(Londres) L’organisme qui gère les fonds de l’Église d’Angleterre a annoncé jeudi exclure toutes les grandes sociétés pétrolières et gazières de son portefeuille d’investissement, estimant qu’elles n’en faisaient pas assez face à la crise climatique.

Les « Church Commissioners for England », qui gèrent le fonds de 10,3 milliards de livres (17,3 milliards de dollars CA) de dotations pour l’Église d’Angleterre, avaient déjà exclu 20 sociétés de sa liste d’actifs financiers il y a deux ans.  

Jeudi, l’organisme a annoncé qu’il renonçait à « toutes les sociétés pétrolières et gazières restantes » et à d’autres dans le secteur si elles n’atteignent pas d’ici à la fin de l’année les objectifs fixés par les accords de Paris de 2015 sur le climat, ce qui est loin d’être le cas.  

L’Église va donc se défaire de ses participations dans BP, Ecopetrol, Eni, Equinor, ExxonMobil, Occidental Petroleum, Pemex, Repsol, Sasol, Shell et Total.

Aucune de ces entreprises « n’est alignée sur les objectifs de l’Accord de Paris sur le climat », peut-on lire dans le communiqué de l’Église d’Angleterre.

Justin Welby, l’archevêque de Canterbury et chef spirituel des anglicans, a estimé que les chrétiens avaient « le devoir de protéger la création de Dieu ».  

« Onde de choc »

« Les entreprises du secteur de l’énergie ont la responsabilité particulière de nous aider à réaliser la transition vers l’économie à faible émission de carbone », a affirmé l’archevêque, lui-même ancien dirigeant d’une entreprise pétrolière.  

« Des progrès ont été réalisés, mais ils sont loin d’être suffisants », a-t-il dit. « L’Église suivra non seulement la science, mais aussi notre foi, qui nous appellent toutes deux à œuvrer pour la justice climatique. »

Alan Smith, qui fait partie des commissaires chargés de gérer les fonds de l’Église, a souligné que désinvestir dans ces entreprises n’avait pas été une décision « prise à la légère ». Il a assuré que l’Église était prête à revenir sur sa décision en cas de respect des critères demandés.

Le révérend Darrell Hannah, qui préside « Operation Noah », groupe qui faisait pression pour une telle décision de l’Église d’Angleterre, a estimé que celle-ci envoie « une onde de choc à travers le monde » et devrait encourager beaucoup d’autres à faire de même.

Saluant le fait que l’Église d’Angleterre ait « clairement perdu la foi en la capacité de Shell et les autres géants pétroliers de se racheter », Greenpeace UK a appelé investisseurs et gouvernement à faire leur examen de conscience.

« Laissées à elles-mêmes, ces entreprises peuvent très bien laisser se déchaîner l’enfer sur terre pour encaisser leur 30 pièces d’argent », référence au prix de la trahison de Judas, a déclaré dans un communiqué Charlie Kronick, conseiller au sein de l’organisation écologiste.

Le gouvernement devrait « cesser de dérouler le tapis rouge » aux géants des énergies fossiles « tout en arrêtant dès maintenant d’accorder des licences pour de nouveaux projets pétroliers et gaziers », a-t-il ajouté.

L’association Christian Aid a quant à elle vu dans cette décision un « réquisitoire accablant quant au mal que ces entreprises font au monde ».