Avant même le début des travaux d’expansion à Contrecœur, l’Administration portuaire de Montréal (APM) voit son président-directeur général Martin Imbleau prendre le large, a appris La Presse. Il s’installe aux commandes de la filiale de VIA Rail qui gère le développement du train à grande fréquence (TGF) entre Québec et Toronto.

Selon nos informations, la nouvelle sera annoncée cette semaine, peut-être même ce lundi. Il n’a pas été possible de joindre M. Imbleau, actuellement en vacances à l’extérieur. Au sein de l’APM, on ignorait qu’il se préparait à quitter le navire après un mandat de moins de trois ans. Le gouvernement Trudeau n’a pas commenté.

La nomination du principal intéressé à la tête de la filiale de VIA Rail survient quelque deux semaines après le dévoilement du nom des trois consortiums qui pourront soumissionner sur le projet de corridor ferroviaire qui doit desservir des villes comme Québec, Montréal et Toronto. VIA TGF fonctionnera indépendamment de VIA Rail et agira comme bureau de projet. Elle sera notamment impliquée dans les travaux de conception technique et d’ingénierie, et mènera des consultations auprès du public, en plus de travailler avec le partenaire privé qui aura été choisi.

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, ARCHIVES LA PRESSE

Martin Imbleau est président-directeur général de l’Administration portuaire de Montréal depuis 2021.

Pour le port de Montréal, le départ de M. Imbleau survient à un moment plus délicat. Celui-ci a déjà indiqué que les volumes étaient en baisse en ce qui a trait au niveau des conteneurs depuis le début de l’année en raison du contexte économique.

Contrecœur

De plus, l’APM, une agence fédérale, n’a toujours pas finalisé ses négociations avec le gouvernement Trudeau dans le but d’obtenir du financement supplémentaire afin d’absorber les dépassements de coûts du projet de terminal portuaire de Contrecœur, en banlieue sud de Montréal.

L’inflation fait en sorte que ce chantier coûtera beaucoup plus cher que prévu. Le budget oscillant entre 750 et 950 millions, évoqué jusqu’en 2022, est chose du passé. En citant des sources gouvernementales, The Globe and Mail a évoqué une facture pouvant atteindre 1,4 milliard. Le quotidien torontois avançait que le port de Montréal souhaitait obtenir une aide de 150 millions du fédéral. Il n’a pas été possible de confirmer ces informations.

M. Imbleau et son équipe avaient au moins réussi à convaincre le gouvernement Legault de délier les cordons de la bourse. Dans son plus récent budget, déposé le 21 mars dernier, Québec avait débloqué une somme supplémentaire de 75 millions, ce qui porte sa contribution totale à 130 millions.

Le départ de M. Imbleau sera annoncé alors que l’on ignore encore l’identité du partenaire privé de l’APM dans le dossier de Contrecœur. Cette annonce est attendue d’ici la fin de l’été. En principe, ce partenaire privé devra participer au montage financier du projet Contrecœur, à l’instar de l’APM. Le changement attendu à la tête de l’agence fédérale ne devrait pas faire ralentir ce processus, croit Jacques Roy, professeur de gestion des opérations et de la logistique à HEC Montréal.

M. Imbleau est la figure principale du projet, mais derrière, il y a aussi beaucoup de personnes impliquées dans le projet Contrecœur et qui sont au fait de tout ce qu’il faut savoir. Je ne penserais pas que cela [son départ] refroidisse le privé.

Jacques Roy, professeur de gestion des opérations et de la logistique à HEC Montréal

De l’expérience

Avocat de formation, M. Imbleau est arrivé en poste le 1er janvier 2021 à l’APM après un bref passage de 10 mois chez Hydro-Québec. Auparavant, il avait passé deux décennies chez Énergir, autrefois appelée Gaz Métro. M. Imbleau possède donc de l’expérience dans les sociétés de services publics. Cette expérience lui servira chez VIA TGF, où il deviendra le visage d’un projet autour duquel plusieurs questions sont toujours sans réponse.

Si l’on a une idée des consortiums qui convoitent le projet de TGF, on ignore toujours si la grande vitesse – des trains capables de rouler à des vitesses supérieures à 250 km/h – sera intégrée au réseau. Si c’est le cas, il n’y a aucun indice sur les tronçons où elle serait déployée.

Pour l’instant, le gouvernement Trudeau et VIA TGF préfèrent demander au secteur privé de proposer un scénario de « référence » et une option plus « ambitieuse », dans laquelle il sera possible de cibler des tronçons où la vitesse des trains sera supérieure à 200 km/h. Après avoir évoqué une fourchette de 6 à 12 milliards avant de dire que cette prévision n’était plus exacte, Ottawa ne veut plus s’avancer sur un budget potentiel pour le moment.

Le fédéral a cependant été moins discret en ce qui a trait à un train à grande vitesse (TGV), qu’il juge trop onéreux. Un tel projet – réclamé par le milieu des affaires et plusieurs acteurs de la sphère politique au Québec – pourrait coûter jusqu’à 80 milliards, selon des données gouvernementales récemment fournies à La Presse.

Lisez « Un TGV coûterait 80 milliards, dit Ottawa »

L’Administration portuaire de Montréal, qu’est-ce que ça fait ?

Il s’agit d’une agence fédérale qui construit et entretient les installations portuaires. C’est aussi elle qui les loue à des entreprises d’arrimage, soit des transporteurs maritimes. Ce n’est pas l’APM qui emploie, par exemple, les débardeurs qui sont chargés de transborder les marchandises. Ceux-ci sont embauchés par l’Association des employeurs maritimes.

En savoir plus
  • 2026
    Année où la mise en service graduelle du terminal de Contrecœur doit débuter
    Source : ADMINISTRATION PORTUAIRE DE MONTRÉAL
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    Nombre de conteneurs « équivalent vingt pieds » qui pourront être accueillis au terminal portuaire de Contrecœur
    Source : administration portuaire de Montréal