé et mis en bouteille dans une entreprise locale

Source : site internet de la SAQ