Les subventions massives offertes à Northvolt, Volkswagen et Stellantis pour les convaincre de construire des méga-usines de batteries au Québec ainsi qu’en Ontario pourraient s’accompagner d’une facture inattendue de plusieurs milliards de dollars pour les contribuables.

Cet avertissement figure dans une analyse publiée vendredi par le directeur parlementaire du budget (DPB), qui chiffre à 43,6 milliards le coût total de l’aide des ordres de gouvernement pour séduire ces multinationales. C’est presque 6 milliards de plus que les projections gouvernementales.

Le calcul du chien de garde des contribuables ne tient toutefois pas compte des frais de la dette publique engagés par les gouvernements pour subventionner Northvolt, Volkswagen et Stellantis. La facture pourrait ainsi grimper de 6,6 milliards d’ici 2032-2033 si les subventions viennent creuser les déficits gouvernementaux.

C’est l’angle mort de ce type de subvention. C’est clair que ça aura un impact sur les déficits et que tout cela aura besoin d’être financé par des emprunts additionnels. Peut-être moins au Québec avec l’horizon du retour à l’équilibre, mais au fédéral, il n’y a pas de cible.

Yves Giroux, directeur parlementaire du budget

Le rapport du DPB n’offre pas de ventilation entre le Québec, l’Ontario et le gouvernement fédéral. N’empêche, les frais de la dette devraient faire partie de l’équation lorsque l’on tente de calculer le délai de recouvrement, souligne M. Giroux.

« L’inclusion d’autres coûts (c’est-à-dire le soutien à la construction, les pertes de revenus et le service de la dette) prolongerait davantage les seuils de rentabilité », souligne le rapport du DPB.

Un peu plus long

L’équipe de M. Giroux estime par ailleurs que Québec et Ottawa devront patienter deux ans de plus que prévu avant de récupérer le montant total des subventions à la production de 4,6 milliards offertes à Northvolt pour son usine de cellules de batteries. En confirmant l’arrivée de l’entreprise suédoise en Montérégie, en septembre dernier, les deux ordres de gouvernement faisaient miroiter un horizon oscillant entre cinq et neuf ans.

Pourquoi cet écart entre calculs gouvernementaux et calculs du DPB ? La méthode du directeur tient compte de la montée en cadence de la production qui devra s’effectuer lorsque l’usine de la jeune pousse suédoise démarrera, vers 2026. De son côté, le ministère fédéral de l’Innovation, Sciences et Développement économique table sur une « pleine production » dès le début des activités.

Avec Northvolt, les gouvernements ont bien fait leurs devoirs, estime M. Giroux.

« On a été agréablement surpris de voir que notre méthodologie a été utilisée pour Northvolt, dit-il. On ne considère pas que c’est un écart majeur [avec l’hypothèse gouvernementale]. Ce n’est certainement pas au même titre que le fédéral qui avait annoncé que tout serait remboursé en moins de cinq ans pour Volkswagen et Stellantis alors que c’est plus proche de 20 ans. »

En marge d’une allocution devant le Conseil des relations internationales de Montréal (CORIM), le ministre de l’Économie, de l’Innovation et de l’Énergie ne s’est pas formalisé de l’écart entre sa prévision et celle du DPB.

« Neuf ans ou onze ans… Je pense que le neuf est bon, a dit M. Fitzgibbon. Les hypothèses sont différentes. Mais c’est un projet qui va être payant dans dix ans. »

Plus que des subventions

En plus de subventionner la production du complexe de Northvolt – une décision pour répliquer à l’Inflation Reduction Act (IRA) de l’administration Biden –, les gouvernements Legault et Trudeau financent également conjointement sa construction à hauteur de 2,74 milliards par l’entremise de prêts et de prises de participation.

Northvolt s’établira sur l’ancien site d’explosifs de la Canadian Industries Limited (CIL), à cheval sur les municipalités de McMasterville et Saint-Basile-le-Grand, en banlieue sud de Montréal. Le terrain est d’une superficie de 170 hectares – environ 130 terrains de football.

La première phase du complexe devrait exiger près de 200 mégawatts de puissance, soit environ la moitié d’une aluminerie. En principe, les travaux doivent s’amorcer d’ici la fin de l’année.

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    Portion de l’aide publique à Northvolt, Volkswagen et Stellantis assumée par Ottawa
    Source : Directeur parlementaire du budget