Cette semaine, l’entrepreneure et autrice Mériane Labrie, alias Madame Labriski, dans la liste des Étoiles montantes du Palmarès des femmes en affaires et nommée dans le top 100 des entrepreneures qui changent le monde, répond à nos questions sur le leadership

Vous aurez bientôt une trentaine de produits Madame Labriski dans les épiceries Sobeys (IGA, Rachelle Béry) et un cinquième livre de recettes vient de s’ajouter aux autres vendus à 375 000 exemplaires au Québec. Aviez-vous prévu vous lancer en affaires ?

Aucunement. Je me voyais plutôt avoir une grande carrière de publicitaire, mais il y a des pulsions en moi qui m’ont fait bifurquer. Quand mon dernier employeur, une agence de publicité, a fait faillite, j’ai commencé par créer un blogue pour répondre à mes besoins de femme, de mère et d’athlète frustrée face à l’offre alimentaire. Mais j’ai vu grand. Je me suis inspirée des histoires à succès à l’américaine, comme celle de Julia Powell, qui a donné le film Julie and Julia.

Je suis une publicitaire, donc dès le départ, je voulais créer une personnalité de marque forte avec une touche d’humour. Donc, Labrie est devenu Labriski, parce qu’il y avait une petite touche internationale et que Madame donnait l’aura d’une Madame polonaise qui fait des biscuits tous les jours pour ses petits enfants qui reviennent de l’école. D’ailleurs, tout le monde pense que je viens de l’Europe de l’Est, mais je viens de Saint-Agapit de Lotbinière !

IMAGE FOURNIE PAR LES ÉDITIONS DE L'HOMME

Et votre modèle d’affaires ? Comment l’avez-vous conçu ?

Je l’ai revu plusieurs fois avec mon mentor. C’est déstabilisant pour certains de voir que la société change, qu’on évolue et qu’il y a de nouveaux modèles qui performent à merveille. Ça va avec la puissance du numérique. Je me suis dit : pourquoi une entrepreneure qui choisit un modèle d’affaires avec une structure hyper légère ne pourrait pas avoir un chiffre d’affaires de 10 millions par année !

Combien avez-vous d’employés ?

Dans les dernières années, j’avais des employés réguliers et j’avais l’impression qu’ils étaient un peu assis sur leur paye qui rentrait chaque semaine.

Je fais dorénavant le choix de m’entourer de gens, c’est un peu cliché à dire, mais qui ont du cœur au ventre, parce que je vois une différence dans la proaction. Lorsqu’on est une petite PME qui joue dans la cour des grandes, on n’a pas le choix d’être sans cesse sur le qui-vive.

J’ai une structure légère avec une équipe, mais qui n’est pas sur mon « payroll » : des comptables, fiscalistes, adjoints aux opérations, administrateurs, trois sous-traitants en communication et sept usines partenaires avec lesquelles je ne suis pas associée qui s’occupent de la distribution des produits dans les entrepôts de Sobeys.

Comme je n’ai pas étudié en biochimie des aliments, ce sont des experts qui s’assurent que mes recettes respectent mon défi : avoir des produits frais sans agents de conservation avec des noms bizarres. Développer des aliments santé, sains et bons au goût, c’est tout un art.

PHOTO YAN DOUBLET, LE SOLEIL

Vous êtes non seulement une femme d’affaires, mais aussi une sportive qui a fait les plus grands marathons, dont ceux de Boston, de New York et de Chicago. Quelle est votre recette pour être aussi performante ?

Bien manger, bien dormir, faire un plan et l’exécuter. C’est tout. Sur mon site, ma devise est : mieux manger, mieux être, mieux vivre. Il y a actuellement une surconsommation de sucre raffiné qui cause toutes sortes de maladies. Juste en les coupant, on augmente la qualité de notre énergie. Quand je suis devenue marathonienne, j’avais très faim tout le temps et je ne voulais pas mettre n’importe quoi dans mon corps. Ce qu’on met dans notre corps, ce n’est pas juste manger, c’est un carburant. Il y a un impact direct sur ta bonne humeur, ta performance et ta façon de voir les choses. Avec ma purée de dattes comme substitut des sucres raffinés, je constate que je contribue à améliorer la santé durable et globale des Québécois, parce qu’on ajoute des fibres dans notre alimentation.

Pourquoi est-ce important pour vous de transmettre des valeurs comme la confiance en soi, le mieux manger, la persévérance et la débrouillardise ?

Parce que je n’ai rien eu de tout cuit dans le bec. Je n’ai pas eu de parents pour m’ouvrir les portes. Je suis la démonstration que peu importe le milieu d’où tu viens, si tu crois en tes rêves, que tu prends soin de toi et que tu travailles fort, c’est possible. Ça aurait été plus facile de « chiller », mais je n’avais pas le goût de rêver ma vie, je voulais faire de ma vie un grand rêve. Désolée pour le cliché. On a tous ce pouvoir-là. Il faut arrêter de chialer et incarner la personne qu’on veut devenir, peu importe notre ambition. Le leadership, c’est avoir confiance en nos idées et en être tellement persuadé qu’on réussit à convaincre les autres d’embarquer avec nous. On sort un peu du lot. Parfois, on est le petit canard noir. Mais il faut se rappeler que ce petit canard noir devient un cygne majestueux.