(Calgary) Certaines sociétés pétrolières et gazières de l’Alberta interrompent de nouveau leur production, alors que la sécheresse et la chaleur ont aggravé la situation des incendies de forêt dans la province productrice d’énergie.

La volatilité causée par les vents changeants et les conditions de température changeantes, combinée à la taille même de la zone géographique touchée, rend toute lecture de la situation difficile, même pour les entreprises qui sont directement touchées, a souligné le président et chef de la direction de Whitecap Ressources, Grant Fagerheim.

« Nous essayons de rester au-dessus de la mêlée. Nous sommes en communication constante avec nos superviseurs sur le terrain, a expliqué M. Fagerheim. Mais nous vivons en temps réel en ce moment. »

Whitecap a des activités de forage dans le centre et le nord de l’Alberta et dans le nord-est de la Colombie-Britannique, et M. Fagerheim a passé les 10 derniers jours à évaluer et à réagir à mesure que les incendies existants se déplacent et se propagent et que de nouveaux incendies apparaissent à d’autres endroits.

La société a d’abord décidé, le 5 mai, de réduire temporairement sa production de 12 000 barils par jour, puis a fait passer cette réduction à 40 000 barils dimanche dernier. Elle a redémarré certaines de ses activités dans la dernière semaine, alors que des températures plus fraîches et des pluies ont apporté un répit dans certaines régions, mais les conditions se sont détériorées de nouveau mardi.

La réduction de production de la société est maintenant d’environ 27 000 barils par jour, et M. Fagerheim estime que des centaines d’employés et entrepreneurs de la société ont évacué les sites ou sont prêts à le faire.

D’autres employés travaillent de longues journées dans des conditions chaudes et enfumées pour assurer la sécurité des infrastructures et des équipements. Près de la ville de Fort St. John, en Colombie-Britannique, où une alerte d’évacuation a été lancée, les activités de l’entreprise fonctionnent grâce à une alimentation de secours, car plus de 100 poteaux électriques ont brûlé, a précisé M. Fagerheim.

Bien qu’aucune infrastructure de l’entreprise n’ait été endommagée, a noté M. Fagerheim, dans certaines régions, les flammes se sont produites « à l’intérieur d’une emprise routière » des activités de Whitecap.

« Les gens sont fatigués. C’est fatigant. Ils essaient de prendre soin de leur famille, de faire sortir leur famille de chez eux, dans des logements temporaires, a-t-il expliqué. Notre priorité numéro un est la sécurité de notre personnel, de nos entrepreneurs et de leurs familles. »

L’Alberta compte actuellement 87 incendies de forêt actifs en Alberta, dont 24 qui ne sont pas maîtrisés.

Prévisions de production revues à la baisse

Mardi, Crescent Point Energy a indiqué avoir de nouveau fermé l’intégralité de sa production dans la région de Kaybob Duvernay, représentant l’équivalent de 45 000 barils de pétrole par jour, après avoir précédemment réactivé une partie de cette production la semaine dernière.

Les autres producteurs touchés comprennent Paramount Resources – qui a temporairement réduit sa production d’environ 45 000 barils par jour dans les régions de Grande Prairie et de Kaybob, en Alberta – et Baytex Energy, qui a réduit la sienne d’environ 24 000 barils par jour en raison de ses propres fermetures, ainsi que d’interruptions de tiers.

Lundi, Vermilion Energy a abaissé ses prévisions de production pour le deuxième trimestre en raison de la situation des incendies de forêt, indiquant s’attendre désormais à ce que la production au deuxième trimestre de l’exercice soit en moyenne entre 80 000 barils par jour et 83 000 barils par jour, contre une prévision précédente de 84 000 barils par jour à 86 000 barils par jour.

L’analyste torontois Rory Johnston, spécialisé en énergie et fondateur du bulletin Commodity Context, a indiqué que les entreprises touchées par les incendies étaient beaucoup plus petites que les énormes sociétés de sables bitumineux qui ont été touchées par l’incendie de Fort McMurray en 2016.

Cet évènement avait entraîné une baisse temporaire de 14 % des exportations de pétrole brut de l’Alberta, car les installations de sables bitumineux avaient dû être mises hors service et ont dû attendre plusieurs mois avant d’être entièrement restaurées.

Mais M. Johnston a ajouté que même si les prix du pétrole et du gaz naturel n’étaient pas encore très touchés par la situation, plus la situation d’incendie actuelle se prolonge, plus il est probable que les entreprises concernées verront leurs résultats du deuxième trimestre en souffrir.

« Mon sentiment général est que même si cela ne sera pas encore important pour le marché, cela pourrait être important pour certains de ces producteurs », a-t-il estimé.

Il a ajouté que l’augmentation de l’activité des incendies de forêt dans les années à venir ajoutera plus de volatilité au secteur canadien de l’énergie.

« Les incendies de forêt se transforment en un risque pérenne très imprévisible pour le secteur », a souligné M. Johnston.