Dans chaque entreprise se cache au moins un employé qui se distingue tant par son efficacité que l’appui qu’il offre à ses collègues ou l’appréciation des clients. La Presse vous a demandé d’identifier cet employé dans votre entourage. Nous vous présenterons leur histoire.

En 2006, quand Jackeline Ojeda s’est fait offrir un poste d’adjointe administrative par le planificateur financier Pierre Lafond à Repentigny, elle a hésité.

Jackeline Ojeda

Adjointe administrative chez Services financiers Pierre Lafond

Arrivée du Mexique peu avant, où elle enseignait l’anglais, cette littéraire émue par Gabriel García Márquez et Taylor Caldwell ne parlait pas très bien français et, surtout, elle n’avait aucun intérêt pour le monde abscons – et aride, croyait-elle – des fonds communs de placement.

« Sincèrement, je pensais que je n’aimerais pas ça, dit-elle. Ce qui m’intéressait, c’était l’enseignement des langues secondes, et je voulais m’inscrire à l’université. J’ai dit oui en me disant que c’était juste en attendant et pour payer mes études. »

Dix-sept ans plus tard, Mme Ojeda est la charpente du bureau de M. Lafond, qui a écrit à La Presse pour dire qu’elle était la meilleure décision d’embauche de sa vie.

« Cette employée est de l’or en barre », a dit en entrevue M. Lafond, qui va bientôt prendre sa retraite et qui se félicite encore de s’être fié à son jugement sur le caractère de la candidate, pas seulement sur son CV.

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, LA PRESSE

Pierre Lafond, planificateur financier

J’ai vite vu qu’elle était ponctuelle, fiable, travaillante et professionnelle. Elle a fait très peu d’erreurs et les rares fois que c’est arrivé, elle a eu l’honnêteté de le dire.

Pierre Lafond, planificateur financier

« Quand elle est arrivée au Québec, à 40 ans, c’était une pure immigrante qui avait tout vendu au Mexique pour venir s’établir ici avec sa fille. »

Or, l’immigrée qui parlait peu français et qui ne connaissait rien aux fonds communs n’a pas fait dans les demi-mesures, dit son patron : « Pour se mettre à niveau en français, elle s’est inscrite au programme intensif de francisation de l’UQAM. Elle a tout absorbé ! Elle écrit le français presque sans fautes et elle vérifie quand elle n’est pas sûre. Elle a un œil de lynx et corrige même mes rapports. » Résultat, c’est elle qui gère le service à la clientèle au téléphone et par écrit avec une clientèle très majoritairement francophone, dit M. Lafond.

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, LA PRESSE

Jackeline Ojeda

« J’ai tellement aimé ça ! », dit Mme Ojeda au sujet de ses cours de français. « J’analysais la langue et les différences avec l’espagnol, c’était fascinant. » Elle note que le français, avec ses nombreuses exceptions, est plus compliqué que l’espagnol, avec son orthographe presque totalement phonétique. « Prenez juste les noms de famille : Archambault, Thibeault, Pineau. Moi, je mettrais un o à la fin et ça finirait là ! », dit-elle en riant.

Même ardeur pour le côté technique du travail, dit M. Lafond : sa « travailleuse acharnée » s’est investie dans l’apprentissage de l’épargne collective et a obtenu son certificat de l’Institut des fonds d’investissement du Canada.

M. Lafond dit que son adjointe a les connaissances pour être représentante en épargne collective et qu’il lui a offert, à un moment donné, de prendre des clients.

« Non, ça prend un certain tempérament pour faire ça, par exemple quand les marchés baissent et qu’il faut gérer ses émotions et celles des clients, dit Mme Ojeda. Ça, je ne l’ai pas. Même chose pour conseiller des fonds. Si j’essaie de vous vendre n’importe quoi, c’est moi, à la fin, qui vais finir par vous acheter quelque chose ! »

En revanche, M. Lafond dit que son employée a un bon jugement d’affaires, qu’elle a démontré quand son cabinet en a choisi un autre en vue d’une fusion, qui est en cours, en vue de son retrait graduel des affaires : « Elle a eu son mot à dire. »

Récemment, M. Lafond a pu partir quelques mois en sabbatique avec sa conjointe : « J’étais en contact avec le bureau, mais j’étais en complète paix d’esprit sachant qu’avec Jackeline au poste, la forteresse était bien gardée. »

« Au Mexique, j’avais fait un bac en communications, dit Mme Ojeda. Mais j’ai choisi d’être prof d’anglais, parce que l’horaire faisait avec la garderie de ma fille de 3 ans. Ça m’a bien servie en épargne collective. La plupart des compagnies de fonds communs sont à Toronto, et j’apprenais beaucoup de ce côté-là aussi. »

« Mais ce que j’aime le plus, c’est le contact avec les clients. Ce sont mes moments chouchous de la journée », dit-elle, ce que son patron souligne aussi : « Mes clients l’adorent au point que certains d’entre eux ne veulent même plus me parler ! »

« Dans un monde où le bon service à la clientèle est d’une autre époque, je me sens privilégié d’avoir une telle alliée », dit M. Lafond.