(Calgary) Certains producteurs de pétrole et de gaz naturel de l’Alberta arrêtent temporairement leur production, alors que plus de 100 incendies de forêt font rage dans la province productrice d’énergie.

Avec la mise en place d’un état d’urgence provincial, les sociétés pétrolières et gazières actives dans l’ouest et le nord-ouest de la province ont évacué leurs travailleurs et interrompu leurs activités.

Crescent Point Energy, qui exerce d’importantes activités dans le gisement de pétrole léger de Kaybob Duvernay, a indiqué lundi avoir temporairement arrêté sa production par l’équivalent d’environ 45 000 barils de pétrole par jour dans les zones touchées.

« Cette mesure de précaution est prise par l’entreprise pour protéger la sécurité de son personnel, de la communauté, de l’environnement et de ses actifs », a expliqué Crescent Point dans un communiqué de presse.

Vermilion Energy a indiqué avoir temporairement interrompu la production de l’équivalent d’environ 30 000 barils de pétrole par jour, tandis que Paramount Resources a indiqué dimanche que ses activités dans les régions de Grande Prairie et de Kaybob, en Alberta, étaient affectées et qu’elle avait temporairement réduit sa production de l’équivalent d’environ 50 000 barils de pétrole par jour.

Tourmaline Oil, le plus grand producteur de gaz naturel du Canada, a indiqué lundi que les membres de son personnel et leurs familles avaient été évacués en toute sécurité de certaines installations et maisons dans la région d’Edson. Tourmaline a fermé neuf installations de traitement de gaz naturel dans la région.

Cenovus Energy a pour sa part indiqué dans un courriel qu’elle avait arrêté la production en toute sécurité et fermé des usines dans certains secteurs de ses activités conventionnelles.

L’exploitant de pipelines TC Énergie a indiqué avoir fermé deux stations de compression sur son système Nova Gas Transmission, tandis que Trans Mountain Corporation a déployé un système de gicleurs périmétriques à sa station de pompage Edson à titre de mesure de protection.

Le pipeline Trans Mountain lui-même et son projet d’expansion, en cours de construction, n’ont pas été touchés.

« Un risque permanent pour l’industrie »

La situation des incendies de forêt en Alberta évolue rapidement et il n’y a aucune estimation officielle du volume de la réduction de production de pétrole et de gaz naturel, a observé Rory Johnston, analyste énergétique établi à Toronto et fondateur du bulletin Commodity Context.

Bien qu’il soit possible que le nombre soit déjà aussi élevé que l’équivalent de 185 000 barils de pétrole par jour, a souligné M. Johnston, c’est un impact beaucoup plus faible que celui ressenti lors de l’incendie de Fort McMurray, en 2016.

Cet évènement a entraîné une baisse temporaire de 14 % des exportations de pétrole brut de l’Alberta, car les installations de sables bitumineux ont dû être mises hors service et n’ont pas été entièrement restaurées pendant plusieurs mois.

Selon la Régie de l’énergie du Canada, l’incendie de forêt de Fort McMurray en mai 2016 a entraîné des pertes de production de sables bitumineux qui ont pu atteindre un million de barils par jour au plus fort de la catastrophe.

« Jusqu’à présent, cela est considéré comme temporaire – ce n’est pas une reprise de 2016, a souligné M. Johnston. Mais c’est très sec, et il y a des incendies de forêt partout. Rien ne dit que cela n’empirera pas. »

M. Johnston a ajouté qu’il croyait que les incendies de forêt étaient en train de devenir un risque important pour le secteur canadien du pétrole et du gaz naturel.

« Particulièrement alors que l’industrie pétrolière continue de croître, de sorte qu’elle couvre une zone de plus en plus large, et que l’activité des incendies de forêt continue d’augmenter », a-t-il souligné.

« Je pense qu’une partie de cela constituera un risque permanent pour l’industrie canadienne. »

Parmi les autres sociétés qui ont arrêté la production se trouvaient notamment Pipestone Energy, qui a temporairement réduit d’environ 20 000 barils par jour sa production dans la région de Grande Prairie, et Kiwetinohk Energy, qui a arrêté la majorité de ses activés à Placid « en réponse à des interruptions de tierces parties en aval », qui se trouvent à proximité des incendies de forêt.

La plupart des entreprises concernées n’ont signalé aucun dommage à leur infrastructure ou à leurs actifs jusqu’à présent.

Vermilion Energy a indiqué que son évaluation à ce jour faisait état de dommages « minimes » à son infrastructure clé.

On ne sait pas quand les compagnies pétrolières et gazières pourront reprendre leurs activités dans les zones touchées. L’analyste Jason Bouver, de la Banque Scotia, a indiqué à ses clients, dans une note transmise lundi matin, que Crescent Point à elle seule pourrait voir ses flux de trésorerie par action en 2023 diminuer d’environ 4 % en raison des effets des incendies, en supposant que la production de l’entreprise à Kaybob Duvernay soit interrompue pour le reste du deuxième trimestre.

Environ 29 000 personnes ont été évacuées en raison des incendies de forêt en Alberta.

La première ministre albertaine, Danielle Smith, a décrété samedi un état d’urgence à l’échelle de la province.