Le débat sur l’assurance médicaments universelle devrait bientôt s’intensifier alors que le gouvernement fédéral a promis de déposer un projet de loi sur l’assurance médicaments.

La profession actuarielle a été associée de près au développement des grands programmes sociaux canadiens, comme le RRQ, l’assurance maladie, etc. L’Institut canadien des actuaires a pris position sur l’assurance médicaments en 2021. À cette étape-ci du débat, nous désirons expliquer davantage notre position.

Tous les Canadiens devraient être couverts par une assurance médicaments abordable. Plutôt qu’établir un régime universel public unique pour tout le Canada, avec les incertitudes quant aux économies éventuelles et l’empiétement fédéral dans un domaine de compétence provinciale, nous proposons de bâtir sur ce qui existe déjà et d’établir un cadre national dans lequel évolueraient des régimes publics et privés.

Dans ce cadre, les régimes collectifs privés, offerts par les employeurs, les syndicats et les associations professionnelles, demeureraient disponibles, mais devraient respecter des critères nationaux quant aux médicaments couverts et la part maximale du coût demeurant à la charge du patient. Les personnes ne disposant pas d’un régime privé seraient obligatoirement couvertes par un régime géré par leur province de résidence. Partout, les aînés et les prestataires d’aide de dernier recours ont déjà accès à une assurance médicaments publique. On ne ferait qu’ajouter au régime public les personnes non couvertes ailleurs.

Le gouvernement fédéral aurait un rôle important à jouer, comme réassureur, en prenant à sa charge une part des réclamations catastrophiques de chaque patient. De plus, la négociation du prix des médicaments serait centralisée auprès d’un organisme unique, afin d’avoir le pouvoir de négociation le plus fort.

L’approche proposée permettrait aux gouvernements de continuer à se concentrer sur l’amélioration de la santé et les programmes d’éducation de la population et des médecins plutôt que sur l’architecture et l’administration d’un système d’indemnisation.

Pourquoi cette approche ? Pour une kyrielle de raisons :

• Garantir une couverture juste et équitable à tous ;

• Diriger les efforts des gouvernements vers des enjeux de prix et de disponibilité des médicaments et les enjeux de santé publique ;

• Permettre une implantation rapide en réduisant l’éventualité de dérapages administratifs ;

• Répartir les risques entre le plus grand nombre d’intervenants (non seulement les contribuables à travers leurs gouvernements, mais aussi les employeurs et les assureurs) ;

• Conserver le financement actuellement offert par les employeurs ainsi que la plus grande générosité et la flexibilité de leurs régimes ;

• Continuer à bénéficier du travail des assureurs privés qui supportent une partie importante du risque de dépassement de coûts, avec des primes comportant peu de frais administratifs et de profits ;

• Respecter les compétences constitutionnelles des provinces ;

• Permettre aux provinces de conserver leurs revenus fiscaux sur l’assurance médicaments privée (taxes totalisant plus de 12 % au Québec et 10 % en Ontario).

Avant de procéder, il faut analyser sérieusement les coûts et les risques de toute approche nationale en assurance médicaments. Les estimations qui circulent prêtent le flanc à la contestation. Or, l’information existe. Au moins dans le cas du Québec, dont le régime est une mine d’or de données et de renseignements. Et on peut la compléter à l’aide des données des assureurs. Quant aux économies qu’on espère réaliser par des mesures de contrôle de coût nationales, il faudra les baser sur des analyses solides.

Le cadre québécois existe depuis 1997 et on sait ce qui a bien et moins bien fonctionné, ce qui a été corrigé et pourquoi. Il correspond possiblement à notre capacité et à notre volonté de payer. La limite à la charge du patient (1196 $) semble onéreuse, mais devient minuscule si on la compare aux prix faramineux de nombreuses réclamations observées.

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